Impôts, 49.3, taxe Zucman… Ce que Sébastien Lecornu a promis et ce qu'il a déjà écarté depuis son arrivée à Matignon
Quatre semaines après sa nomination, le nouveau Premier ministre a dessiné les contours de la politique de son gouvernement, sur la forme et le fond. Il doit défendre ses priorités devant l'Assemblée nationale, mardi après-midi.
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Certains y verront peut-être les bases d'une déclaration de politique générale, qui sera officiellement prononcée mardi 7 septembre, dans l'après-midi. Depuis sa nomination comme Premier ministre, le 9 septembre, jusqu'aux dernières négociations pour former son gouvernement, dimanche, Sébastien Lecornu a progressivement dévoilé les pistes qu'il voulait explorer depuis Matignon.
L'ancien ministre des Armées a eu le temps de prendre plusieurs engagements sur certains chantiers, comme l'abandon du 49.3 ou la lutte contre les fraudes, et à l'inverse d'évacuer certaines réformes, comme la suspension de la réforme des retraites. Franceinfo fait le point sur les premiers choix politiques du chef du gouvernement avant son grand oral.
Ce qu'il s'est engagé à faire
Abandonner le 49.3 pour faire adopter des textes. "J'ai décidé de renoncer à l'article 49.3 de la Constitution" pour gouverner, a déclaré le Premier ministre sur le perron de Matignon, vendredi, lors de l'une de ses très rares prises de parole depuis sa nomination. Cette disposition permet au gouvernement de faire adopter un texte sans vote à l'Assemblée nationale, et a été utilisée pour chaque budget depuis 2022. "Dans un Parlement qui fonctionne, dans un Parlement en plus qui a été renouvelé il y a plus d'un an, qui ressemble aux Français avec ses divisions, on ne peut pas passer en force et on ne peut pas contraindre son opposition", a-t-il avancé.
Baisser une cotisation touchant les entreprises. Samedi, le Premier ministre a adressé un premier geste en direction des Républicains sur le volet budgétaire. Sébastien Lecornu a décidé d'inscrire dans son projet de budget une baisse de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), a confirmé son entourage. "Cette baisse de la CVAE est un soutien direct au produire en France", a défendu Matignon, tout en reconnaissant que la mesure "représenterait un coût de 1,1 milliard d'euros pour 2026 pour les finances publiques". Si les finances publiques "le permettent", le gouvernement dit vouloir désormais œuvrer à sa "suppression progressive d'ici trois ans", d'après l'entourage du Premier ministre.
Réduire le train de vie de l'Etat. Fin septembre, Sébastien Lecornu a annoncé dans Le Parisien qu'il allait "proposer une diminution de 6 milliards d'euros sur l'Etat et son train de vie". Plusieurs mesures symboliques ont déjà été avancées, comme la limitation des avantages accordés "à vie" aux anciens Premiers ministres et à certains ex-ministres, à partir du 1er janvier 2026. Plus largement, il souhaite ramener le déficit public "aux alentours" de 4,7% du produit intérieur brut (PIB) en 2026, quand son prédécesseur visait 4,6%, après 5,4% attendus en 2025. La cible d'un déficit de 3% du PIB en 2029 est confirmée.
Mettre en place un "grand acte de décentralisation". En pleines négociations avec les forces politiques, Sébastien Lecornu s'est adressé à deux reprises par courrier aux élus locaux. "Un grand acte de décentralisation sera bientôt présenté devant le Parlement pour définir précisément la compétence de chacun et éviter la dilution des responsabilités", écrivait-il, le 17 septembre. Dans son courrier aux parlementaires du "socle commun" du centre et de la droite, dimanche, il promet de "faire aboutir dans les tous prochains mois un nouvel acte de décentralisation".
Présenter rapidement le projet de loi contre les fraudes sociales et fiscales. Sébastien Lecornu promet de présenter un texte spécifique pour mieux "détecter, sanctionner et recouvrer" les fraudes, "qu'elles soient le fait de particuliers ou d'entreprises, organisées ou occasionnelles". Sur X, dimanche, il a défendu des "ordonnances sécurisées pour limiter les prescriptions abusives", "l'obligation de consulter un dossier médical partagé avant certains actes coûteux", le "renforcement du contrôle du financement des formations par le compte personnel de formation (CPF)" ou encore le "versement du chômage uniquement sur des comptes bancaires domiciliés en Union européenne". Le texte, déjà promis par le précédent gouvernement, doit aboutir "avant la fin de l'année".
Ce qui reste à trancher
Baisser l'impôt sur le revenu des ménages modestes. Sébastien Lecornu étudie une baisse de l'impôt sur le revenu pour les couples payés "légèrement" au-dessus du smic. Auprès de France Télévisions, Matignon a précisé que "l'effet serait concentré sur les personnes déclarant entre 17 000 euros et 27 000 euros par personne du couple". Cette "conjugalisation de la décote" concernerait cinq millions de foyers, pour un gain moyen de 300 euros par an. Rien n'était encore arbitré, précisait Matignon jeudi soir.
Mettre en place plusieurs mesures fiscales avantageuses. Au-delà de l'impôt sur le revenu, le chef du gouvernement examine aussi le rétablissement des avantages fiscaux de la "prime Macron", rabotés quand elle est devenue une "prime de partage de la valeur" en 2024. Il réfléchit également à une mesure "encourageant" les transmissions aux petits-enfants et aux jeunes.
Reconduire deux dispositifs pour taxer les plus hauts revenus. Selon Les Echos et l'AFP, le gouvernement pourrait reconduire la CDHR (contribution différentielle sur les hauts revenus), héritage du gouvernement Barnier en 2024, mais aussi la CEHR (contribution exceptionnelle sur les hauts revenus). Ces deux taxes pourraient rapporter un total de 3 milliards d'euros (1,5 milliard d'euros pour chacune de ces taxes), d'après ces médias.
Adopter plusieurs mesures pour "la sécurité du quotidien". "Quelques mesures concrètes" en matière de sécurité doivent être mises en place "dans les prochaines semaines", écrit Sébastien Lecornu dans son courrier aux parlementaires du centre et de droite, dimanche. Il cite l'"extension des prérogatives des polices municipales et des gardes champêtres", objet d'un projet de loi esquissé par le précédent gouvernement, ou encore la "lutte contre le narcotrafic", l'"adoption de nouvelles mesures contre les incivilités du quotidien", la "construction de nouvelles places de prisons", l'"adaptation de notre politique pénale à la réalité de la délinquance et de la criminalité d'aujourd'hui, etc.", détaille-t-il.
Ce qui a été clairement écarté
Suspendre la réforme des retraites et relancer le "conclave". La gauche et les syndicats n'auront pas gain de cause sur la suspension ou l'abrogation de la réforme des retraites, du moins dans le projet de budget. Cependant, le Premier ministre veut inscrire l'"amélioration de la retraite des femmes" dans le projet de budget de la Sécurité sociale. Il veut pour cela reprendre certaines mesures proposées dans le cadre du "conclave" sur la réforme des retraites, qui s'était achevé par une impasse en juin. Sous quelle forme ? "Il n'a jamais été question" de relancer ces concertations, affirmait-il à plusieurs médias régionaux, mi-septembre.
Instaurer la taxe Zucman réclamée par la gauche. Côté recettes, le nouveau locataire de Matignon a jugé "dangereuse" pour l'économie la taxe Zucman réclamée par la gauche, pour taxer à 2% minimum les patrimoines des 1 800 contribuables les plus riches, tout comme il a balayé le retour de l'impôt de solidarité sur la fortune. Pour autant, il s'est dit sensible aux appels à "plus de justice fiscale" et a proposé vendredi la création d'une "taxe sur le patrimoine financier" des holdings familiales, parfois utilisées pour contourner l'impôt, qui pourrait concerner 30 000 structures et rapporter 1 à 1,5 milliard d'euros. Ses modalités restent cependant à préciser.
Supprimer deux jours fériés. C'était l'une des mesures emblématiques du projet de budget de François Bayrou lorsqu'il était encore à Matignon. Mais son remplaçant, Sébastien Lecornu, a décidé de se passer de ce levier budgétaire. "Je souhaite que l'on épargne celles et ceux qui travaillent. C'est pourquoi j'ai décidé de retirer la suppression de deux jours fériés", a-t-il expliqué à la presse régionale, mi-septembre.
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