Affaire Bétharram : failles dans la protection de l'enfance, punitions disproportionnées… Quels sont les éléments pointés du doigt par l'inspection académique ?
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Le contrôle effectué en mars par le rectorat de Bordeaux fait état de plusieurs dysfonctionnements. Une enquête administrative par l'inspection générale a été ordonnée par la ministre de l'Education, Elisabeth Borne.
Une inspection académique qui va conduire à une enquête plus poussée après avoir mis en lumière des "manquements". Elisabeth Borne a annoncé dans La Croix, jeudi 10 avril, le lancement d'une enquête administrative par l'inspection générale sur l'établissement catholique privé Le Beau Rameau, nom actuel de Notre-Dame de Bétharram. Elle était demandée depuis plusieurs semaines par des députés, dont Paul Vannier (LFI), co-rapporteur de la commission d'enquête sur les violences en milieu scolaire, ouverte en réaction aux multiples plaintes pour des faits de violences à Bétharram des années 1950 aux années 2000.
La ministre de l'Education nationale souligne que le rapport du contrôle mené par le rectorat à Bétharram en mars est assorti "d'une mise en demeure avec une obligation de mise en conformité à court terme" sur des points problématiques. Le recteur de Bordeaux, Jean-Marc Huart, a adressé dans la foulée une dizaine de "mises en demeure" à la direction de cet établissement, où sont scolarisés 500 élèves. "Le contrôle portait sur la situation actuelle de l'établissement et non sur les faits antérieurs", rappelle Elisabeth Borne.
Attitude malveillante d'enseignants, manquements dans la protection de l'enfance, punitions excessives, célébrations religieuses sur le temps scolaire… Franceinfo, qui s'est procuré le rapport de l'académie bordelaise, vous résume les points inquiétants qui "doivent être corrigés au plus vite", selon les inspecteurs.
Des "remarques humiliantes" et répétées venant de deux enseignants
Plusieurs élèves font état "de remarques blessantes et humiliantes et de moqueries en public" de la part de deux enseignants du second degré. "Ces agissements sont répétés et réguliers, et visent tout particulièrement les élèves en difficulté scolaire", note le rapport.
"On ne peut pas accepter cette attitude de la part d'enseignants qui doivent au contraire faire preuve de bienveillance dans leur approche éducative", s'inquiète Elisabeth Borne dans les colonnes de La Croix. "C'est sur ce point-là en particulier que je souhaite une enquête administrative de l'inspection générale, en vue de l'ouverture éventuelle d'une procédure disciplinaire."
Des failles dans la protection de l'enfance
Sur la protection de l'enfance, "le suivi des situations est réel, mais il n'est ni formalisé, ni communiqué en direction des personnels et des institutions", pointe le rapport. La direction des services départementaux de l'Education nationale (DSDEN) des Pyrénées-Atlantiques n'a ainsi été destinataire "d'aucun signalement ou information préoccupante" depuis 2006.
Bonne nouvelle ? Pas vraiment. Selon les inspecteurs, "deux situations d'agression sexuelle ont été portées à [leur] connaissance, l'une à l'intérieur de l'établissement, l'autre à l'extérieur", près d'un arrêt d'autobus. Ces deux situations ont été traitées sur le plan judiciaire, avec l'ouverture d'enquêtes confiées à la gendarmerie. "Les enfants et les familles ont été soutenus par la direction, mais nous n'avons la trace d'aucune autre action formalisée", précise le rapport.
Des problèmes concernant l'internat des garçons, qui accueille 27 élèves, ont aussi été signalés, avec notamment un surveillant qui "ne connaît pas la procédure de signalement" pour les motifs d'enfance en danger.
De nombreuses sanctions et punitions disproportionnées
Lors de leur inspection, les services du rectorat ont fait le constat, depuis septembre, d'un "nombre important de sanctions disciplinaires prononcées (27), particulièrement au regard du nombre d'élèves scolarisés à l'ensemble scolaire Beau Rameau", soit 383 élèves en collège et lycée. Il s'agit, en très grande partie, d'exclusions temporaires.
Portant sur la même période, le nombre de punitions scolaires (423) est également plus élevé que le nombre d'élèves dans le second degré. Au collège, en particulier, les inspecteurs relèvent une certaine "institutionnalisation de la retenue". Dès le début de l'année, un document intitulé "planning des retenues : collège" attribue à un enseignant, pour chaque semaine et pour chaque niveau, "un sujet à préparer qui occupe les élèves deux heures en retenue".
"Au final, un nombre non négligeable de punitions scolaires et de sanctions disciplinaires prononcées à l'encontre des élèves de l'ensemble scolaire Beau Rameau n'ont pas de base juridique ou ont une valeur juridique contestable en raison du non-respect, simple ou cumulatif, des règles de droit applicables", regrettent les inspecteurs.
Ils soulignent par ailleurs que les surveillants sont "quasi-exclusivement en charge de strictes missions de surveillance des élèves", et n'assurent que très peu des missions pédagogiques et éducatives, ce qui serait pourtant propice "à l'affirmation du bien-être des élèves".
Un accès contraint aux toilettes
Le rapport relève des interdictions d'aller aux toilettes qui "apparaissent de facto contraires au bien-être de l'élève, à la lutte contre les discriminations sexistes et à l'affirmation de l'égalité fille-garçon". A l'école, il est précisé qu'"aucun élève n'est autorisé à sortir de l'étude, ni pour boire, ni pour aller aux toilettes, ni pour se rendre à l'administration, à la vie scolaire ou à l'infirmerie". Au collège et au lycée, les règles sont aussi très contraignantes, avec "une interdiction de se rendre aux toilettes pendant une heure d'études et entre deux cours – sans la présence d'un adulte, dans ce dernier cas".
Des lacunes dans le signalement des absences
Alors que de très nombreuses absences d'élèves sont notées comme "non justifiées" ou "maladie sans certificat médical", les inspecteurs académiques s'étonnent que "la DSDEN des Pyrénées-Atlantiques ne soit destinataire d'aucun signalement [portant sur l']absentéisme en deux ans". Dans La Croix, Elisabeth Borne explique ainsi que l'établissement "ne met pas l'autorité académique en situation de signaler à la justice ce manquement à l'obligation de scolarisation d'un enfant", ce qui doit être "corrigé".
Par ailleurs, le calendrier scolaire communiqué aux inspecteurs "ne comporte que 35 semaines", ce qui n'est pas conforme au Code de l'éducation, selon lequel il doit en comporter 36.
Un mélange des temps religieux et scolaires
"Si l'instruction religieuse est facultative, certaines célébrations ne semblent pas basées sur le volontariat et sont proposées sur le temps scolaire", selon le rapport, qui donne l'exemple de "l'allumage des bougies de l'Avent sur quatre jours en décembre accompagné d'un temps de prière" au moment de la reprise des cours, à l'école primaire. Parce que ce temps de célébration apparaît obligatoire, cela "contrevient au principe de la liberté de conscience", estiment les inspecteurs.
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