"Pourquoi le pays ne s'en sort pas avec tout ce qu'ils nous prennent ?" : à Neuilly, des contribuables aisés fustigent la gestion de l'argent public
À quelques jours du vote de confiance qui doit sceller le sort de François Bayrou et de son gouvernement, franceinfo continue de donner la parole aux Français. À Neuilly-sur-Seine, ils ne sont pas tous contre un effort supplémentaire, à condition de mieux "gérer" le pays.
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À Neuilly-sur-Seine, la ville la plus riche d'Île-de-France, les habitants sont-ils prêts à faire des efforts pour rembourser la dette, en payant par exemple plus d'impôts ? "Je trouverai des solutions pour ne pas les payer", répond David, mercredi 2 septembre, pianotant sur ses deux téléphones à la terrasse d'un café brasserie chic de la place du Marché. Ce dentiste de 49 ans a plusieurs cabinets en région parisienne et touche des revenus confortables, "entre 250 000 et 350 000 euros par an", soit entre 20 000 et 30 000 euros par mois. "Sans compter des dividendes possibles ou des choses comme ça", ajoute-t-il.
David se voit comme un entrepreneur qui a monté son affaire. "Il n'y a pas de raison de demander à ceux qui ont pris le risque d'être entrepreneurs, et de gagner plus d'argent, de payer pour les autres", explique ce contribuable qui paie déjà "beaucoup trop" d'impôts, selon lui. David a fait ses comptes, "80 000, 90 000 euros par an, estime-t-il. On ne peut pas continuer à payer comme ça. On doit être à des prélèvements entre 45% et 50%. Quand on voit d'autres pays européens, on ne comprend pas pourquoi les autres pays d'Europe s'en sortent, alors que nous, on ne s'en sort pas avec tout ce qu'ils nous prennent. C'est incompréhensible."
"Il en manque tout le temps !"
À côté de lui, Patrick a entendu la conversation. Il est dans l'immobilier. "Moi je suis prêt à payer la dette, mais le problème, c'est qu'à chaque fois, il en manque. On va me dire, il faut payer en 2025. Mais en 2026, on va me dire, il en manque et en 2027, on va me dire la même chose. Il en manque tout le temps !"
En face du café, se trouve un cabinet de conseil en gestion de patrimoine. Jacques Riché revient juste de vacances, il a déjà reçu plusieurs coups de téléphone de clients inquiets des hausses d'impôts. "Les clients s'y attendent, dit-il, une sorte d'ISF [impôt sur la fortune], qui ne dit pas son nom va peut-être voir le jour, je n'en sais rien. Ils le pressentent. Maintenant, certaines grandes fortunes ont déjà mis leur argent ailleurs."
"Ils virent l'argent, ils vont au Luxembourg, en Suisse, aux États-Unis, au Canada. Ça a déjà commencé."
Jacques Riché, patron d'un cabinet de conseil en gestion de patrimoineà franceinfo
"Il y a de l'argent qui est parti depuis un an, un an et demi, précise le conseiller en patrimoine. Dans la semaine qui a suivi la dissolution de l'Assemblée, il y a un an et demi, c'est ce qui s'est passé. Sauf qu'on ne le crie pas sur tous les toits."
D'autres habitants de Neuilly sont tout de même d'accord pour participer à l'effort. Sur le boulevard du Château, bordé de grands platanes, Édouard gare son cabriolet devant un hôtel particulier. Dans son uniforme de pilote de ligne, il arrive de San Francisco avant d'aller à Pékin. Il enchaîne les vols ce mois-ci. Édouard gagne entre 10 000 et 11 000 euros nets par mois et fait donc aussi partie des contribuables les plus aisés qui, à plus de 7500 euros net par mois, représentent 1% de la population. Il est favorable à cet effort de solidarité même si "quel que soit son niveau de vie, on se met tous des expectatives qui font qu'on a tous les mêmes problèmes", dit-il.
Concernant la dette, lui est prêt à faire un effort supplémentaire : "Moi, je suis content d'être français, déclare-t-il, donc je n'ai pas l'intention de me rebeller contre le pays, quoi qu'il arrive. Il y a bien un moment où il faut qu'on paye les conditions de vie et le confort que nous avons. Quelque 1 000 euros de plus ne me feront pas changer quoi que ce soit dans ma vie."
L'ombre de la Grèce et du FMI
Quant à sa compagne Carla, ce n'est pas une hausse d'impôt qui l'inquiète, c'est plutôt l'après 8 septembre. J'ai peur que le pays soit bloqué, dit-elle, parce que personne ne veut payer, personne ne veut faire d'efforts sur rien. Il y a un moment donné où il va falloir qu'on fasse des sacrifices, sinon on va se retrouver dans la même situation que la Grèce il y a quelques années."
C'est aussi la crainte de Paul, patron de trois entreprises - dans le médical, dans les espaces verts et dans le numérique avec un data center. "Je suis prêt à contribuer, assure-t-il, à la seule condition : qu'on arrête de claquer de l'argent parce qu'on va vers la faillite."
"On a 180 000 milliards de déficit par an, c'est complètement anormal."
Paul, patron de trois entreprisesà franceinfo
"La France, insiste l'entrepreneur, va être régie par le FMI. Vous allez voir, on va y arriver, comme l'a été dans le passé la Grèce. Je vous le dis, moi en ce moment, je n'investis rien, il n'y a aucune stabilité politique en France, c'est un chaos !"
Sa baguette sous le bras, Jean-Luc, 68 ans, ancien patron dans le BTP, ne voit pas ce qu'un nouveau Premier ministre changerait. "J'étais un macroniste du départ, raconte-t-il, qu'est-ce qu'il nous sort du chapeau, des vieux mecs du système comme Barnier. En fait, il faut péter complètement le système politique. Il faut mettre des chefs d'entreprise à la tête de l'État, c'est tout. Il faut foutre des patrons, des mecs qui savent bosser, qui savent ce que c'est qu'un compte d'exploitation et qui gèrent ! Je fais partie des gens qui disent qu'un pays, ça se gère comme une entreprise." Pour Jean-Luc, une tutelle du FMI, une austérité forcée comme en Grèce ou au Portugal, ce serait un mal pour un bien.
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