"Bienvenue au club", "Un saut dans le vide"... La chute du gouvernement Bayrou largement commentée par la presse européenne

Article rédigé par franceinfo
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François Bayrou, Premier ministre, le 8 septembre 2025 devant l'Assemblée nationale. (BERTRAND GUAY / AFP)
François Bayrou, Premier ministre, le 8 septembre 2025 devant l'Assemblée nationale. (BERTRAND GUAY / AFP)

L'instabilité politique en France est scrutée par toute la presse européenne, au lendemain de la chute du gouvernement. Notamment en Italie, au Royaume-Uni ou en Belgique, où les commentaires ne sont pas très tendres.

Comment la chute de François Bayrou et l'instabilité politique française depuis la dissolution de juin 2024 sont-elles perçues par nos voisins européens ? La presse étrangère fait une place importante à la nouvelle crise en France dans ses journaux.

Plusieurs chaînes de télévisions internationales ont ainsi suivi avec attention la dernière intervention du Premier ministre à l'Assemblée nationale, au point de diffuser en direct son discours.

Mais au lendemain de ce vote perdu par François Bayrou à l'Assemblée, le ton est parfois moqueur. Comme en Italie. Longtemps vue comme "l'homme malade de l'Europe" justement sur la question de la dette, la péninsule s'inquiète pour son voisin. La chute du gouvernement Bayrou fait la une de tous les journaux italiens avec un même titre : "La France dans le chaos".

Le pays fait "un saut dans le vide", estiment la plupart des observateurs italiens qui s'inquiètent et appellent le gouvernement Meloni à ne pas se réjouir trop vite. Instabilité politique, dette publique incontrôlable, défiance des marchés financiers, croissance économique en berne... Voilà la description peu flatteuse collée jusqu'à présent à la péninsule.

"La France dans le chaos", à la une des journaux italiens "Corriere della Sera", "La Stampa", et "La Repubblica", mardi 9 septembre 2025. (MONTAGE PHOTO CORRIERE DELLA SERA / LA STAMPA / LA REPUBBLICA)
"La France dans le chaos", à la une des journaux italiens "Corriere della Sera", "La Stampa", et "La Repubblica", mardi 9 septembre 2025. (MONTAGE PHOTO CORRIERE DELLA SERA / LA STAMPA / LA REPUBBLICA)

Une crise instrumentalisée par le pouvoir italien

Et si l'Italie, avec cette crise française, prenait un peu sa revanche sur Paris ? Rome s'est en effet toujours sentie méprisée, stigmatisée par une presse condescendante à son égard et par Emmanuel Macron... qui incarne de l'autre côté des Alpes le cliché de l'arrogance française. La crise à Paris est ainsi largement instrumentalisée ici par le gouvernement : la coalition des droites au pouvoir s'en sert comme d'un argument pour mettre en valeur la stabilité retrouvée de l'Italie grâce à Giorgia Meloni. Elle est solidement installée au palais Chigi depuis maintenant près de trois ans, un record en Italie.

Cela permet à la présidente du Conseil des ministres d'Italie, l'équivalent du Premier ministre en France, de légitimer sa politique en prouvant qu'elle a su relever, avec succès, les défis économiques, comme le chômage qui est à son plus bas niveau et la fin de la spéculation sur la dette italienne. Mais la crise politique en France n'est pas nécessairement une bonne nouvelle pour la "Botte", dont l'économie demeure fragile. L'instabilité en France pourrait avoir des conséquences également ici.

Londres fustige "l'enfant à problèmes budgétaires"

Les journaux anglais n’y vont pas non plus de main morte pour décrire la situation en France. Le Times compare François Bayrou à un "aristocrate débraillé se traînant dans sa charette vers la place de la Concorde. Il ne pouvait guère douter du sort qui l'attendait. La France est dans le déni de l’effondrement de ses finances". Elle est même devenue "l’enfant à problèmes budgétaires de la zone euro", s’emporte le Financial Times, désormais le troisième plus haut fardeau de la dette en Europe, derrière la Grèce et l'Italie.

La une du Financial Times, le 9 septembre 2025. (THE FINANCIAL TIMES)
La une du Financial Times, le 9 septembre 2025. (THE FINANCIAL TIMES)

Quand les marchés s’inquiétaient du Brexit, aujourd’hui c’est Paris qui les fait trembler, s’amusent les éditorialistes d'outre-Manche. Pour le Daily Telegraph, peu versé dans la francophilie, "l'heure est beaucoup plus grave que prévu, la France pourrait faire s'effondrer l'économie mondiale et entraîner le Royaume-Uni dans sa chute".

La presse n'est pas tendre avec le président Emmanuel Macron : il est décrit comme un homme affaibli, dépassé, sous pression. Un "illusionniste qui a perdu la main", encore plus impopulaire que sous les "gilets jaunes", alors qu'il se prépare à affronter une nouvelle tempête sociale, le mouvement "Bloquons tout", qui intrigue beaucoup les Britanniques.

"Bienvenue au club", lance la presse belge

La chute du gouvernement est également à la une de tous les journaux francophones en Belgique. "Bye bye Bayrou", titre La Libre Belgique, mardi matin. La situation politique attire de nombreux regards curieux : les Belges, rappelons-le, détiennent le record du monde de la plus longue durée sans gouvernement, avec 541 jours sans gouvernement fédéral.

La une de La Libre Belgique, le 9 septembre 2025. (LA LIBRE BELGIQUE)
La une de La Libre Belgique, le 9 septembre 2025. (LA LIBRE BELGIQUE)

"Bienvenue au club", ironisent certains titres de presse : ici aussi, on a l'habitude des gouvernements qui tombent, comme c'est un peu le cas aux Pays-Bas et d'ailleurs un peu partout en Europe. La France rejoint le club des démocraties parlementaires : ce sont des modes de fonctionnement auxquels les Belges ont l'habitude de se confronter.

Toute la question est maintenant de savoir comment faire une coalition, et les Belges disent aux Français : "C'est possible, aujourd'hui, on a bien réussi à le faire avec cinq à sept partis différents dans des gouvernements, ici, en Belgique".

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