Proposition de Richard Ferrand au Conseil constitutionnel : "Ce n'est pas un bon candidat", selon le constitutionnaliste Benjamin Morel

Non seulement Richard Ferrand a "un profil assez faible en droit" mais son "impartialité" serait inévitablement questionnée, pointe le constitutionnaliste sur France Inter.

Article rédigé par franceinfo
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L'ex-président de l'Assemblée nationale, Richard Ferrand, le 19 juin 2022. (LIONEL LE SAUX / MAXPPP)
L'ex-président de l'Assemblée nationale, Richard Ferrand, le 19 juin 2022. (LIONEL LE SAUX / MAXPPP)

Richard Ferrand "n'est pas un bon candidat" pour présider le Conseil constitutionnel, estime mardi 11 février sur France Inter le constitutionnaliste Benjamin Morel. Emmanuel Macron a proposé lundi soir de nommer l'ex-président de l'Assemblée nationale, l'un de ses fidèles, comme président du Conseil constitutionnel en remplacement de Laurent Fabius.

"On a un profil assez faible en droit", souligne premièrement le maître de conférences à l'université de Paris Panthéon-Assas. "On parle beaucoup de Jean-Louis Debré, qui a certes été président de l'Assemblée nationale [comme Richard Ferrand], mais il était également docteur en droit et magistrat. C'est autre chose du point de vue de la connaissance du droit constitutionnel."

Surtout, le contexte dans lequel s'inscrit cette proposition de nomination est particulièrement problématique, selon Benjamin Morel. Il souligne en effet que "l'État de droit n'a jamais été aussi faible, aussi attaqué, avec potentiellement une extrême droite qui demain pourrait arriver au pouvoir et une contestation globale de l'État de droit en France comme à l'étranger". 

Même non justifié, "le doute s'instillera"

Dans ce contexte, "si vous ne nommez pas une figure d'autorité, qui incarne une forme d'impartialité, le risque, c'est qu'une grande partie de l'opinion se dise que le problème, c'est l'État de droit et que c'est un instrument pour faire taire la démocratie, donc débarrassons-nous de l'État de droit", explique-t-il. "Il y a un vrai danger de 'trumpisation' de la vie politique contre l'État de droit si jamais on n'a pas une institution forte et légitime. Force est de constater que certaines nominations n'y concourent pas."

"Il ne s'agit pas de critiquer la personne même de Richard Ferrand", ajoute-t-il. "Le problème, c'est qu'on a un contexte global où il y a besoin d'un sentiment d'impartialité." "Pour qu'on croie collectivement dans l'État de droit, il faut que le juge donne le sentiment d'être impartial. Or, quand vous nommez un ancien proche du chef de l'État dans une période où on va trancher une question prioritaire de constitutionnalité qui pourrait emporter l'éligibilité ou l'inéligibilité de Marine Le Pen en 2027, où le Conseil constitutionnel va être juge électoral des élections présidentielles, forcément il y a un sentiment, un doute. Ce doute n'est peut-être pas justifié en faits, néanmoins, il s'instillera dans l'opinion et cela va affaiblir profondément ce gardien de l'État de droit dont on a si besoin, qu'est le Conseil constitutionnel", poursuit le politologue, soulignant que "c'est déjà une institution très fragile".

Au-delà d'un problème de compétences de Richard Ferrand, Benjamin Morel estime donc qu'il "faudrait vraiment s'assurer que les juges nommés soient des juges qui fassent à minima consensus".

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