Des amis de Copé aux fausses factures de la campagne de Sarkozy : comprendre l'affaire Bygmalion
Le scandale financier, qui porte le nom d'une société de communication fondée par des proches du patron de l'UMP, remonte jusqu'à l'ancien président de la République.
L'affaire Bygmalion pousse l'UMP au bord du gouffre. Et éclabousse tout l'organigramme du parti par le haut, de l'ancien président de la République Nicolas Sarkozy, au patron de l'opposition Jean-François Copé, en passant par leur cabinet respectif. Mardi 27 mai, un bureau politique houleux a entériné le principe d'une direction collégiale provisoire de l'UMP, assurée par Alain Juppé, Jean-Pierre Raffarin et François Fillon, jusqu'à un congrès du parti en octobre. Sans Jean-François Copé, qui a démissionné. Francetvinfo vous explique toute l'affaire en cinq phrases.
En 2008, des amis de Jean-François Copé reprennent une société de communication
C'est l'histoire de deux copains, Bastien Millot et Guy Alves, propriétaires d'une société de communication et d'évènementiel, qui saisissent une bonne opportunité. Ils ont un troisième ami proche : Jean-François Copé. Tous deux ont travaillé avec lui durant dix ans à la mairie de Meaux (Seine-et-Marne) et au sein de chacun de ses cabinets ministériels. "Mon boulot est à la lisière entre l'ami et le psy", confie d'ailleurs à l'automne 2013 Bastien Millot, au sujet de sa relation avec Jean-François Copé.
En 2008, les deux cofondateurs de Bygmalion rachètent l'agence de communication historique de l'UMP, Ideepole.
Sympa, le patron de l'UMP fait souvent appel à eux, et la plupart du temps sans appels d'offres
Dès 2008, l'UMP abreuve Bygmalion de contrats, le plus souvent sans appels d'offres, selon les révélations du Point, le 27 février. En 2010, selon Le Canard enchaîné, la société se voit confier le budget communication de l'UMP, gère aussi les plaquettes des députés UMP pour leur bilan de mi-mandat, la création de sites internet ou encore le recrutement de "futures stars de l'UMP", précise l'hebdomadaire satirique... Et en 2012, c'est la filiale événementielle de Bygmalion, Event & Cie, qui est sollicitée par le parti pour organiser tous ses grands événements et, surtout, les meetings de Nicolas Sarkozy. Montant de la facture pour sa campagne présidentielle : huit millions d'euros, dont cinq millions pris en charge par l'UMP, selon Le Point.
Tellement que l'on pense d'abord à du favoritisme, voire à un détournement de fonds
"Accusations malhonnêtes et insinuations écœurantes qui relèvent d'une volonté délibérée de nuire", dénonce d'abord Jean-François Copé le 27 février. Début mars, le parquet de Paris ouvre une enquête préliminaire pour "faux", "abus de biens sociaux" et "abus de confiance".
Deux mois plus tard, Libération fait de nouvelles révélations le 15 mai. Le quotidien affirme avoir consulté les factures d'Event & Cie sur la période de janvier à juin 2012. Quelque 19 millions d'euros ont été versés par l'UMP, dont 12,7 millions pour au moins 55 "conventions thématiques" fantômes dont personne ne se souvient. Même pas le député Pierre Lellouche, présenté par les documents consultés par Libération comme étant le principal intervenant d'une d'entre elles. Il porte plainte le 26 mai pour usurpation d'identité. Une autre convention sur "les printemps africains" voit une salle louée à Event & Cie 17 581 euros, se transformer en facture de 680 950 euros adressée à l'UMP.
Où est passé l'argent ? Jean-François Copé change de ligne de défense : il affirme qu'il ne savait rien de tout ça et remercie la presse d'avoir suscité en lui "des interrogations".
En fait, les fausses factures auraient surtout servi à masquer les dépenses de campagne hors budget de Nicolas Sarkozy
Tout s'accélère le 26 mai. L'avocat de la société Bygmalion, Me Patrick Maisonneuve, lâche une bombe. Il affirme que la boîte de communication n'a pas travaillé pour les conventions thématiques de l'UMP, mais pour la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy. Au lieu de facturer ses prestations au candidat, elle les a, selon lui, imputées à son parti. "À la demande de l'UMP", accuse l'avocat qui dénonce "un chantage économique" et "plus de 10 millions d'euros" de sommes litigieuses.
Ce que confirme sur BFM TV Jérôme Lavrilleux, à la fois ancien directeur de campagne adjoint de Nicolas Sarkozy et directeur de cabinet de Jean-François Copé. "Les dépenses ont explosé et ont été beaucoup plus importantes que le volume autorisé" par la loi, détaille-t-il au bord des larmes. Et d'évoquer "un dérapage", "un train qui filait à toute vitesse". "Faux", réplique le trésorier de campagne Philippe Briand. Il maintient que tout a été financé sur un budget de 21,4 millions d'euros.
Mais personne d'important "ne savait" ?
C'est en tout cas ce que martèle Jérôme Lavrilleux le 26 mai. Le bras droit du désormais ex-président de l'UMP, qui était le codirecteur de la campagne de Nicolas Sarkozy, répète qu'il a "tiré la sonnette d'alarme" mais pas auprès de ses deux supérieurs directs. "Je n'ai jamais vu les factures, les chèques, etc. Ce n'était pas dans ma fonction", martèle Jean-François Copé. Et Nicolas Sarkozy est "très mécontent de voir son nom cité dans affaire", glisse Brice Hortefeux. Lui-même s'excuse de mal prononcer le nom de Bygmalion : "Je ne la connais pas..." Et tous les élus UMP avancent "la présomption d'innocence" en ce qui concerne l'ancien président de la République.
Le même jour, des perquisitions ont eu lieu, notamment au siège de l'UMP et de la société Bygmalion. Les enquêteurs cherchent tout document permettant d'éclairer le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy, dont les comptes officiels ont été invalidés par la Commission nationale des comptes de campagne et du financement des partis politiques et rejetés en juillet 2013 par le Conseil constitutionnel.
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