: Entretien Cyclisme : "Honnêtement, je ne pige pas", regrette Emmanuel Hubert, qui n'a pas su séduire de nouveaux sponsors pour reprendre Arkéa-B&B Hotels
Quatrième au classement des équipes du dernier Tour de France, la formation Arkéa-B&B Hotels acte la fin de son existence après le retrait de ses deux sponsors et l'impossibilité d'en trouver de nouveaux.
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Il a tenté un ultime coup en sautant dans un train pour Paris, afin de passer un dernier appel à un éventuel mécène dans l'émission Tout Le Sport. Mais Emmanuel Hubert, patron de l'équipe Arkéa-B&B Hotels a bien été obligé d'acter la disparition de son équipe, auprès de ses salariés, mercredi 15 octobre. Il s'agissait de la date limite pour envoyer le dossier de licence pour la saison prochaine à l'Union Cycliste Internationale (UCI), ce que n'a pas été en mesure de faire la formation bretonne.
Après le retrait de ses deux sponsors, Emmanuel Hubert a tout tenté pour trouver des repreneurs, en vain, et ne comprend pas pourquoi aucune entreprise n'a été séduite pour investir dans son équipe, qui a connu ses deux meilleures saisons en 2024 et 2025.
Franceinfo:sport : La date limite de dépose des dossiers pour les licences UCI était ce 15 octobre, vous n'avez rien déposé, cela acte-t-il la disparition de votre équipe ?
Emmanuel Hubert : Il y a eu plusieurs actes. Il y a eu la sentence du 2 octobre où on ne pouvait pas fournir les fameuses garanties bancaires, qui doivent correspondre à 25% de la masse salariale totale annuelle comme gage de sûreté auprès de l'UCI. Et ensuite il y a ce 15 octobre, où il fallait fournir le dossier complet, avec la couleur du maillot, tous les contrats, et ça on ne le remplit pas non plus. Donc deuxième sentence et fin de la récréation.
Reste-t-il un mince espoir puisque la liste de l'UCI n'est pas complètement figée ?
Il y a un tout tout tout tout mince espoir. Il y a encore une petite lueur de lumière. Maintenant, c'est soit un mécène, soit un investisseur, soit un nom qui veut s'inscrire dans le cyclisme. Mais là par contre, je ne suis pas acteur, c'est à eux de venir vers moi.
Vous avez annoncé la fin de l'équipe à vos coureurs et au staff ce matin, comment cela s'est-il passé ?
Il n'y a jamais de bonne manière, ce n'est jamais agréable. Il faut savoir que 75% de l'effectif est en itinérance, il y a une vingtaine de personnes en Chine en ce moment, donc c'est compliqué de réunir tout le monde. On a un groupe WhatsApp commun. Malheureusement ils s'en doutaient, parce qu'on n'avait pas rempli la première condition le 2 octobre, et entre deux je n'avais pas beaucoup communiqué, je n'avais rien à dire, parce que je n'ai rien. Et aujourd'hui j'annonce à nouveau qu'il n'y a toujours rien. Donc là c'est le cri du cœur, l'appel à un bienfaiteur, à quelqu'un qui aime le vélo et qui a quelques dizaines de millions d'euros à dépenser.
Comment ont-il réagi ? Certains coureurs ont trouvé une porte de sortie, mais ce n'est pas le cas de tous et des membres du staff.
Le coureur, lui, est acteur, peut agir sur sa visibilité et sur ses résultats. Tout du moins il a l'occasion de le faire. Après, pour toutes les personnes au service-course à Rennes, c'est beaucoup plus compliqué d'être visible. Il y a des métiers comme les kinés, les médecins ou les ostéos qui peuvent se recaser dans des cabinets ou dans d'autres équipes, mais pour les personnes comme les assistants, masseurs, mécaniciens, ça devient compliqué de trouver un job. On n'est pas dans un sport où il y a beaucoup de changements en interne.
Vous étiez très attaché à l'identité bretonne de l'équipe, mais vous disiez cet été être prêt à la mettre de côté pour sauver l'équipe. Vous avez eu plusieurs pistes, pourquoi n'ont-elles pas abouti ?
C'est vrai que j'aime ma région, mais à un moment donné, je ne vais pas tomber dans l'idiotie. On se disait que si c'était pour sauver, on sauvera avec qui que ce soit, dans la limite du raisonnable. Mais ensuite, ça ne s'est pas fait, parce qu'il y a une conjoncture de merde, excusez-moi du mot, avec beaucoup d'anxiété chez les chefs d'entreprise. Ils ne savent pas forcément à quel pain ils vont être mangés. Et qu'est-ce que tu supprimes en premier dans une boîte ? C'est le marketing. Je pense qu'on était au mauvais moment, au mauvais endroit.
Finalement, quand on voit que votre équipe - quatrième au classement des équipes du Tour de France, septième du classement général avec Kévin Vauquelin, qui participe à tous les Tours de France depuis des années - n'est pas capable de se maintenir, qu'est-ce que cela dit de l'économie du cyclisme actuel ?
Je ne trouve pas ça joli, hyper dommage. Quatrième équipe du Tour de France, ça veut dire ce que ça veut dire. J'avoue ne pas comprendre comment nous ne pouvons pas être dans la séduction d'un partenaire. Honnêtement je ne pige pas. Ces résultats, ça veut dire qu'on a une équipe avec une âme, un savoir-faire, on n'est pas là par hasard, ça ne nous est pas tombé du ciel. On a un vrai capital sympathie au niveau du public et des médias. Et j'estime que l'on brise ce savoir-faire. Je respecte l'arrêt de mes partenaires, on sait quand un contrat s'arrête, ce n'est pas à eux que j'en veux, mais ce n'est pas normal qu'on n'en trouve pas d'autres. Et je pense que c'est tout simplement dû à cette conjoncture de merde, qui fait qu'on est moins bankable aujourd'hui.
Ce n'est pas forcément réjouissant pour les autres équipes françaises comme TotalEnergies, dont le sponsor arrêtera fin 2026 ?
Moi je reste d'une nature optimiste. La sentence au 15 octobre 2026 ne sera pas la même qu'au 15 octobre 2025. J'espère que nos politiques vont comprendre qu'il faut donner un peu de verdure, se battre pour la France et pas pour eux, comme aujourd'hui où il y a des egos surdimensionnés. Les entreprises sauront peut-être un peu plus là où elles vont.
Certains directeurs d'équipes comme Richard Plugge, de la Visma-Lease a Bike, ont réagi avec tristesse à la disparition de l'équipe, avez-vous reçu d'autres soutiens ?
Oui, je reçois beaucoup de soutien. Mais on est aussi dans un état d'esprit où si une équipe disparaît, ça laisse une place à l'autre. Il y a toujours eu un manque de solidarité assez pesant dans notre milieu. Mais que ce soit de la part des instances, des organisateurs, ASO, le président et le directeur du Tour de France, j'ai reçu beaucoup de soutien.
N'était-il pas envisageable de repartir avec une équipe sur un échelon inférieur ?
Alors ça, par contre, ce n'est pas fini. Il y a moyen encore d'ouvrir la porte sur un niveau inférieur, en Continental (le troisième échelon du cyclisme mondial). La seule chose, c'est qu'il y a beaucoup moins de visibilité. Ça coûte aussi de l'argent. C'est une autre philosophie. C'est un redémarrage. Mais bon, pourquoi pas ? En revanche, cela implique qu'il n'y aura pas d'équipe développement, puisque notre équipe développement actuelle est en Continental.
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