Un Rwandais sur le Tour de France d'ici 2040 ? "C’est possible" selon le sélectionneur de l’équipe nationale de cyclisme
Les Championnats du monde de cyclisme se déroulent actuellement au Rwanda. Une première en Afrique. Même si l'Erythrée reste encore la nation phare de la discipline, les cyclistes rwandais ne cessent de progresser, se félicite le sélectionneur de l’équipe nationale, le Français David Louvet.
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Quel coureur africain succèdera à l'Erythréen Biniam Girmay, le premier à remporter une étape sur un grand Tour (sur le Tour d'Italie en 2022 puis trois fois sur le Tour de France en 2024) ? Il sera peut-être originaire du Rwanda, théâtre des Championnats du monde sur route (21-28 septembre) à Kigali. Depuis novembre 2022, un Français, David Louvet, conduit les destinées de l'équipe nationale. Et il met en avant l'immense potentiel du Rwanda. "Des personnes qui feraient de bons coureurs, on en croise à tous les carrefours", explique -t-il. Il s'est confié à Radio France.
Franceinfo : Comment êtes-vous devenu sélectionneur du Rwanda, en 2022 ?
David Louvet : Le président de la Fédération rwandaise de cyclisme de l'époque souhaitait avoir un entraîneur européen. Il a discuté de cette possibilité avec le président de la Fédération française de cyclisme, Michel Coelho, qui en a fait part à la Direction technique nationale. On m'a proposé le poste et je me suis dit : pourquoi pas ? J'avais besoin d'un nouveau challenge et je le trouvais plutôt intéressant avec la perspective des Jeux olympiques.
Comment s'est déroulée votre arrivée ?
Ça n'a pas commencé dans les meilleures conditions car le jour où j'ai posé le pied à Kigali, les responsables fédéraux rwandais ont tous démissionné ! Donc les trois premiers mois sont un peu compliqués pour moi. Et puis, au fur et à mesure, j'ai trouvé ma place. J'ai aussi eu la chance d'être épaulé par mon adjoint Félix Sempoma qui m'a bien accueilli. On a ainsi pu travailler correctement et mettre en place des choses qui fonctionnent.
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Avez-vous pu bénéficier rapidement de moyens ?
Pas spécialement, en fait, car les personnes qui assuraient l'intérim découvraient tout. Ce n'était pas vraiment des experts, donc c'était un peu compliqué. Avoir des budgets, partir en course… Tout était un combat permanent. Heureusement, le ministère a bien compris mes attentes et m'a beaucoup aidé dans ma tâche.
Le développement du cyclisme au Rwanda est-il devenu une priorité ?
Oui. Le cyclisme au Rwanda, c'est un peu comme le marathon pour les Kenyans. Ici, la culture du vélo est omniprésente, au Rwanda comme en Érythrée. C'est le sport national. Ça court tous les week-ends et il y en a pour tout le monde, dès le plus jeune âge. Avec les Championnats du monde qui sont organisés ici, il fallait mettre les moyens pour répondre présents et ne pas être ridicules. Et relancer la dynamique du cyclisme rwandais qui a eu ses heures de gloire mais qui était en pente descendante par rapport à certaines nations africaines comme l'Érythrée. Je pense qu'on est en train de mettre les curseurs dans le bon sens. Mais aujourd'hui, ce qu'il manque, ce sont des compétitions. Quand mes coureurs prennent le départ, ils n'ont que trois courses dans les jambes depuis le Tour du Rwanda. Ce n'est pas suffisant pour être au niveau, même s'ils arrivent quand même à être dans le coup sur les contre-la-montre. Pour pallier le manque de compétition, il a fallu faire des stages avec des heures et des heures de vélo. Ils ont vraiment travaillé avec rigueur et des charges assez importantes. C'est là qu'on voit que les coureurs rwandais sont de sacrés combattants et qu'ils ont des prédispositions physiologiques et physiques hors normes.
"Au Rwanda, à tous les carrefours, on croise plein de gens qui pourraient faire de bons cyclistes."
David Louvetà franceinfo
Le talent est-il là ?
J'ai des souvenirs de personnes à vélo en claquettes, en jeans et en chemise, qui suivent l'équipe nationale dans un col, jusqu'au sommet. Parfois, je suis obligé de demander aux coureurs d'accélérer pour les distancer parce que ça peut être dangereux. Mais dans certains cas, on prend un numéro de téléphone si on remarque un potentiel. Mon adjoint Félix Sempoma a recruté pas mal de taxis-vélo comme Eric Manizabayo [porte-drapeau de la délégation rwandaise aux Jeux Olympiques de Paris 2024]. Ils sont vraiment forts. Après, ils doivent progresser dans la position sur le vélo. En transportant des gens ou des charges, ils ont tendance à courber un peu le dos au niveau des lombaires. Donc, il faut retravailler tout ça, et ce n'est pas simple.
Craignez-vous que l'engouement retombe après les championnats du monde ?
Après chaque grand objectif, il y a toujours un moment de relâche. J'espère qu'il ne va pas durer longtemps. J'aimerais que, dans la foulée, il y ait une course comme le championnat d'Afrique. Qu'il y ait un héritage et qu'on puisse profiter de tout l'entraînement réalisé afin de glaner des titres et des médailles.
Espérez-vous que certains coureurs se fassent repérer pour rejoindre des structures professionnelles en Europe par exemple ?
Ça fait partie de mon travail. Si j'entraîne des coureurs ici, ce n'est pas pour qu'ils restent au Rwanda. J'ai ciblé des coureurs et je pense qu'il y a des coureurs qui ne vont pas passer inaperçus. J'essaie de donner un petit coup de pouce car j'ai des jeunes qui ont des profils intéressants. Ce serait dommage de les laisser ici. Après, cela peut faire peur d'intégrer un Africain dans son équipe. Il faut mettre des choses en place pour être sûr qu'il n'ait pas envie de rentrer au bout de deux mois. Il y a parfois la barrière de la langue. Je le vois moi-même quand je suis dans la voiture pour donner des consignes. Si je n'ai pas Félix avec moi, c'est parfois compliqué, surtout dans les moments clés. Et puis, il y a l'éternel souci des visas qui ne sont jamais faciles à avoir. Parce qu'au niveau du vélo, il n'y a pas de souci. Ils apprennent vite.
Quid du matériel ?
Grâce aux Championnats du monde, il y a beaucoup de dotations. Pour l'équipe nationale, des marques m'ont soutenu. On a eu des prix préférentiels sur des vélos de contre-la-montre mais surtout sur des vélos de route. Aujourd'hui, j'ai 32 vélos neufs qui vont rester après mon départ. Le problème, c'est l'entretien et le manque de pièces détachées. Ces machines sont comme des Formule 1 : c'est de la haute technologie. Acquérir ici des pièces détachées pour ces vélos, ce n'est pas facile et ça coûte cher.
Peut-on imaginer un Rwandais gagner un jour le Tour de France ?
Avec leur profil de grimpeur, quand je vois les progrès faits en l'espace d'une semaine sur contre-la-montre, je me dis que rien n'est impossible. Après, gagner un Tour dans moins de dix ans, ça va être compliqué. Par contre, voir un Rwandais participer au Tour de France dans moins de quinze ans, c'est possible. Et pourquoi pas intégrer une équipe World Tour comme Biniam Girmay. Ils n'ont rien à envier aux coureurs d'Erythrée qui reste la nation phare en Afrique.
Etes-vous plutôt optimiste pour la suite ?
Je ne voudrais pas qu'on me laisse mes coureurs trop longtemps sans activité, sans compétition. Parce que ce sont des athlètes de haut niveau. Ils ont besoin de courses parce qu'en ne faisant que des entraînements, on rentre dans une routine et ce n'est pas intéressant.
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