La France a-t-elle raté la robotisation?
"Les robots vont-ils nous piquer nos boulots ?" se demande "l'Angle éco" du lundi 8 juin. Existe-t-il une "French touch" dans ce secteur ? Avec 32 000 exemplaires en service dans l'industrie, la France semble avoir laissé passer le train de la robotisation. Tour d'horizon des forces et faiblesses des robots français.
Lundi 8 juin, François Lenglet se demande : "Les robots vont-ils nous piquer nos boulots ?" Le 18 mai, alors qu’il lançait la deuxième phase du plan “Nouvelle France industrielle” le ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, a reconnu que la France avait “raté la robotisation”. Face à des pays précurseurs comme le Japon, la Corée du Sud ou encore l’Allemagne, où se situe la France en robotique ? Des robots industriels aux humanoïdes, tour d’horizon des forces et faiblesses de l’Hexagone.
"L’industrie du futur." C’est ainsi qu’Emmanuel Macron a récemment appelé la deuxième phase du plan “Nouvelle France industrielle”, lancé en 2013 par son prédécesseur Arnaud Montebourg. Le 18 mai dernier, le ministre de l’Économie a promis 3,4 milliards d’euros d’investissements publics supplémentaires, pour “robotiser, digitaliser” et ainsi “moderniser l’outil industriel” français.
Ce même jour, Emmanuel Macron reconnaissait dans un entretien à l’hebdomadaire Usine nouvelle que la France avait “raté la robotisation”. Avec quelque 32 000 robots industriels en activité en France, le pays a-t-il vraiment “raté” le tournant de la robotique ? L’Hexagone montre un retard certain dans l’industrie, mais la robotique de service française se développe. Dans certains secteurs, elle se démarque déjà à l’international.
Robotique industrielle : la France à la peine
Depuis deux ans, la robotique semble au cœur de la politique économique et industrielle du gouvernement. Arnaud Montebourg, alors ministre du Redressement productif, a lancé en mars 2013 le plan national pour la robotique, “France Robots Initiatives”. C’est dans ce cadre qu’est née “Robot Start PME”, une initiative visant à promouvoir l’installation de robots dans des PME françaises.
En effet, seuls 5 % des robots industriels français sont installés dans des entreprises de moins de 50 salariés. Le gouvernement s’est ainsi engagé à accompagner 250 PME dans l’achat d’un premier robot, finançant 10 % de cet investissement dans chaque entreprise. Jusqu’ici, près de 200 sociétés comme Technicarton, une PME située près de Lyon, ont franchi le pas. C’est également le cas de CFT Industrie, une usine de production d’articles métalliques soudés en Eure-et-Loir. L’arrivée d’un robot de soudage a été salutaire pour l’entreprise.
Après cette première étape, c’est le programme “Nouvelle France industrielle” qui est lancé en septembre 2013. Parmi ses 34 plans, un programme spécial pour la robotique, considéré par le gouvernement comme la potentielle “prochaine grande révolution industrielle”. L’État promet alors, en parallèle de l’aide à la robotisation des PME, “une plateforme technologique de robotique industrielle” ainsi que le fonds Robolution Capital – 80 millions d’euros pour le développement de sociétés de robotique.
Ces différents plans arrivent-ils trop tard ? En 2013, alors que le gouvernement lançait ces initiatives, la France ne détenait que 2,4 % des robots industriels utilisés dans le monde. À peine plus de 32 000 robots sur un total de plus d’un million, selon la Fédération internationale de la robotique. Cette même année, les ventes de robots industriels en France ont chuté de 27 % : seuls 2 200 ont été achetés par des entreprises françaises en un an.
En guise de comparaison, l’Allemagne compte cinq fois plus de robots industriels – plus de 167 000. Le Japon, avec 304 000 robots en utilisation, est dix fois plus robotisé que la France. La Chine, qui prend le tournant de la robotisation, a déjà quatre fois plus de robots industriels que nous. Alors que l’usine du monde devient le premier marché mondial de robots industriels, la France peine à rattraper son retard. L’Hexagone ne compte que 125 robots pour 10 000 salariés.
Pour Catherine Simon, présidente du salon de robotique Innorobo et experte du secteur, la France a manqué le tournant de la robotique industrielle il y a trente ou quarante ans. Conséquence : le pays aurait délocalisé davantage que l’Allemagne, qui a fait le choix de robotiser très tôt. La spécialiste le reconnaît néanmoins : le tissu industriel allemand est peut-être mieux adapté à l’utilisation de robots industriels, nos entreprises étant souvent plus petites.
Un savoir-faire français en robotique de service
L’excellence française ne serait donc pas dans la robotique industrielle. En revanche, dans la robotique de service, la France fait figure de leader mondial, estime Catherine Simon. Le pays est particulièrement réputé pour sa recherche dans ce secteur. Nous avons pas moins de 60 laboratoires spécialisés, dont certains sont connus dans le monde entier. Selon le plan “France Robots Initiatives”, “la France occupe le troisième rang mondial en matière de publications sur la robotique”, après les États-Unis et le Japon.
Le pays est particulièrement présent dans la robotique d’aide à l’autonomie des personnes, et dans la création de robots humanoïdes tels que Nao ou Pepper, développés par Aldebaran. La société de robotique, fondée en 2005, est aujourd’hui leader mondial dans ce secteur. Si bien que le groupe de télécommunications japonais Softbank, actionnaire majoritaire de l’entreprise depuis 2011, a récemment racheté 95 % de ses parts.
Mais la France est également à la pointe de la fabrication de drones, de robots médicaux ou d’exosquelettes, ces systèmes robotisés qui soutiennent le corps. Ces derniers peuvent être utilisés pour aider des personnes à marcher, ou les assister dans un effort physique important. Des entreprises comme Medtech, cotée en Bourse, ou RB3D sont leaders dans ces domaines.
Pourtant, si la robotique de service française est prometteuse, elle en est encore à ses balbutiements. “On manque de fonds d’amorçage pour faire démarrer et vivre les entreprises à leurs débuts, regrette Catherine Simon. Nos laboratoires de recherche robotique sont d’excellence mondiale, mais on a du mal à faire des ponts, à créer des entreprises.” En 2012, on comptait ainsi seulement 30 à 60 entreprises “dont l’activité principale est la conception ou la fabrication de robots de services” en France. Ces sociétés n’auraient créé pour l’instant que quelques centaines d’emplois, souvent très qualifiés. Les différents plans du gouvernement changeront-ils la donne ?
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