: Reportage "On ne vend pas de la drogue, on travaille !" : des travailleurs sans-papiers et des employeurs inquiets du durcissement des règles de régularisation
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a envoyé une nouvelle circulaire aux préfets, qui s'applique depuis vendredi. Les critères pour être régularisé deviennent plus stricts, ce qui indigne des travailleurs et pourrait mettre en péril certains secteurs.
/2025/01/24/maxstockworld333278-6793ca9db4b48096272425.jpg)
"La fin de la régularisation à tour de bras". Bruno Retailleau vient d'envoyer une circulaire aux préfets. L'objectif est de durcir les règles de régularisation des étrangers en situation régulière et de revenir sur la circulaire Valls en vigueur depuis 13 ans. Jusqu'ici, pour être admissible, un travailleur sans-papiers devait en théorie vivre en France depuis trois ans, le ministre de l'Intérieur voudrait faire passer cette durée à sept ans et installer de nouveaux critères, ce qui inquiète fortement plusieurs travailleurs et employeurs.
Mbakhar, un Sénégalais employé dans la restauration, exprime par exemple son indignation. "Je n'ai même pas les mots, admet-il. J'ai travaillé pendant quatre ans et demi, j'ai plus de 50 fiches de paie, je n'ai jamais eu d'OQTF (obligation de quitter le territoire français), ni de problèmes. Je paie mes impôts, comme cette année, j'ai payé plus de 3 000 euros d'impôts."
Si sa demande de titre de séjour actuellement en cours d'examen devant la préfecture du Val-de-Marne venait à être refusée, parce qu'il n'a pas atteint le seuil des sept ans voulu par Bruno Retailleau, il le vivrait comme une profonde injustice. "Vous savez, nous, on prend des risques en travaillant avec des faux papiers, c'est très dangereux, estime-t-il. Nous, on est là, on ne demande rien, on n'agresse pas les gens dans la rue. On ne vend pas de la drogue, on travaille. On veut travailler légalement pour être à l'aise, on ne demande que ça."
"Et c'est comme ça qu'on nous remercie, en durcissant les conditions de régularisation, alors qu'on bosse dans les métiers que les Français n'aiment pas ?"
Mbakhar, un Sénégalais employé dans la restaurationà franceinfo
La circulaire Retailleau intervient par ailleurs alors que selon de nombreux professionnels, les règles en vigueur étaient déjà très restrictives. "Il est passé commis, il était volontaire, il voulait apprendre", raconte Marie-Laure, restauratrice. Elle a été obligée de se séparer de son employé sénégalais il y a quelques mois après un contrôle de l'Urssaf, parce qu'il ne justifiait pas des conditions de deux ans de travail de la circulaire Valls. "On est restaurateurs dans le 93, et c'est un département qui souffre, parce qu'on a beaucoup de mal à recruter, et c'est pénalisant pour notre cas particulier." Elle juge donc les nouvelles règles encore plus pénalisantes.
L'espoir que le patronat "monte au créneau"
Banco Camara, fondatrice de la société Ici Admin, qui accompagne les entreprises qui cherchent à faire régulariser leurs travailleurs sans-papiers, tire la sonnette d'alarme. "J'espère que les organisations patronales vont monter au créneau auprès du gouvernement, parce que dans la restauration, le bâtiment, les services à la personne, ils n'ont pas l'effectif pour pouvoir mener au mieux leur activité", explique-t-elle.
"Il ne faudra pas se plaindre quand les restaurants commenceront à fermer."
Banco Camaraà franceinfo
En Île-de-France, les immigrés représentent ainsi 40% des employés de l'hôtellerie-restauration. Motif d'espoir pour ces personnes : le fait que la circulaire Retailleau n'ait pas la valeur juridique d'une loi, et que les préfets conservent une marge d'appréciation.
À regarder
-
Nouvelle-Calédonie : 50 détenus attaquent l'État en justice
-
La langue des signes est-elle en train de mourir ?
-
Un malade de Parkinson retrouve l'usage de ses jambes
-
Ils crient tous ensemble (et c'est ok)
-
Obligée de payer une pension à sa mère maltraitante
-
Maison Blanche : Donald Trump s'offre une salle de bal
-
Musée du Louvre : de nouvelles images du cambriolage
-
Traverser ou scroller, il faut choisir
-
Manuel Valls ne veut pas vivre avec des regrets
-
Nicolas Sarkozy : protégé par des policiers en prison
-
Piétons zombies : les dangers du téléphone
-
Tempête "Benjamin" : des annulations de trains en cascade
-
Femme séquestrée : enfermée 5 ans dans un garage
-
Vaccin anti-Covid et cancer, le retour des antivax
-
A 14 ans, il a créé son propre pays
-
Ils piratent Pronote et finissent en prison
-
Aéroports régionaux : argent public pour jets privés
-
Bali : des inondations liées au surtourisme
-
Cambriolage au Louvre : une nacelle au cœur de l'enquête
-
Alpinisme : exploit français dans l'Himalaya
-
Un objet percute un Boeing 737 et blesse un pilote
-
Cambriolage au Louvre : où en est l'enquête ?
-
Jean-Yves Le Drian défend l'image de la France
-
Chine : 16 000 drones dans le ciel, un nouveau record du monde
-
Donald Trump lance de (très) grands travaux à la Maison Blanche
-
Glissement de terrain : des appartements envahis par la boue
-
Emmanuel Macron sème la confusion sur la réforme des retraites
-
Tornade meurtrière : scènes d'apocalypse dans le Val-d'Oise
-
Nicolas Sarkozy : premier jour en prison
-
La lutte sans relâche contre les chauffards
Commentaires
Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.
Déjà un compte ? Se connecter