Massages, soins, spas... Le succès controversé des instituts de beauté ouverts aux enfants

Au début du mois de février, la Société française de dermatologie a alerté dans un communiqué sur les risques de ces nouvelles pratiques.

Article rédigé par franceinfo
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Des personnes en train de bénéficier d'un massage dans un institut de beauté. (DAREK SZUSTER / MAXPPP)
Des personnes en train de bénéficier d'un massage dans un institut de beauté. (DAREK SZUSTER / MAXPPP)

"Non, on ne fait pas les jambes, on ne fait que le haut du corps...", précise l'esthéticienne. Dans cet institut parisien, cette jeune fille de 11 ans vient de se faire masser. "Je suis toute huileuse", confie-t-elle au micro, dans un sourire. Juste après elle, c'est au tour de Laila, qui, du haut ses 8 ans a "hâte" de ce moment.

Massage, spa, manucure... Comme ici, depuis plusieurs mois, des salons esthétiques ouvrent leurs portes aux jeunes enfants partout en France. Dans la cabine d'à côté, sa grand-mère est aussi venue se faire masser. Elle voit d'un bon œil le fait de prendre soin de soi à cet âge : "C'est lui donner de bonnes règles de base. Voilà, prendre soin d'elle, faire attention à elle..."

Des soins au parfum chocolat

Cécile, qui tient ce salon, précise : "Depuis qu'on a ouvert l'institut, on a de plus en plus de demandes de soins. Beaucoup de mamans viennent et veulent partager ce moment avec leurs enfants". Le salon propose pour les enfants des soins pour le visage, le dos, les cheveux et même une pose de vernis. D'après Cécile, les produits sont testés dermatologiquement et adaptés à la peau sensible des enfants. "Je trouvais que c'était sympa d'éduquer les enfants dès le départ à choisir les bons produits", glisse-t-elle.

Mais d'autres instituts vont plus loin dans leurs offres, comme dans cet institut qui propose "toutes les formules massage, soin du visage, premier cours de maquillage... Tous les soins sont à partir de 3 ans". Selon cette professionnelle, des jeunes filles en préadolescence, âgées de 10 à 12 ans, viennent aussi se faire épiler, accompagnées de leurs parents. "Il y a le visage, les aisselles, la demi-jambe, la jambe complète, le maillot simple... Enfin, toutes les zones comme une adulte", précise l'institut. Pour 160 euros, votre enfant peut aussi faire une séance de balnéothérapie avec un enveloppement au chocolat et des soins visage, au parfum vanille ou fraise.

"Un enfant n'est pas un adulte en miniature"

"Le problème, ce sont les cosmétiques qui ressemblent à des produits alimentaires ou à des bonbons. Les enfants peuvent ingérer des produits qui ne sont pas destinés à être ingérés", estime Pierre Vabre, membre de la Société française de dermatologie.

Au début du mois de février, il a alerté dans un communiqué sur les dangers de ces nouvelles pratiques. "Les risques habituels des cosmétiques pour la peau comportent la sensibilisation allergique, les irritations non allergiques, et la photosensibilisation. Certaines substances à usage cosmétique appliquées sur la peau, les ongles ou les cheveux peuvent aussi avoir des conséquences néfastes sur d’autres organes par diffusion à travers la peau ou par l’ingestion de ces produits, chez l’enfant", rappelle le communiqué, rappelant que certains ingrédients cosmétiques sont soupçonnés d’être des perturbateurs endocriniens.

"En dehors de maladies dermatologiques, la peau de l’enfant est une peau qui n’est ni trop sèche, ni trop grasse, ni rouge, ni ridée, et qui ne nécessite rien d’autre pour son entretien courant qu’une toilette à l’eau avec un produit nettoyant doux, en rinçant et en séchant bien, afin de respecter la fonction barrière de la peau. Il n’y a aucune 'routine beauté' à conseiller chez l’enfant, en dépit de messages marketing largement diffusés", précise, par ailleurs le communiqué. Pierre Vabre interroge aussi les conséquences psychologiques : "Je pense qu'il faut quand même être vigilant. Un enfant n'est pas un adulte en miniature", tranche-t-il.

La Confédération nationale artisanale des instituts de beauté et spa affirme qu'il n'existe actuellement aucune réglementation spécifique pour encadrer ces pratiques.

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