"Confinement climatique", "confinement olympique"… cinq ans après, le confinement est devenu un thème récurrent de la désinformation

De nombreuses fausses informations ont annoncé des "confinements" ces dernières années, depuis que ce mot est entré dans nos vies en mars 2020 pendant la pandémie de Covid-19.

Article rédigé par Armêl Balogog
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Contrôle de police des parisiens dans la capitale lors du jour de confinement lié à l'épidémie de Covid-19, le 17 mars 2020. (LUC NOBOUT / MAXPPP)
Contrôle de police des parisiens dans la capitale lors du jour de confinement lié à l'épidémie de Covid-19, le 17 mars 2020. (LUC NOBOUT / MAXPPP)

Il y a cinq ans, le 17 mars 2020, les Français se retrouvaient confinés chez eux pour enrayer la propagation du Covid-19. Il a déjà été raconté à quel point le confinement a eu un rôle d'accélérateur pour la diffusion de fausses informations et de théories du complot notamment sur le virus, car les Français, inquiets et isolés, se sont retrouvés seuls face à leurs écrans et aux réseaux sociaux. Mais cinq ans plus tard, il apparaît aussi que le confinement est devenu, lui-même, un thème récurrent des fausses informations, voire des théories du complot.

Des confinements annoncés régulièrement

Cela a commencé déjà en 2020. Certains ont affirmé que le confinement avait permis au gouvernement d'étendre la 5G dans tout le pays, d'autres ont dit que le confinement était en fait semblable à un camp de concentration, voire un coup d'État pour calmer la gronde sociale qui commençait à se faire entendre. D'aucuns, complotistes convaincus, ont affirmé que le confinement avait été prévu par la Fondation Rockefeller et que c'était bien la preuve qu'une élite mondiale voudrait contrôler le monde.

Depuis, le confinement a été mis à toutes les sauces. Dès qu'il y a un grand événement ou une épidémie, les fausses informations sur un nouveau confinement à venir rejaillissent quasi-systématiquement. Ainsi, pendant l'été 2024, on a vu fleurir sur les réseaux sociaux des messages d'internautes affirmant que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) avait ordonné un confinement pour enrayer les contaminations au virus Mpox, aussi appelée "variole du singe". Pendant l'hiver 2023, d'autres alertaient déjà sur un futur "confinement olympique" pendant les Jeux de Paris. On a aussi vu passer des messages assurant qu'un "confinement climatique" était envisagé pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Plus récemment, des internautes pensent savoir qu'un confinement serait aussi au programme, en cas d'expansion de la guerre en Ukraine.

La crainte conspirationniste d'une "dictature mondiale"

Ces annonces fréquentes d'un confinement certain montrent à quel point le confinement de 2020 a été un traumatisme pour beaucoup de personnes qui le craignent à présent, sans forcément adhérer à toutes les fausses informations à ce sujet. Mais le confinement s'est aussi inscrit dans l'imaginaire complotiste comme une façon, pour une élite mondiale, de contrôler le peuple.

Contacté par franceinfo, Tristan Mendès France, maître de conférences à Paris spécialisé dans les cultures numériques, explique que le confinement fait partie d'une sémantique covido-complotistes qui a bien fonctionné en 2020, qui s'est installée et qui est souvent et facilement réactivée au gré des actualités. "Le terme confinement est assez fort dans ce qu'il active dans l'imaginaire complotiste, explique celui qui participe au podcast Complorama de franceinfo. On est sur une contrainte physique, on vient brider l'espace réel et, chose très importante, ça touche à l'intimité, ça va nous frapper dans ce qu'on a de plus intime. Cela fait écho à une sorte d'emprisonnement à domicile, une sorte de bracelet électronique à la cheville, mais sans la légitimité judiciaire, sans condamnation."

Le confinement, vécu comme un enfermement, est devenu une sorte de nouvelle clé de compréhension dans une grille de lecture du monde paranoïaque, qui craint l'installation d'une dictature mondiale. Cela vient renouveler la croyance vivace dans la sphère conspirationniste en une élite dite "mondialiste" qui voudrait nous soumettre et nous exploiter. Cette élite aurait inventé la pandémie pour installer cette dictature mondiale. Elle inventerait aussi le réchauffement climatique pour nous forcer à nous confiner et soi-disant réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le système militaro-industriel aurait même créé un conflit de toutes pièces en Ukraine.

Mais ces théories du complot, aussi vertigineuses et effrayantes qu'elles puissent être, permettent aussi à leurs adeptes de "donner du sens" à des actualités qui les dépassent, commente Tristan Mendès France. Il s'agit de "remplacer une incertitude par une inquiétude". "C'est plus énergisant de se dire qu'on sait d'où vient le mal. Ne pas savoir est parfois plus angoissant que savoir, même si on imagine des scénarios fous. Pointer un responsable du doigt donne un sens."

Commentaires

Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.