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Témoignages
Canicule en prison : des détenus dénoncent "une situation de misère", des directeurs pénitentiaires disent craindre "une augmentation des tensions"
Entre vétusté des bâtiments et cellules bondées, les détenus français souffrent de la chaleur et les directeurs de prison réclament des mesures pour limiter la surpopulation carcérale.
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Avec la canicule, les prisonniers suffoquent derrière les barreaux. En plus des vagues de chaleur, les prisons françaises sont confrontées à une surpopulation record : quelque 84 000 détenus pour 62 000 places, selon les chiffres de juin 2025. Une situation telle que même les directeurs de prison s'alarment.
"C'est une merde internationale", lâche un détenu incarcéré en Île-de-France, joint au téléphone. Il dénonce la vétusté des cellules, également surpeuplées et jonchées de matelas au sol. Dans son établissement, le taux d'occupation approche les 200%. Forcément, l'atmosphère est étouffante. "Quand t'es allongé sur ton lit, t'es trempé. Ils sont sans pitié. C'est hallucinant. Je n'ai même pas les mots", explose-t-il.
"On fait le moins de mouvements possible"
Lui fustige surtout les idées reçues qui circulent à propos des prisons : "Tout le monde dit qu'on est bien en prison. Vous êtes dehors et vous pétez les plombs parce qu'il fait trop chaud. Nous, on est dans 7 m2 à trois dans une cellule avec un matelas au sol".
Au centre pénitentiaire de Réau, également en Île-de-France, la situation est tout aussi critique. Les fenêtres sont même condamnées, empêchant tout courant d'air de rafraîchir l'atmosphère. "Les poignées sont retirées", raconte un autre détenu. Les surveillants "se sont dit qu'il y avait du trafic. Ils se sont trouvé une bonne excuse. Un jour, ça a été fermé. Point".
Le détenu poursuit : "Le système D, ce sont des bouteilles froides. On a une cuisine en commun, on va prendre l'eau qui est plus froide que dans les cellules et on va l'utiliser pour se refroidir les jambes, se doucher, se rincer à tour de rôle. On fait le moins de mouvements possible". "On est pratiquement à poil dans les coursives, ajoute-t-il. On n'en peut plus."
"Comme il n'y a pas d'air qui circule, c'est vraiment étouffant. Il y a eu des malaises dans les coursives, c'est comme un hammam, c'est plutôt une chaleur humide."
Un détenu de la prison de Réauà franceinfo
Pour lui, "il ne faut pas être surpris de la montée de colère de pas mal de détenus". Ce que traversent les détenus français en ce début d'été s'apparente à "une situation de misère et d'humiliation humaine". Avant de raccrocher, il explose de rire quand on lui demande s'il a chaud : "Je suis en sueur et le téléphone dégouline", répond-il simplement.
À la prison de Réau le service cantine propose en prévention canicule un ventilateur à 26 euros et un pack d'eau à 2,88 euros. Mais selon les prisonniers interrogés, beaucoup n'ont pas les moyens de se les payer.
Limiter la surpopulation carcérale
Les directeurs de prison eux-mêmes parlent d'un point de rupture. Dans une note interne très récente adressée aux magistrats, le directeur interrégional des services pénitentiaires de Toulouse dénonce des conditions indignes à l'intérieur des prisons et prévient qu’il ne pourra bientôt plus incarcérer de nouveaux détenus.
Sur l'ensemble du territoire, les maisons d’arrêt sont dans le rouge, s'alarme le secrétaire général du syndicat national des directeurs pénitentiaires CFDT, Jean-François Fogliarino. Il détaille : "Du fait de la canicule, plus particulièrement cette semaine, et des conditions de détention devenues vraiment impossibles et indignes, nous, directeurs pénitentiaires, craignons une augmentation des tensions, ne serait-ce que sur l'approvisionnement des détenus en nourriture, aussi sur la possibilité de leur octroyer des douches pour lutter contre la canicule".
"Bientôt, nous atteindrons les 6 000 matelas au sol dans les prisons françaises."
Jean-François Fogliarino, secrétaire général du SNDP-CFDTà franceinfo
En plus de "l'augmentation des tensions et donc des violences" à cause de la canicule, Jean-François Fogliarino alerte sur un autre marqueur qui lui est permanent : la surpopulation carcérale. Contre ce phénomène, les directeurs de prisons ont fait des propositions en urgence au ministre de la justice, à appliquer dès cet été,comme des remises de peines exceptionnelles pour bonne conduite ou des sorties anticipées sur les dernières semaines de la détention, comme ce qui s'était fait pendant le Covid.
En début de semaine le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a annoncé réfléchir à utiliser des Ehpad fermés pour y mettre des détenus en surnombre. Le garde des Sceaux a aussi détaillé les 17 sites qui recevront dans les 18 prochains mois des prisons en préfabriqué pour accueillir des détenus condamnés à des peines courtes.
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