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Édito
Mort de Jacques Delors : son refus de se présenter à la présidentielle a aussi été guidé par la crainte de ne pas disposer de majorité
Jacques Delors, figure de la construction européenne, avait douché les espoirs de la gauche en refusant de se présenter à l'élection présidentielle de 1995 alors qu'il était le grand favori des sondages. Il redoutait d’être empêché de gouverner.
Jacques Delors, décédé mercredi 27 décembre à l'âge de 98 ans est connu pour être l'un des architectes de l'Europe, il restera aussi comme celui qui a refusé de se présenter à la présidentielle de 1995. C’est un moment qui a marqué les esprits. Le dimanche 11 décembre 1994, 13 millions de téléspectateurs regardent 7 sur 7 sur TF1. Suspense total. Anne Sinclair, la présentatrice vedette de cette émission phare, lui repose la question à laquelle il n’a pas répondu en début d’émission. Et Jacques Delors va lire sa réponse face caméra : "J’ai décidé de ne pas être candidat à la présidence de la République." C’est le choc !
Celui qui est encore pour un mois président de la Commission européenne, après dix années passées à Bruxelles, refuse donc la bataille de la succession aux 14 années de règne de François Mitterrand, dont il a pourtant été le ministre de l’Économie et des Finances en 1981, en pleine euphorie après le triomphe de la gauche. Personne ne comprend sa décision. Il y a des raisons personnelles, il invoque son âge, bientôt 70 ans. Jacques Delors explique au fond qu’il n’organise pas sa vie en fonction d’une carrière à réaliser ou de postes à conquérir. Ce qui est rarissime, pour ne pas dire antinomique à la vie politique.
Mais avait-il l’ambition chevillée au corps ? Président de la Ve République, ce n’est pas un poste, c’est un graal, un destin français et ça ne se refuse pas. Personne ne renonce à une présidentielle en situation de la remporter. Nous avons plutôt affaire à des kyrielles de prétendants qui se voient tous un jour à l’Élysée mais n’auront aucune chance d’y parvenir.
Il ne voulait pas vivre à son tour la cohabitation
Son choix a également été dicté par des considérations politiques. Jacques Delors a eu cette formule magique, marque d’une certaine forme de réalisme de sa part : "Les déceptions de demain seraient pires que les regrets d’aujourd’hui." Le non-candidat avait compris une chose. Il n’était pas assuré de disposer d’une majorité à l'Assemblée nationale lors des futures législatives. Il redoutait d’être empêché de gouverner et disait ne pas vouloir "donner d'illusions aux Français." Cela ne vous rappelle rien ? Ce quelque chose d’infernal que nous vivons depuis 18 mois. Il faut dire que depuis Bruxelles, il avait observé les deux cohabitations subies par François Mitterrand, avec Jacques Chirac puis Édouard Balladur. Il ne voulait pas vivre à son tour cette funeste expérience.
Jacques Delors, au fond, laissera le souvenir d’un parcours atypique. Pour ne pas dire déroutant. Démarré en 1969 à Matignon à droite chez Jacques Chaban-Delmas, pour qui il a corédigé le projet de Nouvelle société, ministre chrétien de gauche de François Mitterrand, qui le poussera avec le chancelier Helmut Kohl à la présidence de la Commission. Il laissera le souvenir d’un grand bâtisseur d’Europe, peu enclin à la solitude et la dureté du pouvoir, ou à la confrontation directe avec le peuple français.
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