"Complément d'enquête". PFAS : la grande intox de l'industrie

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Article rédigé par France 2
France Télévisions

Le magazine dévoile une enquête collaborative sur le coût de la décontamination du continent européen par les "polluants éternels", et sur les campagnes d'influence de certains industriels pour éviter leur interdiction.

Ce sont des molécules chimiques auxquelles les industriels sont devenus accros, qui rendent les poêles antiadhésives, les tissus imperméables. On les retrouve aussi parfois dans les produits cosmétiques et dans les emballages alimentaires des sandwichs. Leur nom : les PFAS. Il en existe près de 10 000. Au fil des années, certaines sont reconnues comme cancérogènes. Le PFOA, une substance utilisée pendant des décennies par les géants de la chimie, a été interdit en France en 2020. 

En collaboration avec 46 journalistes européens du Forever Lobbying Project, les équipes de "Complément d’enquête" ont investigué sur les stratégies des industriels pour défendre ces substances alors qu’à l’Assemblée nationale et aux autorités européennes, des projets d’interdiction des PFAS sont en discussion. "Complément d’enquête" révèle comment certains industriels sont parvenus à convaincre les élus et gouvernants que certaines de ces substances seraient sans risque. 

Aux Etats-Unis, les géants de la chimie connaissent la dangerosité de certains PFAS depuis des décennies mais ils l’ont longtemps dissimulée. Que savaient les industriels français, comme Tefal ou Arkema, de leur dangerosité ? 

A Rumilly, des boues contaminées enfouies par Tefal

A Rumilly, en Haute-Savoie, Tefal, la marque française emblématique qui produit les célèbres poêles antiadhésives, a toujours affirmé avoir arrêté d’utiliser du PFOA en 2012, près de dix ans avant que la loi ne l’y oblige. Mais quelle est la responsabilité de l’industriel dans la pollution autour de l’usine avant cet arrêt ?

Documents confidentiels à l’appui, "Complément d’enquête" révèle comment l’environnement autour de l’usine Tefal a été contaminé par les PFAS. L’industriel a-t-il pris toutes les mesures pour garantir la sécurité de ses employés qui travaillaient au contact de la molécule ? Tefal assure avoir toujours tout mis en œuvre pour protéger la santé de ses salariés et pointe l’éventuelle responsabilité d’autres industries environnantes dans la pollution aux PFAS qui touche la région.

Arkema informé dès les années 2000 de la dangerosité de certains PFAS

Les journalistes de "Complément d’enquête" se sont également intéressés à Arkema, leader de la chimie française, et à son site de Pierre-Bénite, au sud de Lyon. Selon des documents confidentiels que "Complément d’enquête" s’est procuré, Arkema est informé dès les années 2000 par ses homologues américains de la dangerosité de certains PFAS, et des risques de contamination des populations autour des sites de production.

En France, les habitants des communes du sud de Lyon devront attendre que les médias s’emparent du sujet deux décennies plus tard pour être informés. Arkema affirme avoir toujours respecté les réglementations en vigueur.

Le coût faramineux de la dépollution

Qui doit aujourd'hui payer la dépollution ? Entre industriels et collectivités, de nombreuses batailles juridiques s’engagent. Se débarrasser de ces polluants éternels est un enjeu sanitaire mais aussi financier. Pour estimer le coût de cette dépollution pour l’Europe, le Forever Pollution Project a compilé des milliers de données scientifiques et économiques. Le chiffre est vertigineux : 100 milliards d’euros par an, plus de la moitié du budget annuel de l’Union européenne.

Une enquête d’Emilie Rosso, Pierre-Stephane Fort et Marielle Krouk / Studio Fact.
En collaboration avec le Forever Lobbying Project.

Dans les fauteuils rouges : Stanislas de Gramont, directeur général du groupe SEB.

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Parmi nos sources

"L’enquête collaborative ‘Forever Lobbying Project’, coordonnée par Le Monde, implique 46 journalistes et 29 partenaires médias dans 16 pays : la RTBF (Belgique) ; Denik Referendum (République tchèque) ; Investigative Reporting Denmark (Danemark) ; Yle (Finlande) ; Complément d’enquête - France Télévisions (France) ; MIT Technology Review Germany, NDR, WDR et Süddeutsche Zeitung (Allemagne) ; Reporters United (Grèce) ; L’Espresso, Radar Magazine, Facta.eu et La Via libera(Italie) ; Investico, De Groene Amsterdammer et Het Financieele Dagblad (Pays-Bas) ; Klassekampen (Norvège) ; Ostro (Slovénie) ; DATADISTA/elDiario.es (Espagne) ; Sveriges Radio et Dagens ETC (Suède) ; SRF (Suisse) ; The Black Sea(Turquie) ; Watershed Investigations/The Guardian (Royaume-Uni), avec un partenariat éditorial avec Arena for Journalism in Europe, et en collaboration avec Corporate Europe Observatory, une organisation sentinelle de l’activité des lobbys à Bruxelles.

L’enquête s’appuie sur plus de 14 000 documents inédits sur les « polluants éternels », issus notamment de 184 demandes d’accès à l’information, dont 66 effectuées et partagées par Corporate Europe Observatory.

L’enquête a été accompagnée par un groupe d’experts de dix-huit chercheurs et juristes internationaux. Le projet a reçu le soutien financier du Pulitzer Center, de la Broad Reach Foundation, de Journalismfund Europe et d’IJ4EU. Il existe un site consacré au projet : foreverpollution.eu."

L'équipe a décidé de contribuer au développement des connaissances sur les PFAS au-delà de l'enquête, en partageant tous les documents obtenus dans les 16 pays partenaires avec deux bases de données basées aux États-Unis, l'Industry Documents Library de l'université de Californie à San Francisco (où se trouvent les célèbres "Tobacco Papers") et Toxic Docs (Columbia University, New York, et City University of New York).

Ces documents sont accessibles à tous désormais : le public, les chercheurs, les régulateurs, les gouvernements, les organisations de la société civile et les autres journalistes.

Par ailleurs, au niveau de Rumilly, certains des documents que nous avons obtenus ont ensuite été publiés sur le site internet des pouvoirs publics locaux.

Liste non exhaustive.

Le Forever Lobbying Project, coordonné par Le Monde, a impliqué 46 journalistes et 29 médias partenaires de 16 pays différents, en partenariat avec l'Arena for Journalism in Europe, et en collaboration avec le Corporate Europe Observatory. Basé sur plus de 14 000 documents inédits concernant les "polluants éternels" également appelés PFAS,  le travail a inclus le dépôt de 184 demandes d'accès à l'information, dont 66 ont été partagées avec l'équipe du Corporate Europe Observatory. Epaulé par un groupe d'experts composé de 18 universitaires et avocats internationaux, le projet a reçu un soutien financier du Pulitzer Center, de la Broad Reach Foundation, de Journalismfund Europe et d'IJ4EU.

> Les replays des magazines d'info de France Télévisions sont disponibles sur le site de Franceinfo, rubrique "Les émissions".


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