: Reportage Dans les Ardennes, plusieurs communes privées d’eau potable à cause des polluants éternels
Les équipes de France Télévisions ont suivi le quotidien d'une famille de quatre enfants, à Villy, qui vit intégralement avec des packs d'eau en bouteille.
Ce texte correspond à une partie de la retranscription du reportage ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.
Pour une mère de quatre enfants, c'est une nouvelle contrainte de taille. À chaque fois qu'elle fait ses courses, elle achète des packs d'eau, six ce jour-là, pour être sûre de ne jamais en manquer dans la semaine. Car depuis trois mois, à Villy où vit la famille, l'eau du robinet est polluée, interdiction de la boire. "C'est un coup, c'est une gestion logistique. Il faut un peu de place pour stocker. Quand on l'a, on a de la chance. Et c'est du tri", indique Honorine de Rubeis.
Sans eau potable, il a fallu changer toutes les habitudes du quotidien, comme laver ses légumes, faire cuire les pâtes, des tâches simples devenues plus laborieuses aujourd'hui. "C'est un peu absurde de ne pas pouvoir ouvrir son robinet et remplir sa casserole d'eau pour faire des pâtes. Pour la santé de mes enfants, je préfère utiliser de l'eau en bouteille", explique la mère de famille.
Contamination au Pfas
Pas d'autre choix pour l'instant que de vivre entourés de bouteilles en plastique. Comme Honorine de Rubeis et ses enfants, 2 000 personnes sont privées d'eau potable dans cinq communes du secteur car elle est contaminée aux Pfas, ces produits chimiques de synthèse très persistants appelés polluants éternels. À Villy, leur taux est monté jusqu'à 2,73 microgrammes par litre, soit 27 fois la norme.
Comment l'expliquer ? Aucune certitude, mais une hypothèse pour l'Agence régionale de santé : les PFAS proviendrait de boues industrielles générées par une papeterie à proximité, aujourd'hui fermée. Des boues épandues sur les terres agricoles pour les fertiliser, polluant ainsi les nappes phréatiques.
En attendant de nouvelles analyses, c'est le maire qui prend en charge les bouteilles d'eau. Il rembourse les habitants. Mais à hauteur de 2 litres par personne chaque jour, la facture est salée. "45 000 euros de remboursement d'eau. On va être dans le rouge. On ne sera pas bénéficiaires et on sera obligé d'augmenter l'eau pour les particuliers", calcule Richard Philbiche, maire (SE) de Villy. De l'eau non potable et qui coûtera pourtant plus cher à l'avenir aux habitants, une double peine.
Et pour les commerçants, aucune prise en charge des bouteilles d'eau. Comme une gérante du bar-tabac d’une commune voisine également touchée par le Pfas. "J'en utilise à peu près quatre bouteilles par jour", partage Sidonie Nénon, gérante de bar.
Raccorder le réseau d'eau à des captages non contaminés
Difficile de trouver une issue à cette pollution massive. Dans les communes rurales, le casse-tête a commencé pour tenter de raccorder le réseau d'eau à des captages non contaminés. Coût estimé d’une interconnexion : 500 000 euros. Le maire l'assure, il ne pourra pas s'en sortir tout seul. Il réclame des financements de l'État. "Il faut aussi que les pouvoirs publics prennent leurs responsabilités parce que ça serait dû à des plans d'épandage. Est-ce que ces plans d'épandage ont été respectés ? Est-ce qu'ils ont été contrôlés ? Il faut une enquête pour établir la véracité des faits", lance Frédéric Latour, maire (SE) d’Haraucourt. Les habitants devront s'armer de patience. Le retour à la normale n'est pas prévu avant au moins plusieurs mois.
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