Reportage "C'est inédit de condamner un ancien président à une peine aussi lourde" : après la condamnation de Nicolas Sarkozy, des étudiants en droit s'interrogent sur la profession

Alors que l'ex-président a été condamné à cinq ans de prison dans l'affaire du fonds libyen, à l'université Paris-Panthéon-Assas, certains étudiants en droit sont choqués par une telle décision, quand d'autres s'inquiètent de la défiance qui entoure leur future profession.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Maillet de justice avec des dossiers et un Code pénal ouvert. (MAXPPP)
Maillet de justice avec des dossiers et un Code pénal ouvert. (MAXPPP)

Pour la première fois de l'histoire de la République, un ex-chef d'État sera envoyé derrière les barreaux.
Nicolas Sarkozy a été condamné à cinq ans de prison ferme, jeudi 25 septembre, dans l'affaire du financement illégal de sa campagne électorale avec des fonds libyens. Sa condamnation et sa cinglante remise en cause du système judiciaire à la sortie du tribunal pourraient bien devenir de véritables cas d'école dans les facultés de droit.

Devant la grille de l'université Panthéon-Assas à Paris, Ange, étudiant en droit, a encore du mal à croire que Nicolas Sarkozy dormira bientôt en prison. "C'est inédit de condamner un ancien président à une peine aussi lourde et à de la prison ferme. Je trouve ça assez choquant", assène le jeune homme. Au-delà de cette condamnation, la charge virulente de l'ancien président contre les juges ne manque pas de faire réagir dans son groupe de première année.

"C'était vraiment un procès contre la droite"

"Bien sûr, si un personnage politique fait une erreur, il doit être condamné", poursuit Ange. "Mais là, un ancien président, je trouve que c'est quand même un manque de respect pour la fonction et pour les Français." Aliénor hausse les sourcils et l'interrompt : "Ce n'est pas parce que c'est un ancien président qu'il doit être jugé différemment". "Mais le problème, c'est qu'il a été jugé différemment", la coupe à son tour Ange.

Emma était à peine née quand Nicolas Sarkozy a été élu en 2007, mais elle dit comprendre la colère de l'ancien chef d'Etat. "Pour moi, la justice est quand même un peu orientée. Ils savent que ça va affecter son image. En fait, c'était vraiment un procès contre la droite", estime-t-elle. Romy intervient : "En France, on a quand même la séparation des pouvoirs qui fait que la justice ne doit pas être influencée par le parlement ou par le gouvernement".

"Donc cette séparation des pouvoirs, elle permet quand même de faire en sorte que la justice soit neutre dans ses décisions et pas influencée par la politique."

Romy, étudiante en droit

à franceinfo

"Après, forcément, l'engouement qu'il y a eu autour du procès, que ce soit avec les personnalités politiques qui ont réagi, avec les médias et tout, ça a 'diabolisé' la décision de la justice", analyse la jeune femme.

"Décrédibiliser" la justice

Adrien silencieux jusque-là prend la parole à son tour. "Il y a une séparation des pouvoirs effective en France, mais elle n'est pas tout le temps respectée", avance-t-il. Il développe : "Prenons l'exemple du procès de Marine Le Pen qui montre que la séparation des pouvoirs est théorique".

Aliénor insiste, pour elle "ce sont des personnalités publiques, politiques qui vont accuser la justice de faire des choses qu'elle ne fait pas, donc la décrédibiliser auprès du peuple. Je ne trouve vraiment pas ça normal". Emma, en deuxième année de Master, va plus loin : "On connaît le manque de confiance que les gens ont déjà aujourd'hui en la justice et ce n'est peut-être pas très intelligent d'inciter les personnes à aller dans cette mouvance-là".

Même ligne pour Hajar, une étudiante de troisième année de droit ,qui se dit "choquée par les attaques à l'égard des juges". Elle souhaiterait devenir magistrate et estime que la confiance des justiciables sera au cœur de son futur métier.

Commentaires

Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.