"Je n'ai jamais ressenti une telle colère lors d'une rentrée", affirme Fabien Roussel, secrétaire national du PCF

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Article rédigé par France 2 - Édité par l'agence 6Medias
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Invité des "4V" jeudi 11 septembre, Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste français, revient sur le bilan du mouvement "Bloquons tout" et sur l'arrivée à Matignon de Sébastien Lecornu, dont il espère qu'il prendra des mesures fortes pour rétablir un peu de justice sociale.

Après deux jours d'actualité intense, marqués par la nomination à Matignon de Sébastien Lecornu et par le mouvement "Bloquons tout" du mercredi 10 septembre, Gilles Bornstein reçoit dans les "4V" Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste français, afin d'évoquer la colère sociale et les actions menées la veille par les manifestants, dans une rentrée politique sous tension.

Ce texte correspond à une partie de la retranscription de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.


Gilles Bornstein : Près de 200 000 manifestants étaient dans la rue hier pour la journée "Bloquons tout", un bilan en demi-teinte ?

Fabien Roussel : Plus de 200 000 manifestants, c'est quand même beaucoup plus que ce que le gouvernement avait annoncé. Plus de 1 000 grèves recensées dans des entreprises. C'est donc un mouvement de fond. Et cela montre la colère immense qu'il y a dans le pays aujourd'hui. Je vous avoue que je n'ai jamais ressenti une telle colère lors d'une rentrée. Parce que les Français, d'abord, en ont marre que ce soient toujours les mêmes qui fassent des efforts : eux, les salariés, les retraités, les boomers, qui ont été pointés du doigt. Et ils en ont marre aussi que ce soient toujours les mêmes qui soient protégés : les plus riches, les millionnaires, les milliardaires, les grandes multinationales qui ont vu leurs impôts baisser, qui ont vu l'ISF supprimé. Ils disent : c'est plus possible, il va falloir que les cigares changent de bouche.

L'appel de Jean-Luc Mélenchon à se joindre au mouvement, ça a aidé ou ça a gêné le mouvement selon vous ?

Ça a été aussi un cirque médiatique où tout le monde s'est amusé à dire que c'était le mouvement de La France insoumise. Moi, ce que j'ai vu dans les manifestations hier, c'est qu'il y avait beaucoup de syndicats présents, de militants syndicaux, d'associations et des militants politiques de toutes les forces de gauche. Moi-même, j'ai invité à ce que l'on y participe et à ce que cette journée du 10 soit une journée de mobilisation. Et que la prochaine journée de mobilisation, ce soit celle du 18 septembre prochain, à l'appel de toutes les organisations syndicales, avec des mots d'ordre clairs, là, pour le coup, qui sont les salaires, le pouvoir d'achat, l'emploi, les services publics. Nous sommes dans une période où il faut que le peuple s'en mêle. Pour que ça change, il va falloir que les Français s'en mêlent fortement.

Le 18, vous souhaitez une France bloquée ?

Je souhaite surtout que les Français participent activement à exprimer leur colère, mais aussi leurs attentes. Alors, le blocage, c'est un mot. Mais quand une usine ne tourne plus pendant une journée, d'abord, c'est un jour de grève, c'est une journée de salaire.

Vous ne voulez pas utiliser le mot, mais vous voulez une France à l'arrêt.

Mais bien sûr. Parce qu'entre "à l'arrêt" et "bloquée", c'est la même chose. C'est le moyen, malheureusement, je dirais, pour se faire entendre. Vous imaginez le désarroi de nos concitoyens, des jeunes, des retraités ? Comment on se fait entendre et respecter ? Le Parlement n'est pas respecté. On a manifesté pendant des semaines contre la réforme des retraites, elle a été imposée brutalement. Comment se fait-on entendre dans le pays ? Et donc, je dirais, malheureusement, il faut passer par là. Sauf si d'ici là, le Premier ministre décidait de réorienter complètement la politique du pays et de répondre aux attentes des Français.

Lors de la passation de pouvoir hier à Matignon, le Premier ministre a dit : "Il va falloir des ruptures, et pas que sur la forme, pas que dans la méthode. Des ruptures aussi sur le fond". Est-ce que c'est une bonne nouvelle ? Et surtout, la rupture, vous l'évaluez à combien de milliards d'euros ?

D'abord, déjà, les mots sont importants. Moi, je lui ai dit qu'il y avait besoin de rupture. Je suis content. Il réemploie le mot. Je lui ai dit qu'il fallait des ruptures et que, sans rupture, nous ne pourrions à aucun moment éviter de le censurer.

Il a donc fait du Roussel dans le texte.

Ça me ferait trop d'honneur. Mais en tout cas, je lui ai demandé d'écouter ce que disent les Français. Les Français veulent un changement, un changement profond, et donc on ne s'accommodera pas de discours. Combien ça coûte ? Eh bien, moi, je lui ai demandé quatre mesures. Ça va vite. Premièrement, enlever toutes les mesures toxiques du budget Bayrou, les deux jours fériés, les franchises médicales... Ensuite, un signal sur les salaires et les pensions. Nous demandons plus de 100 euros. Il n'est pas obligé d'aller jusque-là, mais entre zéro et rien, il y a un chemin. Qu'il baisse la CSG sur les salaires et les pensions, comme d'ailleurs nous le demandons à gauche, ça peut se faire rapidement. Troisièmement, l'abrogation de la réforme des retraites. Et, enfin, de la justice fiscale. Il est temps aujourd'hui de demander aux plus fortunés, aux milliardaires, au capital de participer au redressement des finances publiques.

Pardonnez-moi d'être prosaïque, mais c'est combien ? Une taxe qui rapporterait 10 milliards d'euros, vous prenez ?

Tout le débat que nous aurons, ce qui est sûr, c'est que si c'est pour nous proposer des clopinettes et aller leur prendre deux-trois centimes, ce n'est pas la peine. Les 500 plus grandes fortunes de France, c'est 1 200 milliards d'euros. La taxe Zucman, c'est 2% sur les patrimoines de plus de 100 millions. Enfin, vous imaginez, c'est 2% pour ceux qui ont plus de 100 millions ! Ça concerne à peine 2 000 familles.

Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.

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