"C'est la seule chose qu'on n'a pas essayée" : pourquoi un Premier ministre de gauche pourrait éviter une censure
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Le Parti socialiste réclame une cohabitation à Emmanuel Macron afin d'écarter le scénario d'une nouvelle dissolution. Mais pour cela, la gauche devrait compter sur la clémence des députés macronistes.
Une nouvelle dissolution ou une cohabitation avec la gauche ? Et si Emmanuel Macron n'avait pas d'autres choix en cas d'échec de Sébastien Lecornu dans les "ultimes négociations" lancées trouver une coalition gouvernementale ? Dans un communiqué publié lundi soir, à l'instar du Parti communiste, le PS a demandé "la nomination d'un Premier ministre issu de la gauche ou des écologistes". Les dirigeants socialistes porteront à nouveau ce message mercredi 8 octobre à l'occasion d'une rencontre avec Sébastien Lecornu. Jusqu'ici, Emmanuel Macron a toujours balayé cette hypothèse, considérant qu'un gouvernement de gauche sera renversé immédiatement.
Pourquoi le scénario serait-il différent aujourd'hui ? "Je ne sais pas si cela peut fonctionner mais incontestablement, cela permettrait à [Emmanuel] Macron – mais aussi à tout le monde, à part le RN et LFI – de dire que tout a été essayé", analyse une figure de la gauche. Le Rassemblement national a prévenu qu'il censurerait tout futur gouvernement et le président des Républicains, Bruno Retailleau, a répété plusieurs fois qu'il ne souhaitait pas un Premier ministre de gauche. Pour se maintenir, un Premier ministre de gauche devrait compter sur la neutralité des députés macronistes.
"Gabriel Attal a beaucoup bougé"
La gauche estime que les esprits sont mûrs pour obtenir une non-censure. "Je ne suis pas convaincu que Renaissance, dans le climat actuel, censurerait par principe un gouvernement de gauche. Ils n'ont pas intérêt à une dissolution", juge Ian Brossat, porte-parole du Parti communiste. Car des sondages effectués début septembre montraient que les candidats Renaissance souffriraient en cas de nouvelles législatives. "Gabriel Attal est sorti de la tutelle d'Emmanuel Macron. Le président s'arc-boutait sur la défense de son bilan. Là, ses députés sont prêts pour une forme de rupture au nom de l'intérêt général", abonde Rémi Branco, porte-parole du PS.
Pour preuve, alors qu'ils étaient tous les deux invités du journal de 20 heures sur TF1, Gabriel Attal a pris soin d'attendre Olivier Faure et d'aller à sa rencontre à la fin de son interview. Selon le témoignage du chef du service politique de la chaîne, les deux dirigeants se sont isolés dans une loge de maquillage en compagnie de l'écologiste Marine Tondelier, qui était elle présente sur le plateau de LCI, pour discuter entre eux pendant trois quarts d'heure avec comme objectif "d'éviter une dissolution d'ores et déjà annoncée".
Le secrétaire général de Renaissance met toujours en avant sa proposition d'un négociateur hors milieu politique qui pourrait mettre tout le monde autour d'une table. "Je sens que Gabriel Attal a beaucoup bougé mais peut-il emporter avec lui l'ensemble des 91 députés de Renaissance ?", s'interroge Sacha Houlié, député désormais passé chez Place publique, après avoir longtemps siégé au sein de la majorité présidentielle. "Avant une nouvelle dissolution, c'est la seule chose qu'on n'a pas encore essayée", explique le sénateur macroniste Xavier Iacovelli, ancien membre du PS.
"Pourquoi pas y aller, mais pas sur n'importe quelle base."
Xavier Iacovelli, sénateur Renaissanceà franceinfo
Le premier gage donné par les socialistes aux élus de Renaissance est l'assurance de ne pas gouverner avec La France insoumise. Le PS a refusé de participer à la réunion de la gauche organisée par Les Ecologistes mercredi, à laquelle étaient conviés des cadres insoumis. "On n'a pas grand-chose à se dire avec LFI en ce moment. Ils sont dans une stratégie de destitution. Ce n'est pas la nôtre", justifie Rémi Branco.
"On ne reproduira pas la stratégie de Mélenchon"
"C'est la victoire intellectuelle de Raphaël Glucksmann : avoir emporté la gauche loin des insoumis", savoure Sacha Houlié. "Ils savent bien que mentionner les insoumis, ça arrête tout de suite les discussions", tempère la députée macroniste Prisca Thévenot, ancienne porte-parole du gouvernement de Gabriel Attal, qui souhaite "poser la question du pour quoi faire plutôt que celle du qui". De son côté, le mouvement de Jean-Luc Mélenchon dénonce cette "stratégie de distanciation". "Si le Parti socialiste veut être coresponsable de la France macroniste, qu'il y aille", cingle la députée insoumise Nadège Abomangoli, interrogée sur franceinfo.
Le second gage donné aux députés de Renaissance est celui d'une méthode respectueuse. Lors de ses universités d'été à la fin du mois d'août, le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a promis qu'il n'aurait pas recours à l'article 49.3. Cet engagement a été repris à son compte par Sébastien Lecornu. "On ne reproduira pas la même stratégie que Jean-Luc Mélenchon en 2024", promet Rémi Branco. A l'époque, au soir du second tour des législatives anticipées, Jean-Luc Mélenchon avait déclaré que "le Nouveau Front populaire appliquera son programme, rien que son programme mais tout son programme", provoquant d'emblée des crispations au sein de la coalition.
"Nous devrons faire des concessions par rapport à ce qu'on ferait si on avait une majorité absolue", reconnaît Sacha Houlié. La direction du Parti socialiste juge possible de trouver un accord sur une hausse de la fiscalité qui ne sera pas totalement le même mécanisme que la taxe Zucman, un renoncement au déremboursement de certains médicaments ou même une suspension de la réforme des retraites, si Renaissance y met de la bonne volonté. "La suspension de la réforme des retraites, ça coûte cinq milliards d'euros par an. J'attends qu'ils m'expliquent comment ils financent. Il ne faut pas que ça fasse plonger le budget de la France non plus", juge le sénateur macroniste Xavier Iacovelli. Dans une interview au Parisien publié mardi soir, Elisabeth Borne, pourtant à l'origine de la réforme, accepte de revenir dessus. "Si c'est la condition de la stabilité du pays, on doit examiner les modalités et les conséquences concrètes d'une suspension jusqu'au débat qui devra se tenir lors de la prochaine élection présidentielle", déclare l'ancienne Première ministre. Invité du "20 heures" de France 2, Olivier Faure a salué "un pas vers le PS".
"Jamais les insoumis n'oseront censurer"
Il reste la question de l'incarnation. Qui pour occuper Matignon ? "Le sujet, c'est forcément de mettre une gauche non irritante", admet un responsable de parti qui reconnaît "qu'Olivier Faure fait figure de possible, mais braquera immédiatement une partie du bloc central". "Je plaide pour un Premier ministre de gauche. Un profil à la Cazeneuve ou un parlementaire type Jérome Guedj ou Boris Vallaud", confie un député du camp présidentiel, macroniste de la première heure qui souhaite éviter une dissolution. "Le premier secrétaire du PS ne fait pas de son cas personnel un préalable", estime Rémi Branco.
"Une autre personne de gauche issue du Parlement nous irait car je pense que dans le contexte où il faudra aller chercher des compromis dans un jeu parlementaire, c'est un plus d'avoir une expérience de la députation."
Rémi Branco, porte-parole du Parti socialisteà franceinfo
Un profil qui exclut d'emblée Marine Tondelier, la secrétaire nationale des Ecologistes n'ayant jamais été parlementaire. Elle se prépare à tous les scénarios, dont une dissolution ou une démission. Une façon de préserver une posture unitaire. Mardi, à l'issue de la réunion qu'elle a organisé avec La France insoumise, l'écologiste a appelé toute la gauche à "agir ensemble" pour porter un "programme de rupture au pouvoir". Dans un communiqué commun partagé sur X, les participants appellent à censurer "tout gouvernement qui s'inscrirait dans la continuité macroniste".
Est-ce que cette définition s'applique à un gouvernement socialiste qui obtiendrait des votes de député Renaissance aux prix de compromis ? "Jamais les insoumis n'oseront censurer un gouvernement de gauche", prédit le communiste Ian Brossat. "Moi, je ne vois pas pourquoi Jean-Luc Mélenchon ferait des cadeaux aux socialistes. S'il les laisse prendre le lead sur la gauche, il obère ses chances pour la présidentielle", conclut le sénateur macroniste Xavier Iacovelli.
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