Après la chute du gouvernement de François Bayrou, que peuvent faire des ministres chargés de "l'expédition des affaires courantes" ?
Le gouvernement démissionnaire peut gérer les "affaires ordinaires" nécessaires à la bonne marche de l'Etat, mais aussi les "affaires urgentes", dont l'adoption est dictée par "une impérieuse nécessité".
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François Bayrou a perdu son pari. Le Premier ministre n'a pas obtenu la confiance des députés à l'Assemblée nationale, lundi 8 septembre, et Emmanuel Macron a affirmé dans la foulée qu'il nommerait un nouveau Premier ministre "dans les tout prochains jours". Mais le Béarnais ne va pas pouvoir rentrer à Pau tout de suite, puisqu'il doit désormais attendre l'arrivée d'un nouveau Premier ministre.
Une fois démissionnaire, le gouvernement "reste en place, tant qu'il n'est pas remplacé par un nouveau gouvernement, pour assurer, au nom de la continuité, le fonctionnement minimal de l'Etat", explique une note du secrétariat général du gouvernement (SGG) de juillet 2024. Pendant ce laps de temps, le gouvernement a des pouvoirs limités.
Assurer la continuité de l'Etat
Le concept d'"expédition des affaires courantes" s'est construit à travers la jurisprudence, donc il reste "une part irréductible d'appréciation", prévient d'emblée le secrétariat général du gouvernement. Plus les périodes d'affaires courantes ont été longues, plus cette notion a été "appréciée de façon extensive", relève sa note. Les affaires courantes englobent "la marche normale de l'Etat", qui ne nécessite "aucune appréciation de nature politique", et les "affaires urgentes", dont l'adoption est dictée par "une impérieuse nécessité".
Concrètement, une catastrophe naturelle comme une inondation, des troubles à l'ordre public lors de manifestations liées au 10 septembre ou encore un état d'urgence déclenché par un attentat terroriste sont autant de situations qui nécessiteraient une action urgente du gouvernement. En cas de crise, les cabinets ministériels d'un gouvernement démissionnaire continuent donc de travailler. Mais les ministres ne peuvent prendre des mesures réglementaires (circulaires, communiqués, instructions ou notes de service) que si elles sont indispensables au traitement des affaires courantes, selon le SGG.
Faire voter des mesures financières d'urgence
La chute du gouvernement Bayrou entraîne l'arrêt des travaux concernant le budget. Il faudra donc attendre un nouveau gouvernement pour avoir la présentation d'un projet de loi de finances (PLF), qui doit être déposé à l'Assemblée nationale au plus tard le premier mardi du mois d'octobre, soit le 7 octobre. Sous la Ve République, en période d'expédition des affaires courantes, aucun projet de loi n'a été délibéré en Conseil des ministres ni adopté par le Parlement. En effet, d'une part, toute mesure législative est tenue "pour importante et politiquement sensible" et, d'autre part, "il peut sembler inadéquat de saisir le Parlement, alors même qu'il est privé de sa prérogative la plus forte, à savoir la possibilité de renverser le gouvernement", explique la note du SGG.
Pour autant, le secrétariat général du gouvernement n'exclut pas que le gouvernement démissionnaire puisse prendre des "mesures financières urgentes" type loi spéciale, afin de "doter la France d'un budget". Cela offre un peu de souplesse en cas de blocage politique pour Matignon. Le SGG évoque aussi la possibilité que le gouvernement démissionnaire puisse procéder par ordonnances si le texte n'est pas adopté dans le délai de 70 jours prévu par la loi. Mais sans jurisprudence, le constitutionnaliste Benjamin Morel estime qu'il faut faire preuve d'une "grande prudence" à ce sujet.
Se réunir en Conseil des ministres
Dans cette période de transition, rien n'interdit au président de la République de réunir un Conseil des ministres, mais souvent avec un ordre du jour "particulièrement léger", précise le SGG. Ce dernier prend l'exemple du gouvernement démissionnaire de Raymond Barre, qui s'était contenté dans son menu du Conseil des ministres du 20 mai 1981 d'une simple communication "sur la situation économique et sociale de la France". Par ailleurs, les réunions interministérielles, les réunions de travail et la saisine d'instances consultatives ne sont pas interdites, mais le SGG recommande aux cabinets des ministères de ne pas générer "une charge de travail inutile pour les administrations" et précise qu'il ne "paraît pas opportun de lancer des travaux dont l'échéance serait trop lointaine ou la sensibilité politique trop forte".
Le chef de l'Etat peut continuer à procéder à des nominations, sauf "les plus politiquement sensibles", comme celles des directeurs d'administration centrale. Sous le gouvernement démissionnaire de Gabriel Attal, l'opposition avait critiqué plusieurs nominations jugées sensibles, comme le nouveau gouverneur militaire de Paris, le nouveau chef d'état-major de l'armée de l'air ou le secrétaire général adjoint de la défense et de la sécurité nationale.
Prendre son mal en patience
L'entourage d'Emmanuel Macron plaide pour qu'une solution soit rapidement trouvée pour Matignon, mais le chef de l'Etat a déjà pris son temps par le passé. Les ministres peuvent donc tranquillement préparer leur passation et faire leurs cartons. Pour patienter, les ministres également députés retrouvent leur mandat parlementaire et peuvent voter à l'Assemblée nationale, même si cela pose des questions juridiques et politiques, étant donné que la Constitution interdit le cumul des deux fonctions, et qu'un gouvernement démissionnaire ne peut être renversé par le Parlement.
Le gouvernement de Gabriel Attal est resté démissionnaire près de huit semaines, de sa démission le 16 juillet à la nomination de Michel Barnier, le 5 septembre. Le président de la République s'est décidé beaucoup plus rapidement pour François Bayrou, nommé le 13 décembre, huit jours seulement après la démission de Michel Barnier. Ce délai est plus conforme à l'historique des gouvernements en affaires courantes.
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