Guerre à Gaza : que peut-on attendre des négociations indirectes entre le Hamas et Israël sur la mise en œuvre du plan Trump ?

Les négociateurs palestiniens et israéliens se sont retrouvés à Charm el-Cheikh (Egypte) pour discuter du plan de paix proposé par Donald Trump. Les discussions vont d'abord porter sur l'échange entre otages israéliens et prisonniers palestiniens.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Des Palestiniens déplacés par l'offensive israélienne dans le camp de réfugié de Bureij (bande de Gaza), le 6 octobre 2025. (EYAD BABA / AFP)
Des Palestiniens déplacés par l'offensive israélienne dans le camp de réfugié de Bureij (bande de Gaza), le 6 octobre 2025. (EYAD BABA / AFP)

Un accord à portée de main ? Le Hamas et Israël tiennent, lundi 6 octobre, une première journée de discussions indirectes à Charm el-Cheikh (Egypte), à la veille du deuxième anniversaire de l'attaque terroriste sans précédent menée par le groupe islamiste contre Israël le 7 octobre 2023. Les deux camps ont commencé à échanger sur le plan de Donald Trump pour la paix dans la bande de Gaza, qui vise à faire libérer les otages et à faire cesser la guerre dans le territoire palestinien ravagé par l'offensive israélienne. Plus de 60 000 personnes y sont mortes depuis le début du conflit, tandis que des centaines de milliers ont été déplacées.

Annoncé le 29 septembre, le plan américain prévoit un cessez-le-feu, la libération dans les soixante-douze heures des otages retenus à Gaza, ainsi que le retrait par étapes de l'armée israélienne de l'enclave et le désarmement du Hamas. Il a provoqué l'espoir des habitants de la bande de Gaza, où l'état de famine a été déclaré dans une partie du territoire par l'ONU fin août, ainsi que des familles d'otages israéliens détenus par le Hamas. Mais au-delà de la recherche d'un cessez-le feu rapide, la fin définitive de la guerre à Gaza reste encore très hypothétique.

La délégation du Hamas, menée par son négociateur en chef Khalil al-Hayya, a tenu dans la matinée des entretiens préliminaires au Caire avec les médiateurs égyptiens et qataris. Côté israélien, Ron Dermer, ministre des Affaires stratégiques en charge du dossier des otages, est à la tête de l'équipe des négociateurs, rapporte CNN. Les discussions, qui ont commencé en début de soirée dans la station balnéaire égyptienne, se feront de manière séparée, des médiateurs égyptiens et qataris effectuant la navette entre les deux délégations, explique RFI. Les Etats-Unis ont également dépêché sur place leur émissaire Steve Witkoff et le gendre du président américain Jared Kushner.

Les otages, premier sujet de discussion

Seule la première phase du plan de paix de Donald Trump est pour l'instant sur la table. Israël et le Hamas discutent d'abord des modalités d'échanges des 48 otages israéliens, dont une vingtaine sont encore vivants, avec 250 prisonniers palestiniens et 1 750 Gazaouis emprisonnés durant la guerre. Un accord sur le sujet semble à portée de main, à en croire l'administration américaine. Il est même "très probable" que les deux parties procèdent à un échange, analyse pour SBS, Anas Iqtait, professeur à l'Université nationale australienne de Canberra (Australie). "Nous n'avons jamais été aussi proches d'obtenir la libération de tous les otages", a aussi insisté le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio sur ABC News, dimanche. 

La question d'un cessez-le-feu sera cruciale. Le Hamas, qui demande du temps pour libérer les otages, exige qu'Israël suspende toute opération militaire dans l'ensemble de la bande de Gaza et se retire de Gaza-ville. Une demande dont Donald Trump s'était fait l'écho vendredi. L'armée israélienne, qui a affirmé avoir réduit ses opérations dans le territoire, comme le souligne le New York Times, a tout de même poursuivi ses frappes sur Gaza, faisant près de 60 morts samedi et 20 dimanche, selon la défense civile.

Les objectifs d'Israël et du Hamas sont "irréconciliables"

Un éventuel accord entre Israël et le Hamas sur la libération des otages ne signera que le début d'intenses négociations. Le plan de Donald Trump prévoit ainsi un retrait progressif israélien de la bande de Gaza, en échange d'un désarmement du mouvement islamiste, mais sans préciser de calendrier. Le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, sous pression des membres d'extrême droite de son gouvernement, est resté flou sur la future présence de l'armée israélienne dans la bande de Gaza.

Autre point sensible : la mise en place d'une instance de transition présidée par les Etats-Unis, avant un transfert à des autorités palestiniennes, sans le Hamas. Une proposition rejetée de longue date par le groupe qui contrôle la bande de Gaza. La création d'une force de "stabilisation" avec des pays arabes et occidentaux, dont la composition n'a pas encore été dévoilée, pourrait aussi s'avérer complexe.

Les objectifs du Hamas et d'Israël sont pour l'instant "irréconciliables", explique ainsi à la chaîne publique américaine PBS, Aaron David Miller, ancien négociateur des Etats-Unis pour le Moyen-Orient. "Le Hamas veut survivre et il recherchera deux engagements que, selon moi, le gouvernement israélien ne sera pas disposé à respecter : le retrait de toutes les forces israéliennes de Gaza et une fin officielle de la guerre, où les Israéliens cesseront d'exercer leur droit d'intervenir ou d'empêcher toute résurgence du Hamas", résume le spécialiste.

"Ce plan, que Benyamin Nétanyahou a accepté, ne changera pas ses orientations stratégiques", estimait auprès de franceinfo fin septembre Jean-Paul Chagnollaud, président de l'Institut de recherche et d'études Méditerranée Moyen-Orient. "Si le Hamas ne l'accepte pas ou impose trop de conditions, cela va faire le jeu [de Benyamin Nétanyahou] et lui permettre de continuer la guerre", ajoutait le spécialiste. Samedi, le Premier ministre israélien a d'ailleurs une nouvelle fois juré de désarmer le Hamas, soit dans le cadre du plan, soit par ses propres moyens militaires. En cas d'échec des négociations, qui devraient durer plusieurs jours, "nous reprendrons le combat", a averti le chef d'état-major de l'armée israélienne Eyal Zamir.

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