Glyphosate : "Ce n'est pas une défaite totale", estime l'avocat de la famille qui a perdu son procès contre le géant Bayer-Monsanto, et qui fait appel
"Les attestations que nous avons produites ne sont pas suffisantes", a regretté l'avocat, qui espère pouvoir ajouter d'autres preuves. La famille accuse le géant mondial des pesticides d'être responsable des malformations congénitales de Théo Grataloup, 18 ans.
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"Ce n'est pas une défaite totale, on y voit dans le jugement une invitation à poursuivre la procédure, à compléter le dossier", a déclaré Bertrand Repolt, l'un des avocats de la famille de Théo Grataloup, au micro de franceinfo jeudi 31 juillet. La famille compte faire appel après avoir perdu en première instance son procès contre Bayer-Monsanto, qu'elle accuse d'être responsable des malformations congénitales de Théo Grataloup, 18 ans. La mère du jeune homme affirme avoir été exposée au glyphosate quand elle était enceinte en 2006.
Après des années de procédures judiciaires, le tribunal de Vienne (Isère) a tranché dans un jugement rendu jeudi. La justice donne raison au groupe Bayer-Monsanto. Le glyphosate n'est pas jugé responsable directement des malformations congénitales de Théo Grataloup, faute de preuve suffisante.
"On ne peut pas toujours avoir une preuve à 100%"
Les parents de Théo sont, eux, convaincus du "lien de causalité" entre le glyphosate et le handicap de leur fils. Ils avaient lancé en 2018 une action au civil pour faire reconnaître ce lien par les tribunaux. Quand Sabine Grataloup était enceinte en 2006, elle utilise alors du Glyper, un générique de l'herbicide Roundup de Monsanto, à base de glyphosate, pour désherber une carrière d'équitation. "Quand on a épandu le produit, on n'avait pas un huissier de justice avec nous pour le constater", réagit Thomas Grataloup, le père de Théo Grataloup, au micro de France Inter.
"On ne peut pas toujours avoir une preuve à 100% qui soit complètement irréfutable", souffle le père du jeune homme. "Si on fait un parallèle avec les victimes de l'amiante, il a fallu qu'il y ait beaucoup de décès pour qu'on prenne le problème à bras-le-corps, sans réclamer aux gens les factures des fabricants des toitures en amiante dans lesquelles ils étaient", poursuit Thomas Grataloup. "Ce qui me porte, c'est que je suis une maman qui défend son enfant, c'est la source d'énergie la plus inépuisable au monde", explique sur franceinfo Sabine, la maman de Théo.
"Le tribunal reconnaît Monsanto comme fabricant du produit, mais il déboute la famille de Théo parce qu'il estime que les preuves de l'utilisation du Glyper, en particulier en 2006, ne sont pas suffisantes."
Bertrand Repolt, avocat de la famillesur franceinfo
"Les attestations que nous avons produites ne sont pas suffisantes", a regretté l'avocat. Comme preuve viable, il aurait fallu fournir par exemple "une facture d'achat", relate-t-il. "Évidemment, c'est un peu compliqué. Lorsqu'elle (Sabine Grataloup, en 2006) a acheté le produit, elle n'a pas conservé la facture", défend-il.
Il faut donc apporter d'autres preuves de l'utilisation du Glyper en 2006. "C'est là toute la difficulté", reconnaît Bertrand Repolt. "Mais ce n'est pas impossible, on va tenter de compléter le dossier", assure-t-il à franceinfo. Il "rappelle également qu'il y a dans le dossier une première décision de la commission des victimes des pesticides qui a reconnu un lien possible entre l'exposition et les malformations".
"Cette procédure est une course de fond"
L'avocat de la famille estime tout de même avoir marqué "un premier point dans ce jugement", celui d'avoir obtenu "la reconnaissance de la qualité de fournisseur du produit de Monsanto, que Monsanto a continuellement contesté, dénié tout au long de la procédure". "Cette procédure est une course de fond, nous restons déterminés et nous irons en appel", même si ça va prendre "deux et trois ans de procédure", complète Bertrand Repolt.
Né avec l'œsophage et la trachée qui ne se sont pas séparés correctement, Théo a subi 55 opérations qui lui permettent de manger normalement, de respirer et parler par un trou dans la gorge. La reconnaissance d'un "lien de causalité" entre le handicap de Théo et l'herbicide serait une "première", selon ses parents, pour un enfant exposé in utero au glyphosate. Le glyphosate, herbicide le plus vendu au monde, a été classé en 2015 comme un "cancérogène probable" par le Centre international de recherche sur le cancer de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). Il est interdit en France depuis fin 2018 pour un usage domestique.
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