Reportage Le Rhône "couleur café au lait" : dans l'Ain, des agents d'un barrage hydroélectrique libèrent des sédiments pour éviter les inondations

C'est une couleur inhabituelle pour le fleuve, mais c'est pour la bonne cause. Une opération de vidange exceptionnelle est organisée tous les quatre ans sur des barrages près de Genève. Les agents visent à préserver les barrages et l'environnement.

Article rédigé par Boris Hallier
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Opération exceptionnelle pour libérer les sédiments qui s'accumulent dans le barrage hydroélectrique de Génissiat, le 22 mai 2025, à Injoux-Génissiat (Ain). (BORIS HALLIER / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)
Opération exceptionnelle pour libérer les sédiments qui s'accumulent dans le barrage hydroélectrique de Génissiat, le 22 mai 2025, à Injoux-Génissiat (Ain). (BORIS HALLIER / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Le Rhône s’offre une cure d’amaigrissement. La couleur de ses eaux a même changé, surtout en amont de Lyon. C’est normal : une opération exceptionnelle, organisée tous les quatre ans, est menée en ce moment même sur des barrages près de Genève, côtés suisse et français. Le but : libérer les sédiments pour éviter les inondations, pour préserver les barrages et l’environnement.

Au barrage hydroélectrique de Génissiat (Ain), c'est un paysage inhabituel que l’on observe en surplombant l’énorme retenue d’eau. "Vous voyez les berges grises qui sont découvertes ? Habituellement, c'est globalement sous l'eau jusqu'à la limite des herbiers que vous situez en face", relève Laurent Tonini.

Le directeur territorial de la CNR, la Compagnie nationale du Rhône, l’a calculé : le niveau a baissé ici de 11 mètres. Car depuis une semaine, les vannes sont ouvertes pour libérer les sédiments qui s’accumulent en amont et menacent Genève d’inondations. "On parle de limon, de matériaux très fins, d'argile, de sable. Quand il y a de l'érosion ou des orages, des sédiments partent de la montagne dans les ruisseaux, puis dans les rivières, puis les rivières arrivent jusqu'au Rhône. Puis ils finissent par être retenus dans les barrages".

"Périodiquement, il faut rétablir cette continuité sédimentaire en aidant la nature à transporter les sédiments à l'aval."

Laurent Tonini, directeur territorial de la Compagnie nationale du Rhône

à franceinfo

L’équivalent de 600 piscines olympiques de sédiments à évacuer en douze jours. Pas de vagues ni de tsunami à craindre, tout se fait progressivement. Seule l’eau change de couleur. "Ce n'est pas la couleur de l'eau du Rhône habituelle, qui tend vers le bleu-vert typique du Rhône, détaille Laurent Tonini. En l'occurrence, on est plutôt sur une couleur café au lait." Les agents du barrage, eux, enchaînent les prélèvements pour contrôler l’état de l’eau à la sortie de l’ouvrage. "Le sable descend et on va mesurer à plusieurs étapes, une minute, une minute trente et deux minutes, le niveau de sable dans un litre d'eau."

Les agents du barrage de Génissieux vérifient le taux de sédiment en aval, le 22 mai 2025, à Injoux-Génissiat (Ain). (BORIS HALLIER / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)
Les agents du barrage de Génissieux vérifient le taux de sédiment en aval, le 22 mai 2025, à Injoux-Génissiat (Ain). (BORIS HALLIER / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Le taux de sédiments doit ainsi être limité à cinq grammes par litre en moyenne. "Un excédent de sédiments peut venir perturber les poissons par du colmatage de branchies, cela peut perturber les habitats, parce que certains de ces matériaux transitent mais d'autres se déposent, explique Franck Pressiat, responsable environnement à la CNR. Là, on parle de poissons, mais on se focalise aussi sur les invertébrés aquatiques, donc les insectes aquatiques, par exemple. La végétation pourrait aussi être affectée s'il y avait beaucoup de sédimentation." Cette opération va durer encore une semaine, mais le voyage de ces sédiments, lui, va se poursuivre encore longtemps, une dizaine d’années pour arriver jusqu’à la Méditerranée.

Le reportage de Boris Hallier dans l'Ain

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