Incendie dans l'Aude : "Entre les hautes flammes et les fumées noires qui se dégagent, on a beaucoup de turbulences", explique un pilote de Canadair
Thierry Loine détaille, mercredi sur franceinfo, le déroulement des opérations des Canadair contre le gigantesque feu qui s'est déclaré dans l'Aude, avec plusieurs milliers d'hectares brûlés.
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"La difficulté, face à un feu d'une telle ampleur, face à ce qu'on appelle des feux catastrophiques, ça va être la taille des flammes et l'aérologie qui va être provoquée par l'incendie", analyse sur franceinfo mercredi 6 août Thierry Loine, pilote et commandant de bord Canadair à la Sécurité civile. Un feu très important s'est déclaré mardi dans l'Aude, et a déjà englouti plus de 16 000 hectares et traversé 15 communes du massif des Corbières.
"Entre les hautes flammes, les fumées noires qui se dégagent, on a beaucoup de turbulences", explique le pilote. "Donc la difficulté, c'est d'arriver à attaquer les flammes, puisqu'en Canadair, on attaque directement les flammes et on est gênés justement par ces phénomènes d'aérologie et ces fumées". "Le feu provoque son propre vent, avec des rotors [des mouvements tourbillonnaires] importants", détaille-t-il. Dans l'Aude, "le feu s'est déclaré dans une partie du département qui était en souffrance extrême depuis plusieurs années et dont vous aviez environ la moitié de la végétation qui était déjà morte sur pied... Donc quand un feu arrive avec une telle énergie sur du bois mort, vous imaginez l'ampleur que ça peut donner par la suite".
"Impossible d'attaquer le feu directement par la tête"
La stratégie pour contenir ce feu est donc complexe, car il est "impossible d'attaquer le feu directement par la tête, qui génère beaucoup trop de flammes et de fumées". "On est obligés de travailler sur les flancs, et donc on va larguer à partir de l'origine, en remontant vers les flancs". "Quand vous avez un feu avec une telle énergie, avec une telle propagation, il est difficile de l'arrêter, même quasiment impossible, c'est la nature qui fera son office", reconnaît-il.
Il décrit donc l'action des pompiers comme des actions de "jalonnement, de protection des points sensible" pour "contenir le feu". Avec, en conséquence, une vulnérabilité très forte à la météo. "Le vent peut se lever à nouveau et surtout s'inverser, et là, c'est la pire des choses, puisqu'un vent qui tourne, c'est ce qu'on avait connu en 2022 à la Teste-de-Buch (Gironde), cela va brûler une partie qui n'a pas brûlé lors du premier passage et tout le dispositif sera à redéfinir".
Il ajoute que les Canadair sont "particulièrement efficaces" contre les incendies mais "à condition d'être en nombre et d'avoir des rotations qui sont relativement courtes, c'est la répétition des largages et le nombre d'avions qui font qu'on sera réellement efficaces". "Si vous commencez à dispatcher votre dispositif en mettant un avion ici, un avion là, vous ne serez pas efficaces sur des gros feux majeurs".
"On n'a pas douze Canadair disponibles"
Thierry Loine s'inquiète donc du nombre de Canadair disponibles en France. "Aujourd'hui, il faut soit avoir les moyens de ses ambitions, soit assumer le fait que nous n'ayons plus les moyens de nos ambitions", assène-t-il. "On n'a pas douze Canadair disponibles aujourd'hui, pourquoi ? Parce qu'il y a toujours des opérations de maintenance qui peuvent être faites sur les différents avions, surtout s'ils sont massivement employés. Donc pour avoir douze Canadair disponibles, il en faudrait seize, de manière à avoir une flotte suffisante".
"A l'issue des feux de 2022, le président de la République avait pris la décision de monter la flotte à seize avions, mais malheureusement cela n'a pas été suivi d'effet", regrette le pilote. "On manque d'anticipation", conclut-il.
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