Réforme des retraites : cinq questions sur la motion de censure déposée par le RN contre le gouvernement
Sauf retournement de situation, les députés du groupe d'extrême droite ne devraient pas réussir à provoquer la démission du gouvernement d'Elisabeth Borne.
C'est un rebondissement, un de plus, au milieu de deux semaines politiques déjà très animées par l'examen de la réforme des retraites à l'Assemblée nationale. En fin d'après-midi, mercredi 15 février, Marine Le Pen a annoncé le dépôt d'une motion de censure spontanée par l'ensemble des députés du groupe parlementaire qu'elle préside. Le but, selon la cheffe de file des députés du Rassemblement national (RN), est de provoquer un "référendum parlementaire" contre le texte du gouvernement.
Objectif de la motion, positionnement des oppositions… Franceinfo répond à cinq questions sur l'initiative des députés d'extrême droite face à l'exécutif et aux autres groupes politiques dans cette bataille de la réforme des retraites.
1 Qu'est-ce qu'une motion de censure spontanée ?
Définie à l'article 49.2 de la Constitution, la motion de censure spontanée diffère de la motion de censure provoquée, que l'on retrouve à l'article 49.3 et qui a été abondamment utilisée par les différents groupes d'opposition depuis le mois de juin. La motion de censure spontanée "résulte de la seule initiative des députés", précise le site vie-publique.fr, tandis que la motion de censure provoquée est engendrée par la décision du gouvernement d'engager sa responsabilité sur un texte particulier. Autrement dit, la motion spontanée intervient hors 49.3. Un député ne peut pas en signer plus de trois lors d'une session parlementaire ordinaire, d'octobre à juin.
Les deux motions de censure ont en réalité le même but : provoquer la démission du gouvernement en le mettant en minorité à l'Assemblée nationale. Aujourd'hui, l'exécutif y dispose d'une majorité relative, sous la barre des 289 députés sur 577. "Seuls sont recensés les votes favorables à la motion de censure, qui ne peut être adoptée qu'à la majorité des membres composant l'Assemblée", précise la Constitution.
2 Quand cette motion de censure sera-t-elle débattue ?
La Constitution précise que "le vote ne peut avoir lieu que quarante-huit heures après [le] dépôt" de la motion. Déposée mercredi à 17h55, celle du RN ne peut donc pas être discutée avant vendredi, 17h55, soit environ six heures avant la fin programmée des débats sur la réforme des retraites à l'Assemblée nationale, qui doit intervenir à minuit. La conférence des présidents, composée des principaux représentants de l'Assemblée, se réunira vendredi à 8h45 pour déterminer quand aura lieu l'examen de la motion de censure.
"Je pense que notre motion de censure sera examinée vendredi soir à minuit", a expliqué Marine Le Pen, jeudi matin, à l'Assemblée nationale. "Elle ne prendra pas de temps au débat et on ne nous accusera pas d'avoir été complices du gouvernement."
3 Quel est le but du RN avec cette initiative ?
"La motion de censure servira de vote sur la loi, pour tout le monde", a assuré Marine Le Pen, jeudi matin. La présidente du groupe RN à l'Assemblée anticipe le fait que les députés ne parviendront pas à un vote sur la réforme des retraites, en raison du très grand nombre d'amendements qui restent à étudier. La motion déposée est, selon elle, un moyen de voir "qui sera vraiment opposé au texte".
Car c'est là un objectif du RN : obliger les autres groupes politiques de l'opposition (les quatre groupes de la Nupes, Les Républicains et les indépendants du groupe Liot) à se positionner clairement, malgré l'absence de vote sur le fond du texte, pour ou contre la réforme du gouvernement. Ce que certains redoutent : "S'il n'y a pas de vote à l'Assemblée en première lecture, c'est mieux, car on évite déjà de faire capoter le groupe en interne", espérait un cadre des Républicains en fin de semaine dernière.
4 La motion de censure du RN sera-t-elle soutenue par les autres groupes ?
Non. Tous les autres groupes politiques ont exclu de voter cette motion de censure, comme ce fut le cas lors des précédentes motions de censure déposées par le Rassemblement national depuis juin dernier. "On ne collabore pas, d'aucune manière, avec un parti d'extrême droite", a affirmé mercredi l'écologiste Sandrine Rousseau sur LCP, alors que sa collègue LFI Clémentine Autain a expliqué qu'il était "hors de question pour [son groupe] d'être assimilé à une force coagulée à l'extrême droite". Pour une cadre de la Nupes, rencontrée par franceinfo jeudi matin, la motion de censure est "un cadeau d'enfer pour le gouvernement", qui ne sera pas mis en minorité à l'Assemblée.
"Le gouvernement a contraint l'Assemblée avec cette réforme mais, grâce à cette motion, le message qui ressort est : 'On a la confiance'."
Une députée de la Nupesà franceinfo
5 D'autres motions de censure pourraient-elles être déposées ?
La possibilité est forte. "Vous le saurez en temps et en heure", a répondu mercredi à des journalistes Clémentine Autain à propos d'une éventuelle motion de censure de la Nupes. "La question de la motion de censure peut se poser éventuellement à l'issue du texte", a esquissé le numéro un du PS, Olivier Faure. Les différents groupes de la gauche réfléchissent actuellement au calendrier idéal pour le dépôt d'une telle motion. "Il faut le faire au bon moment et on va essayer d'être calés sur le mouvement social", explique une députée écologiste, alors que Jean-Luc Mélenchon a appelé les opposants à la réforme à "tout bloquer" à partir du 7 mars, prochaine journée de mobilisation intersyndicale et politique après celle du jeudi 16 février.
Si une motion de censure était déposée par la Nupes, le Rassemblement national pourrait la soutenir, comme il l'a déjà fait à plusieurs reprises depuis juin. Les Républicains, dont la position officielle consiste à soutenir la réforme des retraites malgré quelques soubresauts au sein du groupe, se retrouveraient alors en position d'arbitres face au gouvernement.
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