"La loi Duplomb est un leurre, qui ne concerne qu'une minorité d'agriculteurs", dénonce un responsable de la Fondation pour la nature et l'homme

La loi Duplomb, censée "lever les contraintes" pour les agriculteurs, est examinée lundi à l’Assemblée. Mais ses mesures inquiètent écologistes qui dénoncent un danger pour l’environnement et une réponse inadaptée à la crise agricole.

Article rédigé par franceinfo
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Un fermier répand des pesticides sur ses champs (photo d'illustration). (PHILIPPE HUGUEN / AFP)
Un fermier répand des pesticides sur ses champs (photo d'illustration). (PHILIPPE HUGUEN / AFP)

La proposition de loi est très attendue. Le texte vise à calmer la colère agricole et selon son nom officiel doit "lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur". L'Assemblée nationale entame, lundi 26 mai, l'examen de la proposition de loi Duplomb, soutenue par des syndicats agricoles comme la FNSEA, les Jeunes agriculteurs (JA) et la Coordination rurale. Mais cette loi scandalise aussi la Confédération paysanne et surtout les défenseurs de la nature.

La mesure phare de ce texte concerne la réintroduction de l'Acétamipride. Un pesticide très critiqué de la famille des néonicotinoïdes, surnommés les "tueurs d'abeilles". Il doit faire son retour pour les cultures de betterave et noisette par dérogation pour trois ans. Ce produit est moins dangereux que les autres néonicotinoïdes mais nocif tout de même, pour les insectes. "L'acétamipride ne va pas forcément tuer les abeilles immédiatement mais va les affaiblir et les désorienter et donc les abeilles vont mettre beaucoup plus de temps à retrouver la ruche, alerte François Veillerette de Générations futures. Elles vont s'épuiser, soit elles vont mourir et ne vont pas retrouver la ruche, soit elles vont être fatiguées, épuisée et là elles seront plus sujettes à des maladies ou à des parasites. Il va y avoir une mortalité importante chez les abeilles dans un second temps."

Une nocivité qui est confirmée par des chercheurs du CNRS, et de l'Inrae. L'Acétamipride disparaît rapidement dans la terre mais persiste dans l'eau. Cette potentielle réintroduction, à l'heure où les populations d'insectes s'effondrent. Les pollinisateurs sont pourtant indispensables à notre alimentation. Ils permettent aux plantes de se reproduire. En Europe, 80% des espèces végétales cultivées dépendent de ces insectes.

"Des crises arriveront encore ces prochaines années"

L'autre mesure polémique concerne des contraintes environnementales allégées pour l'installation des plus gros élevages. Ils sont pourtant synonymes de pollutions des sols, de l'air ou des cours d'eau dénoncent les associations environnementales. On pense aux algues vertes en Bretagne, exemple emblématique des conséquences de l'élevage intensif de porc.

Cette proposition de loi ne profite qu'aux gros éleveurs, et ne calmera la colère. "Sous couvert de simplifier la vie des agriculteurs, cette loi est injuste pour une majorité d'entre eux, mais aussi pour l'environnement et notre santé, dénonce Thomas Uthayakumar, de la Fondation pour la nature et l'homme. Ça fait deux ans qu'on a une crise agricole et le cœur du problème, c'était le revenu. La loi Duplomb ne répond pas à cette question. La loi Duplomb, c'est un leurre. Elle ne concerne qu'une minorité d'agriculteurs. On va se retrouver avec des crises qui arriveront encore ces prochaines années, c'est certain."

L'autre gros dossier relève de la gestion de l'eau. Les députés en commission ont supprimé les mesures pour faciliter le stockage d'eau avec notamment les fameuses bassines. Des mesures qui pourraient faire leur retour pendant les débats. Enfin, la version du texte sorti du Sénat, prévoyait l'affaiblissement du rôle de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), chargé d'autoriser, ou non, les pesticides. Un article retiré en commission également mais là aussi il pourrait être réintroduit via des amendements dans l'hémicycle.

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