: Transparence Pourquoi France Télévisions a-t-elle décidé de se lancer dans l'identification systématique de ses images ?
Comment détecter les hyper-truquages (deep fake), ces images fausses souvent générées par des intelligences artificielles, ou toute autre tricherie sur des images ou du son ? Le standard C2PA est une piste prometteuse que France Télévisions souhaite adopter pour mieux flécher ses contenus auprès des utilisateurs.
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France Télévisions met en place à partir du jeudi 11 septembre le standard C2PA sur ses JT de 13 heures et de 20 heures disponibles en replay sur cette page dédiée. Quel est le but de cette démarche ? A quoi correspond exactement le standard C2PA ? Toutes nos explications dans le cadre de notre rubrique Une information transparente.
Ceux qui ne croient que ce qu'ils voient sont désormais loin du compte. Voir les photos ou les vidéos sur les réseaux sociaux comme sur des sites ne suffit plus à croire à leur véracité. Entendre la voix des journalistes et des personnalités politiques non plus. Nous sommes entrés dans l'ère des "deep fake" visuels et audio, ces hyper-truquages de vidéos et de sons plus "vrais" que nature mais totalement imaginaires, générés ou modifiés par des IA. Ces techniques peuvent émerveiller dans les films, mais aussi désinformer ou tenter d'influencer des élections, comme par exemple aux Etats Unis en 2024 et en Slovaquie en 2023.
Dans le monde entier, les rédactions ont donc créé des groupes de journalistes spécialisés dans la vérification des images, comme Les Révélateurs de France Télévisions. Mais cette adaptation est-elle suffisante face au déferlement de fausses images qui pourrait survenir ? Dans un modèle économique fragile, les médias pourront-ils survivre à cette "course à l'armement" – toujours plus d'images contrefaites, toujours plus de vérificateurs, et ainsi de suite ? Dans quelle mesure pourrez-vous faire confiance, dans un avenir proche, à l'information des médias ou aux contenus des réseaux sociaux ?
C'est dans ce contexte qu'est né en 2019 le consortium C2PA (Coalition for Content Provenance and Authenticity). Il regroupe près 250 entreprises du monde entier, dont France Télévisions ou la BBC, des plateformes comme Google, TikTok, Meta, Linkedin, des acteurs technologiques comme Microsoft, Adobe, Intel et Open AI, créateur de ChatGPT... Le but : ajouter des informations certifiées et non modifiables (on peut les enlever mais pas les modifier) aux images, dès leur création, pour en assurer la traçabilité et rendre ces informations accessibles au public.
Une sorte de carte d'identité de l'image
L'idée est qu'en survolant un logo, l'internaute puisse savoir, par exemple, qui a produit l'image, comment et quand elle a été modifiée et par qui. Les informations les plus pertinentes à mettre en avant restent à négocier entre les acteurs de C2PA. Voici comment cela fonctionne, en prenant l'exemple fictif d'un reportage sur une visite d'Emmanuel Macron à La Réunion, qu'une équipe de France Télévisions aurait suivie :
- Dès l'origine, l'image est enrichie, selon les réglages voulus par France Télévisions et par le fabricant de caméra, adhérents du label. Le marquage comprend par exemple la date, le lieu, l'auteur...
- Lors du montage, l'image est à nouveau enrichie parce que le fabricant du logiciel de montage a lui aussi adopté le standard C2PA.
- Même processus lors de la diffusion.
- Toutes les modifications apportées à l'image peuvent être accessibles via un "manifeste", un cartouche qui apparaît lorsqu'on survole un logo.
- Si l'image a fait l'objet d'une transformation électronique quelconque, ou qu'elle a été générée par une IA, alors cette information apparaît via le manifeste.
- Si aucun manifeste "n'accompagne" une image d'Emmanuel Macron à La Réunion, alors celle-ci est suspecte d'avoir été manipulée, voire générée par un acteur malveillant qui cherche à faire croire que le président, par exemple, a tenu tel ou tel propos qu'il n'a en fait jamais tenu.
"C’est un standard mondial qui est en train de naître. Un effort collectif pour aider le public à savoir immédiatement d'où provient l'image qu'il regarde."
Nathalie Galletjournaliste au MédiaLab de l'information de France Télévisions
La BBC a expérimenté le standard C2PA ponctuellement sur des images issues des réseaux sociaux. Elle raconte cette expérience dans cet article (en anglais). L'accueil du public semble très positif, selon cette étude du groupe public britannique.
Une technique complémentaire au "watermarking"
France Télévisions, comme de nombreux médias dans le monde, utilise déjà le watermarking, un marquage électronique invisible, plus ou moins robuste aux modifications. En quoi le standard C2PA diffère-t-il ?
- Le "watermarking" n'a pas le même but. Il est là pour protéger les droits des propriétaires de l'image contre le piratage alors que C2PA cherche à en assurer l'authenticité et la transparence pour le public.
- Le "watermarking" est souvent invisible alors que C2PA fait tout pour être visible via un logo.
- Le "watermarking" n'est pas toujours robuste à la copie. C2PA l'est plus grâce à la cryptographie. Soit on l'enlève, soit on le garde. On ne peut pas le modifier.
- Le "watermarking" ne donne pas accès à l'historique des modifications, alors que c'est la caractéristique principale de C2PA.
- Il y a plusieurs types de "watermarking" alors que C2PA est un standard à vocation universelle.
Donc le "watermarking" et C2PA ne sont pas concurrents, mais complémentaires. Le premier agit comme un tatouage intégré au contenu, tandis que le second documente son origine de manière explicite et vérifiable. Les deux peuvent cohabiter contre la falsification numérique.
Les replays du 13H et du 20H accessibles sur notre page "Une information transparente", et uniquement sur cette page dans un premier temps, sont désormais marqués du logo CR (pour "Content Credential"), la marque publique du standard C2PA. Un simple survol fait apparaître le manifeste, qui certifie l'origine des images.
"C'est un tout premier pas, qui sert à expliquer notre démarche et à prouver que le standard est bien automatisable dans notre processus de diffusion."
Romuald Ratdirecteur délégué du TechLab France Télévisions
L'objectif est par la suite d'offrir une traçabilité de chaque image du journal : image des agences de presse, de télévisions étrangères, issues des réseaux sociaux, etc. Un énorme travail d'industrialisation au service de la transparence.
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