Portrait Cédrine Kerbaol, un esprit libre qui vise le podium sur le Tour de France femmes

Seule Française à avoir remporté une étape sur l'épreuve, la Bretonne, au caractère très marqué, apparaît comme la meilleure chance tricolore au classement général.

Article rédigé par Andréa La Perna
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
Cédrine Kerbaol après l'effort à l'arrivée de la 7e étape de la Vuelta, le 10 mai 2025. (MIGUEL RIOPA / AFP)
Cédrine Kerbaol après l'effort à l'arrivée de la 7e étape de la Vuelta, le 10 mai 2025. (MIGUEL RIOPA / AFP)

A chaque année son cap. Maillot blanc [meilleure jeune] en 2023, puis première coureuse française à remporter une étape sur l'épreuve, Cédrine Kerbaol a débarqué sur son troisième Tour de France femmes avec l'ambition de faire encore mieux. Sur ses terres, la Bretonne - qui compte 19 secondes de retard sur la leader Marianne Vos - pourrait tenter un coup et devenir la première Tricolore à enfiler le maillot jaune, même si elle et son équipe n'en ont pas fait un objectif obligatoire. "Moi, ça me va si ça se produit", rigole sa directrice sportive chez EF Education-Oatly, Carmen Small, auprès de franceinfo: sport.

Tout sera une question d'opportunité saisie ou non. Ultra-offensive, la Française n'est pas du genre à tergiverser quand la porte s'ouvre. Sa victoire à Morteau l'an dernier, après une attaque et une descente tranchantes, en est la preuve la plus concrète. Le matin de ce jour inoubliable, la native de Brest pouvait largement se satisfaire de figurer à la quatrième place du classement général, au milieu des toutes meilleures à seulement 23 ans. Mais Cédrine Kerbaol est une forte tête qui ne s'interdit jamais de voir plus grand.

"C'est quelqu'un d'assez ambitieux. Une coureuse comme elle, qui a sa qualité, peut faire ce qu'elle veut de sa carrière. Si elle veut devenir championne du monde d'ici cinq ans, elle peut le faire", dit d'elle Carmen Small, elle-même ex-coureuse professionnelle et championne des Etats-Unis du contre-la-montre en 2016. Pour sa première saison avec l'équipe américaine où elle partage l'affiche avec la championne olympique Kristen Faulkner, la Française a brillé au point de s'impressionner elle-même, notamment sur Liège-Bastogne-Liège fin avril.

Objectif podium

"Ce jour-là, j'ai eu l'impression que j'en avais toujours sous la pédale. Je me suis surprise. Je ne sais pas pour quelle raison, j'ai toujours eu peur de la côte de la Redoute [avec un pourcentage de 9,5 % de moyenne, dont certains passages à 20%]. Je me suis mise devant pour ne me pas retrouver trop loin si je recule. Au final, je me suis retrouvée à pouvoir faire mal aux meilleures", retrace, auprès de franceinfo: sport, l'intéressée, quatrième à l'arrivée après des attaques à n'en plus finir, dans le groupe qui s'est disputé la victoire. C'est une nouvelle marche de franchie et maintenant il faut en franchir d'autres."

Derrière, Cédrine Kerbaol a enchaîné avec une quatrième place au classement final de la Vuelta, devant l'autre référence française des classements généraux, Juliette Labous (5e). De quoi confirmer son importance grandissante au sein de la formation américaine, où elle apprend actuellement ce que signifie être leader protégée dans une équipe qui vise le podium final sur le Tour. Interrogée sur le fait d'assumer le leadership à elle seule à la veille du départ, la Française a botté en touche : "Je n'ai pas l'habitude de donner les stratégies d'équipe", a-t-elle répondu, gênée, avant de voir son attachée de presse lui souffler la bonne réponse. Elle qui n'apprécie pas plus que cela qu'on lui explique ce qu'elle doit dire...

Cédrine Kerbaol est un feu follet, un esprit libre avec du caractère qui n'aime pas quand le cadre est trop rigide. Depuis ses débuts professionnels en 2021, elle a transité par quatre équipes différentes : Arkéa, Cofidis, Ceratizit et donc EF Education-Oatly. Pas question pour elle de s'installer dans une zone de confort. La Brestoise a des fourmis dans les jambes, même quand elle n'est pas sur son vélo. Elle sillonne la France en conduisant son van aménagé depuis des années. Elle s'en servait parfois pour s'adonner à ses propres stages altitudes quand ses anciennes équipes n'avaient pas les moyens pour. "Tant qu'il roule, on va le garder", nous a-t-elle glissé au téléphone alors qu'elle se rendait aux championnats de France dans ce même van.

"Je suis là pour en mettre partout"

"Cédrine vit vraiment la vie. Elle est un peu folle sur les bords, elle aime plein de choses, a une mentalité un peu freestyle", résume pour L'Equipe sa meilleure amie dans le peloton, Célia Le Mouël, au départ du Tour sous les couleurs de Ceratizit. "Entre nous, on s'appelle les 'CéCé nature-peinture'. On a toujours été comme ça, pas très matérialistes. Quand on était gosses, on courait dans les champs de fleurs à chercher des animaux. On reste authentiques, fidèles à nous-mêmes", revendique Kerbaol.

"Cédrine a besoin d'espace pour s'exprimer. C'est ça qui la rend meilleure. On est heureux dans l'équipe de la laisser être elle-même plutôt que d'essayer de la faire rentrer dans une case", développe Carmen Small. La rencontre est parfaite entre la Française et sa nouvelle équipe, connue pour valoriser les personnalités atypiques. "Ils me laissent être créative et veulent qu'on se développe en tant qu'humains", apprécie la Française. 

Comment trouver la bonne posture et le bon équilibre dans un sport où les athlètes sont téléguidées via les oreillettes, surtout quand il s'agit d'une coureuse parfois impatiente ? "On lui dit : 'Ne montre pas aux autres à quel point tu es forte'. On prend du recul. Je ne suis pas sa mère évidemment. L'idée, c'est de lui laisser faire les erreurs qu'elle doit commettre pour continuer à progresser, et de mettre quelques limites autour", raconte sa directrice sportive. Pour le moment, sur le Tour de France femmes, toutes ses prises d'initiatives ont toujours été récompensées. "Moi je suis là pour prendre du plaisir, en mettre partout", a-t-elle rappelé à la veille du départ. Nul doute que la fête prévue en Bretagne la motivera encore plus à rester fidèle à ses principes.

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