Mondial 2025 : l'internationalisation très relative du handball pose des questions sur son avenir aux Jeux olympiques
/2023/06/20/6491811e45f62_hortenserond.png)
/2025/01/30/img-8965-1-679ba5887b151294819216.jpg)
Avec une finale Croatie-Danemark et une petite finale France-Portugal, les médaillés du Mondial de hand masculin seront 100% européens, pour la 28e fois en 29 éditions.
Le Brésil et l’Egypte, qualifiés en quarts de finale, ne sont pas passés loin de bousculer la hiérarchie. Mais une nouvelle fois, les médaillés du championnat du monde de handball masculin 2025 seront tous européens, dimanche 2 février. La Russie étant rattachée à la fédération européenne, le Qatar reste, à ce jour, le seul pays non-européen à être monté sur le podium, en 2015 à domicile, mais avec une équipe très majoritairement composée de joueurs naturalisés. Preuve que l’internationalisation du handball est loin d’être aboutie, malgré la surprise de la présence du Portugal dans le dernier carré cette année. Un problème qui pourrait inciter certains à envisager de mettre ce sport de côté aux Jeux olympiques, qui visent l'universalité et l'attractivité la plus large.
A Porec, sur la côte Adriatique, la pluie tombe drue. Les commerces du centre-ville sont fermés et les matchs de classement du Mondial de hand sont la seule animation aux environs. Mais seulement une centaine de personnes s'est déplacée au gymnase Zatika, qui peut en accueillir plus de 3 000. Aucun journaliste n’est présent pour couvrir cette "Coupe du Président", qui voit s’opposer les équipes éliminées lors du tour préliminaire du Mondial, afin d’établir un classement pour les dernières places. Ce jour-là, les Japonais triomphent de Cuba (32-23) et les Etats-Unis s’imposent contre le Bahreïn (30-28).
/2025/01/30/dsc-0167-679ba67d2c21e686515610.jpg)
"Nos joueurs ne sont pas professionnels, ils travaillent la journée et s’entraînent le soir, raconte Toni Gerona, l’entraîneur espagnol du Japon. Certains comme Ren Arase [élu homme du match contre Cuba] évoluent en championnat universitaire. Nous n’avons pas de championnat professionnel. Au Japon, nous n’avons pas la possibilité de faire régulièrement des matchs amicaux contre des nations fortes du hand, car nous sommes vraiment loin géographiquement. Au moins, cette Coupe du président nous permet de jouer quatre matchs supplémentaires et donne de l’expérience à nos jeunes joueurs".
La Guinée, portée par son sélectionneur français Kevin Decaux, également directeur d’un centre socio-culturel dans le Val d’Oise, dispute aussi cette compétition. "J’ai potentiellement des joueurs intéressants, mais je mise surtout sur la cohésion, explique-t-il. Il nous manque des moyens et surtout de la rigueur, parce que j’ai des joueurs qui ne sont pas qualifiés car l’administratif n’a pas été fait correctement".
"Quand je suis arrivé en Guinée, il n’y avait que des terrains extérieurs, le premier gymnase a été construit en 2016 avec les moyens du bord. Je pense qu’on a la plus mauvaise salle d’Afrique de l’Ouest. On n’a eu que quatre jours de stage à l’arrache en région parisienne, on ne peut pas faire de miracles."
Kevin Decaux, sélectionneur de l'équipe guinéenne de handballà franceinfo: sport
En Afrique, seule l’Egypte fait figure d’exception, se hissant régulièrement en phase finale des grandes compétitions, comme l’Angola chez les femmes. Le fait que le président de la fédération internationale depuis 2000, Hassan Moustafa, soit égyptien, n’y est pas pour rien. Et l’exportation des joueurs égyptiens dans les championnats européens joue aussi. "Évidemment, si on veut augmenter le niveau, il faut soit que les joueurs aillent dans les meilleurs championnats, soit que des joueurs de ces bons championnats renforcent nos sélections. C’est ce qu’a fait l’Egypte", illustre Kévin Decaux. Lui s’attache tout de même, avec l’aide d’un adjoint sur le sol guinéen, à intégrer des joueurs locaux dans son équipe pour y développer ce sport.
Les Etats-Unis partent de loin, mais progressent à trois ans des Jeux
Pour tenter d’internationaliser un peu plus sa discipline, la fédération internationale a ouvert le Mondial à davantage d’équipes : 32 au lieu de 24, depuis 2019. Avec des résultats assez mitigés, puisque les équipes non-européennes qui ont réussi à se hisser au tour principal ont terminé aux dernières places, à l’exception de l'Egypte et du Brésil, qui est aussi le seul pays non-européen avec la Corée du Sud à avoir remporté un Mondial féminin."Il serait plus intéressant que l’IHF et les fédérations les plus puissantes collaborent pour œuvrer au développement et à la structuration du hand dans les pays où il reste confidentiel, lance le sélectionneur français Guillaume Gille. On peut faire un Mondial à 64 aussi, mais est-ce que ça va véritablement changer le poids du handball dans les pays concernés ? Je ne crois pas."
La Fédération française de handball a, elle, signé une convention avec l’équipe féminine des Etats-Unis, déjà accueillie à la Maison du handball, à Créteil, pour des stages, alors que se profilent les Jeux de Los Angeles en 2028 où les USA participeront aux tournois de hand masculin et féminin en tant que pays hôte. Du côté de l’équipe masculine, des progrès ont été constatés ces dernières années, et notamment durant ce Mondial où les Américains ont remporté trois matchs lors de la Coupe du président et terminent 26es sur 32, avec un effectif très largement composé de joueurs disposant d’une double nationalité européenne.
"Le temps qu’un vrai développement se mette en place sur du long terme, avec des jeunes, on a la chance d’avoir un vivier énorme d’expatriés, explique Aboubakar Fofana, arrière-gauche franco-américain qui évolue à Villeurbanne en deuxième division. On a réussi à faire une équipe pour accélérer le processus et emmener avec nous les rares Américains qui ont appris le jeu tard."
/2025/01/30/dsc-0171-679ba6d9206f8798866042.jpg)
"Nous avons eu quelques problèmes pour avoir un effectif complet sur ce Mondial, souligne tout de même Robert Hedin, le sélectionneur suédois de cette équipe américaine. Nous n’avons que deux joueurs qui jouent aux Etats-Unis et trois jeunes joueurs qui ne jouent pas beaucoup, mais cela fait partie de leur développement. Aux Etats-Unis, il n’y a qu’une quinzaine de clubs, qui pratiquent une ou deux fois par semaine, avec des gens de 15 à 55 ans. Ce n’est pas beaucoup".
"Le niveau entre nos compétitions continentales et le Mondial n’a tellement rien à voir que, dès qu’on le peut, on ne joue pas les compétitions continentales. On préfère plutôt jouer des matchs amicaux en Europe."
Aboubakar Fofana, arrière gauche des Etats-Unisà franceinfo: sport
Invités sur ce Mondial par l’IHF, les Américains progressent, grâce notamment à des matchs amicaux disputés contre de grandes nations européennes comme la France (défaite 38-29). "Il y a quelques années, les adversaires ne se préparaient pas aussi bien avant de nous rencontrer et alignaient souvent leurs remplaçants. L’objectif était juste de faire bonne figure aux Jeux olympiques, mais je pense que désormais, on peut viser une ou deux victoires dans la poule, et pourquoi pas en sortir", assure Aboubakar Fofana.
Mais le public américain se mobilisera-t-il pour soutenir son équipe aux JO dans un sport si méconnu ? "Je ne me fais pas de souci là-dessus. Lors des JO d’Atlanta, on a réussi à remplir une salle de 35 000 places", rappelle Robert Hedin. Pour promouvoir un peu plus le handball au pays de l’Oncle Sam, des investisseurs danois ont annoncé, fin janvier, la création d’une ligue professionnelle d’ici 2028 avec des ambassadeurs comme Mikkel Hansen, Nikola Karabatic et Stine Oftedal. Un tournoi de promotion est également prévu en 2026 à Las Vegas, où des clubs comme le PSG et le Barca sont annoncés. De quoi réjouir Aboubakar Fofana, qui prévient : "De toute façon, si le hand ne se mondialise pas, il se ferme la porte aux JO".
Le hand aux JO d’hiver ?
Cette inquiétude de voir le hand disparaître du programme olympique par manque d’universalité, Philippe Bana, le président de la Fédération française, la balayait lors d’un entretien avec franceinfo: sport en août dernier. "Elle a disparu entre Rio 2016 et Tokyo 2020. Oui, le hand était redescendu dans le système de classement des disciplines du CIO, mais depuis, les critères ont un peu évolué, avec la médiatisation et le taux d’écoute de la jeunesse qui sont plus importants. Là-dessus le handball est très fort", assurait-il. Tout en concédant que les futurs Jeux olympiques à Los Angeles et Brisbane (Australie), pays nettement moins intéressés par le hand, avec en plus un fort décalage horaire pour le public européen, étaient "un sujet".
D’autant que plus récemment, fin décembre 2024, Sebastian Coe, président de la fédération internationale d’athlétisme et candidat à la présidence du CIO, assurait dans une interview à la BBC : "Le changement climatique va fondamentalement nous obliger à réfléchir au calendrier mondial des compétitions [...] Certaines personnes ont même suggéré que nous devrions peut-être examiner l’équilibre entre les Jeux d’hiver et d’été. Vous avez des sites où certains sports se déroulent en salle. Vous pourriez, en théorie, les déplacer à une autre période de l’année, peut-être aux Jeux d’hiver".
Handball aux Jeux d’hiver… et beach-handball aux Jeux d’été ? Une démonstration de ce sport a été organisée pendant les Jeux olympiques de Paris à la Maison du handball, sous les yeux de membres du CIO, et alors que l’IHF pousse pour inscrire ce sport au programme olympique. "Le hand représente environ 400 athlètes sur 15 jours, ce qui est lourd pour le CIO, qui préfère un petit programme de trois jours, avec moins d’athlètes", concède Philippe Bana. Le président de la Fédération française souhaite tout de même que ces deux sports puissent cohabiter lors des Jeux d’été. Sera-t-il entendu ?
À regarder
-
Le Maire, Lescure... La liste des 18 ministres du gouvernement Lecornu
-
Nouveau gouvernement : des reconductions et des retours
-
Qui sont "les guetteuses", ces femmes en première ligne lors de l'attaque du 7 octobre ?
-
Des satellites pour protéger les hérissons, en voie d'extinction
-
Animaux de compagnie : des crèches pour chiens
-
Toilettes : toujours plus innovantes
-
Tempête Amy : deux morts dans les intempéries
-
Guerre à Gaza : le Hamas se dit prêt à libérer les otages
-
Le premier distributeur de frites belges
-
Boucheries, la nouvelle cible des voleurs
-
Deux morts dans une fusillade à Nice
-
Apnée du sommeil : quels risques pour la santé
-
Nouveau gouvernement : le coup de poker de S. Lecornu
-
"Food express", l'expo sur les wagons-bar
-
Ce lycée a un cours unique en France
-
Plus de 49.3, ça veut dire quoi ?
-
Dorothée : le retour gagnant de l'idole des jeunes
-
Mairie de Paris : la guerre des notes de frais
-
Conflit Israël-Palestine : "Une confédération permettra de parvenir à une solution à deux Etats"
-
Des règles plus strictes pour les virements bancaires
-
Le plastique a-t-il vraiment disparu des cantines ?
-
Loto : il oublie de réclamer ses 15 millions d'euros
-
La police de l’immigration au Superbowl de Bad Bunny ?
-
Pizza au matcha : tu valides ?
-
Polémique : Shein ouvre des magasins en France
-
Les Français sont-ils trop propres ?
-
Attaque terroriste : deux morts devant une synagogue à Manchester
-
Pour votre santé, seulement 14g de viande rouge par jour.
-
Ligotés et dénudés : enquête sur un bizutage à Toulouse
-
Boutiques de luxe : nouveau braquage à la voiture bélier
Commentaires
Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.
Déjà un compte ? Se connecter