"Le premier jour d'inscription, on a eu jusqu'à 2 000 requêtes par seconde"... Pourquoi les courses à pied sont désormais complètes des mois à l'avance
A l'image du semi-marathon de Paris, dimanche, complet depuis le 27 septembre, de plus en plus de coureurs s'inscrivent alors que le nombre de courses reste inférieur à son niveau d’avant la crise Covid en France.
Décrocher un dossard pour un marathon serait-il en passe de devenir plus difficile que d'empocher un billet pour le prochain concert parisien de Beyoncé ? De Paris à Lille, en passant par Annecy ou Laval, un même constat s'impose : la légende du coureur qui s'inscrit le matin de sa course n'est pas loin d'avoir vécu. Le semi-marathon de Paris, qui se court dimanche 9 mars, affiche complet depuis le 27 septembre. "C'est la folie cette année. L'an passé, il y avait encore des dossards à la vente une ou deux semaines avant la course", souffle Louise, abasourdie par l'engouement pour l'anonyme semi-marathon de Brière (Loire-Atlantique) dont les 2 200 dossards se sont arrachés en vingt-quatre heures.
Les 1 000 places pour la Passagère – une course de 14 kilomètres à Saint-Malo – se sont, elles, vendues en... six heures. "C'est la première fois qu'on nous demande en amont le jour de l'ouverture des inscriptions et même l'heure", remarque Marie Poligné, responsable événements sportifs du groupe Roullier, organisateur de la course.
En plus de devoir dégainer rapidement la carte bleue, les coureurs apprennent aussi à anticiper et faire fi d'éventuels futurs pépins physiques. Programmé le 13 avril, le marathon de Paris affichait complet dès le 7 octobre, soit deux mois plus que tôt que l'année précédente, avec 56 000 participants attendus. À Lille, les 10 000 dossards du semi-marathon avaient trouvé preneurs le 18 novembre, près de quatre mois avant l'événement. "Je crois que cette année, il faut s'inscrire aux courses et réfléchir ensuite", lâche Louise, inscrite avec un an d'avance au marathon de Valence (Espagne).
8 millions de pratiquants réguliers, un record
Depuis la pandémie de Covid, la ferveur pour la course à pied – de plus en plus à travers le trail, mais encore beaucoup sur bitume – a trouvé un nouveau souffle. Plus d'un million de Français a été contaminé par le virus de la course durant les confinements. Si certains ont, depuis, abandonné, au total 12,4 millions de Français avaient couru au moins une fois en 2023, dont 8 millions au moins une fois par semaine sur l'année (pratique régulière), selon les chiffres de l'Observatoire du running, piloté par l'Union Sport & Cycle. En 2017, seuls 5 millions de Français étaient comptabilisés comme pratiquants réguliers.
La Fédération française d'athlétisme profite aussi de cet engouement : en janvier 2025, elle a enregistré un record historique de licenciés (321 000), porté par la progression de ses licenciés "running" (+14,5% en un an).
Avec près d'un quart des coureurs qui déclarent être motivés par la "dimension compétitive" de ce sport, la hausse du nombre de pratiquants entraîne mécaniquement des pelotons plus garnis lors des courses officielles — pourcentage qui donne aussi une idée du potentiel existant. Et s'ils se sont montrés prudents en 2022, par crainte de voir leur course annulée, les runners ont fait nettement leur retour sur les lignes de départ depuis 2023.
Une demande supérieure à l'offre
Le nombre de "finishers" (arrivants) a ainsi explosé en 2024 avec un record historique de 2,950 millions de résultats enregistrés, en hausse de 27% sur un an, selon le baromètre Finishers FFA, mené par l'Union Sport & Cycle. Datant de 2019, le précédent record s'élevait à 2,680 millions arrivants. Problème : le nombre d'événements n'a pas retrouvé son niveau d'avant-Covid.
"Les courses sont donc pleines car le nombre d'organisations augmente mais trop doucement par rapport aux résultats enregistrés."
Adrien Tarenne, responsable du développement des pratiques à la FFAà franceinfo: sport
En 2024, 11 334 courses ont ainsi été organisées en France d'après le baromètre Finishers FFA, contre plus de 12 000 en 2019. Avec les difficultés économiques liées aux annulations, qui se sont ajoutées aux exigences de l'antiterrorisme, certaines courses n'ont pas survécu à la pandémie. "On a en tête les images des grandes courses, qui tirent le marché vers le haut. Mais la réalité du terrain, ce sont de petites organisations, car on a une moyenne de 260 finishers par course, rappelle Adrien Tarenne. Après le Covid, certaines ne se sont jamais relancées. Il existe aujourd'hui un décalage entre l'offre et la demande."
Trails et courses rapides
"Selon moi, deux types de courses se remplissent plus vite qu'avant. D'un côté, celles dans les grandes villes, avec un parcours rapide. De l'autre, les événements nature et découverte, comme les trails", observe Jean-Pierre Watelle, directeur de la ligue des Hauts-de-France athlétisme, entité organisatrice du semi-marathon de Lille notamment.
Parmi les points communs des événements qui font le plein très rapidement : une communication léchée et des conditions de course soignées, où le nombre de participants est volontairement limité pour éviter d'inconfortables embouteillages. "On communique mieux qu'avant. Les réseaux sociaux nous aident beaucoup. On touche désormais des milliers de personnes", illustre le Nordiste, qui pointe un cercle vertueux : "Le monde attire le monde".
Clément Moreau, directeur de l'Ultra Marin (des courses de 30 à 175 kilomètres), avance lui aussi comme explication "la mode du trail" pour justifier l'engouement inédit autour de la vente des 10 000 dossards de l'édition 2025 de l'événement morbihannais. "Le premier jour d'inscription, on a eu jusqu'à 2 000 requêtes par seconde, contre 350 par seconde l'an passé !", raconte Clément Moreau.
"Dans le trail, les petites courses ne marchent pas plus qu'avant, mais les grosses courses sont très en vogue. On voit bien que courir un marathon est devenu banal."
Clément Moreau, directeur de l'Ultra Marinà franceinfo: sport
Signe du regain en cours, plus de 500 courses supplémentaires ont été organisées en France en 2024, par rapport à 2023. Le développement est porté très largement par le trail. Le territoire comptabilise désormais davantage de courses de trail que sur route, soit une inversion par rapport à 2018. "Dans notre région, 98% des courses sont des trails. Les petites courses sur route ont disparu, donc les coureurs se rabattent sur les événements de taille moyenne qui continuent d'exister", illustre Léo Nocaudie, du marathon d'Annecy, où les quatre distances du week-end de courses (du 5 km au marathon) affichent complet les 26 et 27 avril.
Parmi les autres facteurs expliquant cette frénésie autour des dossards, le spécialiste running de la FFA et les organisateurs pointent l'effet motivationnel des Jeux olympiques de Paris. Dernier facilitateur : le remplacement, depuis avril 2024, du contraignant certificat médical obligatoire par un questionnaire de santé à remplir en ligne (parcours de prévention santé, PPS). De quoi pouvoir se lancer un défi en seulement quelques clics.
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