: Reportage Mondiaux d’athlétisme : "Je ne suis pas venu là pour être spectateur"... Au cœur de la première journée galère du décathlonien Makenson Gletty
Le Français, médaillé de bronze au décathlon aux Europe l’an passé, est entré en lice samedi pour ses cinq premières épreuves. Franceinfo: sport a suivi sa journée auprès de son entraîneur Rudy Bourguignon.
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Ciel nuageux, légère brise, 9h28 à l'horloge, Makenson Gletty s'installe dans les blocs de départ pour la première de ses cinq épreuves du jour : le 100 m. Les tribunes du stade national du Japon n'ont pas encore fait le plein à Tokyo, samedi 20 septembre, en ce début de matinée du dernier week-end des championnats du monde d'athlétisme. Le décathlonien français a, lui, ouvert les yeux à 5 heures, et il ne devrait pas poser sa tête sur son oreiller avant tard dans la nuit. Dimanche, un programme identique l'attend.
"On a pris la navette depuis l'hôtel à 6 heures et il s'est échauffé de 7h30 à 8h30", détaille son entraîneur Rudy Bourguignon. Exercices de mobilité pour réveiller le corps, footing, gammes, accélération et enfin départs depuis les starting-blocks. Avec des épreuves qui mêlent vitesse (100 m, saut en longueur, 400 m), agilité et explosivité (saut en hauteur), et enfin puissance (lancer du poids), le corps doit pouvoir supporter des contraintes bien différentes. L'esprit, lui, doit aussi être prêt à basculer très vite.
Trois épreuves en moins de trois heures
Avec un chrono en 10"92 sur le 100 m, Makenson Gletty affiche une moue déçue. Son entraîneur l'a trouvé "crispé", sans que cela ne soit surprenant : le médaillé de bronze des derniers championnats d'Europe a repris l'entraînement au printemps, après avoir été opéré du tendon d'Achille droit. "On va débriefer rapidement le 100 m. Mais maintenant, il faut que cela reste derrière lui", indique le coach, qui entraîne "Mak" depuis trois saisons.
Pas le temps de traîner, Rudy Bourguignon parcourt les coursives du stade pour s'installer en face, au pied du sautoir en longueur. Le battement de quarante-cinq minutes ne permet pas un passage à la "chambre de repos", située à proximité de la piste et accessible aux athlètes, coachs et staff médicaux. Les échanges entre entraîneur et entraîné sont donc nécessairement succincts, avec l'athlète posté au plus proche de la barrière devançant les photographes et le coach au plus bas des tribunes.
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"On a une gestuelle qui commence à être rodée. On n'est jamais dans de longs discours car il ne peut pas assimiler trop d'informations. Je lui donne maximum une intention", pose Rudy Bourguignon, tablette à la main pour filmer les courses d'élan de son élève. En complément, un membre de la cellule d'optimisation de la performance de la Fédération française d'athlétisme est positionné en hauteur pour filmer d'autres plans qui lui seront envoyés.
Rester actif dans les temps morts
"Je reculerais ta marque d'un demi-pied, voire de trois-quart. Tu veux en refaire un ? Mais récupère d'abord un bon cinq minutes." Au-delà des conseils techniques, Rudy Bourguignon joue aussi le maître des horloges en rappelant à Makenson Gletty le temps qui lui reste. Gêné par une douleur au tendon d'Achille droit, le Tricolore file dans les couloirs se faire poser un strap, et perd de précieuses minutes dans son échauffement pour la longueur.
La prise de marques est chaotique. Les deux premiers essais mordus. Entre chaque, t-shirt et jogging enfilés, le décathlonien fait les 100 pas, parfois quelques gammes. "Nerveusement il ne faut pas qu'il s'endorme." Le dernier saut est validé, mais avec une marque (6,98 m) loin de ses espérances.
Le sociétaire du club Nice Côte d'Azur se tape la tête dans la barrière. Il reste prostré et lâche quelques jurons : "Ça me fait chier". Ce à quoi lui répond son coach qu'il est "encore en vie" et qu'il reste huit épreuves. Celle du lancer du poids n'apporte pas beaucoup plus de satisfaction (15,31 m). Alors le coach compte sur les six heures d'interruption entre la session du matin et celle du soir pour remobiliser son athlète : "Il y a encore des choses à aller chercher".
Pause déjeuner en ville
Avec un hôtel trop loin du stade (une dizaine de kilomètres), le repos se prendra sur place, dans la "chambre de repos" où sont alignés des lits de camping. Au programme : un débriefing, un repas, une sieste de trente minutes, des soins et du temps seul pour discuter avec les autres athlètes. "Là, il va avoir du mal à extérioriser pendant cinq minutes, décrit l'entraîneur, voyant Makenson Gletty figé sur le banc à côté de l'aire de lancer. Mais on va verbaliser tout ça dans la chambre de repos."
"Je pensais vraiment être prêt. Ce sont des performances suprenantes auxquelles je ne m'attendais pas, témoignait de son côté le décathlonien, à l'issue de sa première journée. J'essayais de comprendre pourquoi je suis autant à la rue." Pour tenter d'aérer l'esprit du Tricolore et le faire basculer dans une dynamique positive, décision est prise de sortir du stade pour le déjeuner.
"C'était une pause longue mais nécessaire. Elle a eu le mérite de casser l'enchaînement des épreuves qui ont apporté beaucoup de frustration car on sent qu'il est capable de mieux."
Rudy Bourguignon, entraîneur de Makenson Glettyà franceinfo: sport
Avant de rejoindre le stade pour l'échauffement du saut en hauteur, le Français reprend sa routine de l'aube avec des exercices de mobilité. Sur la piste, un nouvelle fois, l'échauffement est décousu. Les courses irrégulières. "C'est une journée très dure à coacher. Je vois quelque chose, je lui donne un conseil. Il fait quelque chose de totalement différent, je donne un autre conseil" , souffle Rudy Bourguignon, impuissant.
La salle de repos, base de vie des décathloniens
Car au-delà de la gestion de son physique – à travers une attention à l'alimentation, à l'hydratation, puis aux soins demandés aux kinés et médecins – le décathlonien doit aussi gérer sa tête sur une très longue durée, avec des scénarios qui ne cessent d'évoluer. "C'est celui qui va en vouloir le plus qui va remonter, allez Mak !", tonne le coach, avant le premier essai à la hauteur. Makenson Gletty s'arrête finalement à 1,96 m. Les mines se renfrognent encore un peu plus.
"Dans dix minutes, tu prends ton truc", rappelle Rudy Bourguignon, mimant le geste de s'alimenter, voyant Makenson Gletty prendre la direction de la salle de repos. Il a deux heures devant lui pour récupérer avant l'ultime effort de la journée : un 400 m, épreuve connue pour la souffrance qu'elle engendre. "Il était bien avant de partir. Il n'y avait pas de problème. Mais là, il n'y était pas. Ce n'est pas du tout le reflet de son entraînement", soupire Rudy Bourguignon, après avoir vu le Tricolore couper la ligne en 50"49.
"Je n'avais pas envie de courir le 400 m parce que je savais que je n'allais pas faire le temps que j'espérais faire. Depuis le 100 m c'est comme ça."
Makenson Glettyen zone mixte
L'athlète pointe son manque de préparation physique et technique. 23 heures s'affiche dans le stade, il quitte la zone réservée aux journalistes. La journée est encore loin d'être finie. Après être passés dans les mains du kiné, il sera l'heure de diner puis de plonger dans un bain froid, avant cette fois de retrouver son lit. La seconde journée, le décathlonien, qui pointait alors en 15e position, n'arrivait pas encore à s'y projeter : "Il faut que je redescende, que je voie avec mon staff plus posément où on en est. Mais je ne suis pas venu là pour être spectateur et là, ça m'énerve." La nuit portera-t-elle conseil ?
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