Libération des camps : Guy, le bébé de Ravensbrück qui a survécu grâce à la "solidarité" entre les déportées il y a 80 ans
Il y a 80 ans, le 30 avril 1945, le camp de concentration de Ravensbrück, en Allemagne, était libéré. Témoignage de Denis Poirot, qui fait partie des trois bébés français ayant survécu sur les 23 qui sont nés dans le camp.
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"C'est ma grand-mère qui a commencé à me dire que j'étais né dans un drôle de truc", explique Guy Poirot, retraité de 80 ans qui habite à Nancy. Ce "drôle de truc", c'est le camp de Ravensbrück, le plus grand camp de concentration pour femmes, à 80 kilomètres au nord de Berlin, en Allemagne, et dont on fête mercredi 30 avril les 80 ans de la libération. Plus de 120 000 femmes et enfants ont été déportés pendant la Seconde Guerre mondiale.
Sa grand-mère lui a aussi dit qu'il avait "eu de la chance". Car 500 femmes y ont accouché, dont 23 Françaises, mais seuls trois de ces bébés français en ont sorti vivants : Guy Poirot ainsi que Sylvie Aylmer, née en mars 1945 et Jean-Claude Passerat né en novembre 1944.
Mâcher des épluchures pour les donner aux nourrissons
La mère de Guy, Pierrette, est âgée de 26 ans à l'époque. Elle est alors une jeune cultivatrice à Benney en Meurthe-et-Moselle. Arrêtée puis déportée à l'été 1944 après avoir hébergé des prisonniers en fuite et des maquisards, elle ne sait pas encore qu'elle est enceinte. Sa ferme est dynamitée, ses deux chiens et des chevaux abattus. Elle est conduite à Nancy au siège de la Gestapo puis déportée dans un fourgon à bestiaux vers Ravensbrück, où elle travaille à la soudure, notamment pour l'industriel Siemens. Comme elle, 9 000 Françaises ont été déportées dans ce camp de concentration.
Le 11 mars 1945, protégée par les autres femmes du camp, Pierrette accouche et Guy vit ses premières semaines dans des conditions inhumaines. Alors "se met en œuvre une solidarité", "une protection" entre les femmes du camp, explique Guy. Par exemple, "celles qui travaillaient au textile ont essayé de reconstituer des petites choses pour qu'elle ait un peu plus chaud", dit-il. Certaines ont "découpé des gants en caoutchouc pour en faire des tétines", tandis que d'autres "mâchaient de l'herbe ou des espèces d'épluchures pour que les petits puissent l'avaler après, avec l'eau qu'il y avait".
En 1944, débordé par les accouchements, le camp se dote d'une "Kinderzimmer", une pièce dédiée aux nourrissons où les bébés s'entassent parfois à quarante dans des conditions totalement insalubres : pas d'hygiène, des rats qui viennent mordre les bébés, pas de lait.
"Un physique et un moral d'acier"
"Je constate que la plupart des femmes qui ont eu la chance de revenir avaient un physique et un moral d'acier", poursuit Guy. Fin avril, quelques jours avant la libération du camp, sa mère et 600 Françaises sont récupérées par la Croix-Rouge suédoise. Guy, emmailloté est caché dans un sac de toile pour sortir du camp. Sa mère ne lui en parlera réellement qu'à la fin de sa vie à l'âge 95 ans, dans les années 2010. Guy, 80 ans aujourd'hui, lui s'est construit en reconstituant les pièces du puzzle de son côté.
"Ravensbrück m'a toujours donné l'esprit rebelle", notamment dans son travail en tant que formateur de fonctionnaires, d'après Guy. "Ma manière de gérer, c'était de dire à tout fonctionnaire qu'il avait le droit de désobéir", dit-il. Et le devoir de parler : Guy se rend dans les écoles désormais où il répète son histoire, inlassablement, pour éviter qu'elle ne se reproduise.
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