Les sites Pornhub, Youporn et Redtube vont bloquer l'accès aux utilisateurs français à partir de mercredi, en réaction à la loi sur la vérification d'âge

La maison mère de ces sites pour adultes, Aylo, basée à Chypre, dénonce l'obligation faite par le gouvernement français de mettre en place des systèmes de vérification d'âge. A la place des vidéos, les plateformes du groupe afficheront un message contre cette loi.

Article rédigé par Luc Chagnon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le logo de Pornhub, le site pornographique le plus fréquenté au monde, sur différents écrans. (NIKOLAS KOKOVLIS / NURPHOTO / AFP)
Le logo de Pornhub, le site pornographique le plus fréquenté au monde, sur différents écrans. (NIKOLAS KOKOVLIS / NURPHOTO / AFP)

Le géant des vidéos pornographiques Aylo, propriétaire des sites Pornhub, Youporn ou encore Redtube, a annoncé, mardi 3 juin lors d'une conférence de presse, que leurs contenus ne seront plus accessibles aux internautes depuis la France à partir de mercredi après-midi. Le groupe chypriote justifie sa décision par le contrôle de l'âge des utilisateurs, rendu obligatoire par le gouvernement français.

"Aylo est très pro-vérification d'âge", soutient Solomon Friedman, vice-président du fonds d'investissement Ethical Capital Partners, propriétaire d'Aylo, mais il juge la législation française "symbolique, inutile et dangereuse pour la vie privée", "ce que leur gouvernement refuse de leur dire". Ethical Capital Partners, qui revendique 7 millions de visites quotidiennes depuis la France sur les sites d'Aylo, affirme que la vérification d'âge en masse "n'a jamais été testée auparavant à cette échelle, et crée des risques de piratage et fuite de données : c'est à l'opposé de ce qu'on nous apprend, ne pas fournir nos données personnelles en ligne".

Aylo réclame un autre mode de vérification

L'Arcom déclare, dans un communiqué de presse, prendre "acte de la décision du groupe Aylo" "Le groupe Aylo a fait le choix de se soustraire à l'impératif que constitue la protection des mineurs en suspendant l'accès à ses contenus en France y compris pour un public majeur, alors qu'il existe de nombreuses solutions techniques sur le marché permettant de vérifier l'âge des utilisateurs tout en assurant la protection de leurs données personnelles", déclare le gendarme de l'audiovisuel.

A la place des vidéos habituellement accessibles sur ces plateformes, elles vont afficher un message à destination des utilisateurs français pour expliquer leur position sur la vérification d'âge, accompagné d'une image du tableau La Liberté guidant le peuple du peintre Eugène Delacroix. Le groupe réclame une vérification d'âge au niveau de l'appareil utilisé et non pas du site web, qui "ne peut pas être contourné par un VPN", plaide Solomon Friedman, et recommande également l'utilisation de fonctionnalités de contrôle parental.

"Si Aylo préfère sortir de France que d'appliquer notre loi, libre à eux", balaie sur X la ministre déléguée à l'Intelligence artificielle et au Numérique, Clara Chappaz. "Le référentiel de l'Arcom garantit la vie privée avec le double anonymat", martèle la ministre déléguée, pour qui "mentir quand on ne veut pas respecter la loi et prendre en otage, c'est inadmissible".

L'Union européenne en embuscade

Pas moins de 17 géants du porno, établis dans l'Union européenne (UE) mais hors de France, avaient jusqu'au 7 juin pour mettre en place des techniques censées vérifier si leurs utilisateurs français sont majeurs, le simple panneau "J'ai plus de 18 ans" sur la page d'accueil n'étant plus suffisant. Les sites pour adultes établis en France et hors de l'UE sont déjà soumis à cette obligation depuis le 11 avril.

Les sites concernés ne doivent pas collecter directement les données des utilisateurs, mais passer par des intermédiaires qui fournissent une "preuve d'âge". Ils peuvent utiliser plusieurs techniques, comme l'analyse d'un document d'identité ou l'estimation d'âge à partir d'un selfie. Les sites pornographiques doivent proposer au moins une solution dite en "double anonymat" : avec celles-ci, l'entreprise qui vérifie l'âge d'un internaute ne peut pas savoir à quel site il veut accéder, grâce à des techniques de chiffrement.

Le dossier du contrôle de l'âge passe également à la vitesse supérieure au niveau européen. La Commission européenne a annoncé vendredi 30 mai qu'elle allait fournir sa propre application de vérification d'âge en juillet 2025, rapporte le Financial Times. Elle a aussi lancé des enquêtes contre quatre sites pornographiques (Pornhub, Stripchat, XNXX et XVideos) qu'elle accuse de ne pas mettre en place de mesures de vérification d'âge suffisantes au regard du droit européen.

Commentaires

Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.