Reportage "On s'est aperçu que les parents n'avaient plus forcément le pouvoir" : dans les Yvelines, ce maire instaure un couvre-feu nocturne pour les mineurs

Pour lutter contre les incivilités, le maire de Triel-sur-Seine a pris un arrêté pour soumettre les mineurs non-accompagnés à un couvre-feu. De 23h et 5h du matin, ces jeunes doivent circuler munis d'une attestation pour justifier leurs déplacements.

Article rédigé par Benjamin Illy
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un contrôle de police. (photo d'illustration) (CORENTIN GARAULT / MAXPPP)
Un contrôle de police. (photo d'illustration) (CORENTIN GARAULT / MAXPPP)

Une attestation de déplacement dérogatoire pour les mineurs durant les horaires de couvre-feu. Comme à l'époque des confinements. À Triel-sur-Seine, dans les Yvelines, les moins de 18 ans non-accompagnés sont soumis à un couvre-feu, entre 23h et 5h du matin, depuis le 4 juillet et jusqu'au 1er novembre. Pour pouvoir circuler à ces heures, les mineurs doivent disposer d'une attestation parentale.

Une mesure inédite en France. Cet arrêté a été pris par le maire de la commune de 12 000 habitants afin de lutter, selon lui, contre les incivilités et "responsabiliser" les parents. 

"23 heures, c'est un peu tôt"

S’ils sont dehors après 23h et avant 5h du matin, dans une bonne partie du territoire de la ville, sans être accompagnés de leurs parents ou d'un représentant légal, les jeunes concernés doivent, en cas de contrôle, présenter leur attestation aux policiers municipaux. Une attestation sur laquelle doit figurer nom, prénom, adresse et numéro de téléphone des parents. Il faut aussi cocher une case. Par exemple : "Déplacement ne pouvant être différés en raison du travail, d'activités associatives, ou sportives", ou encore "motif familial impérieux", voire "sortie avec un animal de compagnie". 

Dans le centre-ville, quelques parents acceptent de répondre. "J'ai une ado de 14 ans. Il y a bien sûr les responsabilités des parents et c'est une histoire d'éducation... Mais je trouve que le couvre-feu est une bonne idée", explique une maman. Une autre estime que "23 heures, c'est un peu tôt, on aurait pu pousser jusqu'à minuit". Une troisième tranche : "A 21 heures, ma fille n'est pas dehors !"

Cedric Aoun, maire sans étiquette de Triel-sur-Seine, en juillet 2025. (BENJAMIN ILLY / RADIO FRANCE)
Cedric Aoun, maire sans étiquette de Triel-sur-Seine, en juillet 2025. (BENJAMIN ILLY / RADIO FRANCE)

Au parc municipal, sur le terrain de basket, un adolescent de 13 ans explique, lui, qu'il "sort de temps en temps après 23 heures, mais juste pour aller chez un pote" et assure que ses parents sont toujours au courant. Pour autant, il estime que le couvre-feu comme l'attestation de sortie "est une mauvaise idée parce qu'on est libres de sortir quand on veut".

"Libertés fondamentales"

"J'ai eu 24 véhicules dégradés il n'y a pas si longtemps", dresse Cédric Aoun, maire sans étiquette de Triel-sur-Seine. Et de préciser : "On s'est aperçu que le comportement des mineurs changeait vis-à-vis de leurs parents et que ceux-ci n'avaient plus forcément le pouvoir. Grâce à l'attestation, les parents disent 'si tu veux ton attestation pour rentrer plus tard, il faut que tu me précises où tu vas et que je puisse te joindre en cas de contrôle'".

Et en cas de récidive, le maire n'exclut pas une verbalisation des jeunes sans attestation : "135 euros, montant forfaitaire. Ce sera les parents qui vont payer à la fin", conclut l'édile.

La section locale de la Ligue des Droits de l'Homme estime pour sa part que cet arrêté municipal "contrevient aux libertés fondamentales" des jeunes mineurs et dit "étudier les éventuelles suites à donner".

Le reportage de Benjamin Illy à Triel-sur-Seine

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