L'accueil prolongé pour les élèves des collèges de REP+ peut-il permettre de lutter efficacement contre les inégalités scolaires ?
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Emmanuel Macron a annoncé lundi que les collèges de quartiers d'éducation prioritaire accueilleront progressivement leurs élèves de 8 heures à 18 heures, notamment pour permettre une meilleure prise en charge des devoirs.
Davantage d'heures entre les murs de l'école pour favoriser la réussite scolaire. C'est, en creux, ce que le président de la République a suggéré, lundi 26 juin, lors de son déplacement à Marseille. Deux ans après le lancement de l'acte I du plan "Marseille en grand", qui a notamment permis la construction et la rénovation de 28 écoles dans la cité phocéenne, Emmanuel Macron a fait de nouvelles annonces pour l'éducation. "Dans vos quartiers, vous aurez le collège qui prendra les élèves en charge pédagogiquement de 8 heures à 18 heures", a-t-il lancé lors d'un échange avec des Marseillais.
Le chef de l'Etat n'a, pour l'heure, ni précisé si cette prolongation de la journée scolaire sera obligatoire, ni si les heures supplémentaires seront encadrées par des professeurs, des surveillants ou des intervenants extérieurs. Le chef de l'Etat n'a également pas détaillé ce qui sera proposé pour occuper les collégiens. Mais, selon les informations de France Inter, l'accueil prolongé des élèves doit leur permettre d'être aidés pour faire leurs devoirs ou pratiquer des activités de loisirs.
Une "prolongation" vécue comme une "punition" ?
Pour Emmanuel Macron, le problème est clair : "L'inégalité scolaire se crée dans ces temps où l'enfant est renvoyé chez lui". Une enquête Pisa de 2014 le confirme : tous les élèves ne sont pas égaux pour réaliser leurs devoirs. "Les élèves favorisés sont plus susceptibles que les élèves défavorisés de disposer d'un endroit adéquat pour étudier chez eux et d'avoir des parents impliqués", détaille le rapport du programme international pour le suivi des acquis des élèves. Du côté de l'accès aux loisirs, un fossé existe aussi. Exemple avec le sport : "90% des enfants de cadres et de chefs d'entreprise" pratiquent une activité sportive "contre respectivement 73% et 77% des enfants d'inactifs ou d'ouvriers non qualifiés", illustre l'édition 2020 du portrait social de la France, mené par l'Insee.
En concentrant au maximum les apprentissages ainsi que l'accès aux loisirs au sein de l'école, Emmanuel Macron souhaite palier les inégalités scolaires qu'il considère issues des inégalités sociales. "L'idée d'internaliser est bonne, car plus l'école externalise, moins elle joue son rôle. Mais le risque, si cela est obligatoire, est que cette prolongation du temps scolaire soit vécue comme une punition par des élèves qui perçoivent déjà l'école comme une contrainte", suggère à franceinfo Patrick Rayou, sociologue et professeur émérite en sciences de l'éducation à l'université Paris 8. D'autant que le dispositif "Devoirs faits", lancé en 2017 par le ministère de l'Education nationale, propose déjà aux élèves une aide aux exercices dans tous les collèges. En 2021-2022, un collégien sur deux en REP+ a suivi ces ateliers selon le ministère.
Des inégalités scolaires multifactorielles
Pour Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, "les collégiens seront épuisés par des journées de 10 heures et les apprentissages de fin de semaine pénalisés". La représentante syndicale estime par ailleurs auprès de franceinfo que les inégalités scolaires sont multifactorielles, et parfois le fait de l'école elle-même. "Le manque de mixité sociale est une situation très problématique dans les établissements REP+. De manière générale, le ministère ne nous donne pas les moyens de bien accompagner les élèves en salle de classe, entre les suppressions de postes et l'augmentation du nombre d'élèves", souligne Sophie Vénétitay.
"Les académies de Versailles et de Créteil, qui concentrent le plus d'établissements prioritaires, sont celles où l'on a le plus de mal à recruter... Or, s'il n'est pas possible d'assurer les cours dans ces secteurs, l'école provoque, elle aussi, des inégalités", ajoute auprès de franceinfo Jérôme Fournier, secrétaire national du SE-Unsa. En 2018-2019, dans le département de Seine-Saint-Denis, le plus pauvre de l'Hexagone, une enquête de la FCPE 93 estimait à 20% le nombre d'heures de cours perdues par les élèves, relate France 3.
"Plus de questions que de réponses"
Par qui sera assuré l'accueil élargi des élèves dans ces collèges prioritaires ? "L'annonce d'Emmanuel Macron pose plus de questions que de réponses", juge Sophie Vénétitay. Alors que le "pacte" enseignant (des missions supplémentaires permettant d'obtenir une prime) a déjà suscité de nombreuses réticences en avril, les syndicats craignent une nouvelle augmentation du temps de travail des professeurs.
Avant même "Marseille en grand", le collège Auguste Renoir a déjà permis aux élèves de rester dans l'établissement une fois les cours terminés. "On propose des activités sportives, du jardinage, du tutorat pour nos anciens élèves... Mais cela n'est pas pris en charge par les profs. C'est grâce au financement des cités éducatives et à nos partenariats avec des associations que l'on peut développer ce genre de choses", explique à franceinfo la proviseure, Anne-Claude Aimé. Reste désormais au gouvernement à trancher et détailler la mise en œuvre de ce prolongement du temps scolaire.
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