: Enquête franceinfo "On s'est fait avoir" : déçus, des parents retirent leurs enfants d'écoles Montessori
La méthode Montessori, pédagogie très à la mode qui séduit de plus en plus de familles, est pratiquée en France dans plus de 200 écoles privées hors contrat. Un succès grandissant mais qui déçoit aussi certaines familles.
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Elles se multiplient en France à une vitesse folle : les écoles Montessori, ces établissements privés et hors contrat pour la plupart, séduisent pour leur pédagogie d’enseignement alternative. On en compterait au moins 200 en France, mais certaines familles accusent leurs écoles d'en avoir dévoyé la méthode, et ont décidé de retirer leurs enfants de ces établissements. Ce n'est pas à la pédagogie Montessori qu'ils en veulent, mais à la façon dont ces écoles l'ont appliquée. Tous font le même constat : c'est compliqué pour une famille d'être fixée sur la qualité d'une école Montessori.
Une atmosphère de cour de récréation permanente
C'est le cas de Magali et Ariane (le second prénom a été modifié), deux mères de famille parisiennes. Quand une école Montessori a ouvert à la rentrée dernière dans leur quartier, elles y ont inscrit leurs petits garçons de trois ans. Mais au bout de quelques mois, ça a été la douche froide : pas assez de cadre, de limites. À les entendre, c’était une atmosphère de cour de récréation permanente. Jusqu'à l'évènement de trop, quand des enfants décrivent les comportements préoccupants d'un camarade vis-à-vis d'eux, des attouchements selon ces mamans.
Elles reprochent à la directrice de ne pas avoir su gérer la crise, faute d'expérience, de formation, de compétence : "Les enfants n’ont pas été encadrés, et donc ça a laissé place à un débordement, raconte Magali. La directrice était complètement larguée, on s’est retrouvé avec des éducateurs qui étaient là, qui n’étaient plus là…"
"On a vécu un cauchemar"
Pour Ariane, leurs enfants ont été "endommagés" par cette école : "Il a fallu aller voir des psychologues, parce que tout d’un coup, on n’a pas reconnu nos enfants. Ils ont eu des comportements qui n’étaient plus les mêmes, ils étaient dans une insécurité affective émotionnelle énorme, et de nombreux parents disent que maintenant que les enfants sont retournés dans des écoles classiques, ça va beaucoup mieux."
On a le sentiment qu’on nous a vendu quelque chose d’extraordinaire et que ça a été un mirage… On nous a offert du rêve, et en fait on a vécu un cauchemar.
Arianeà franceinfo
Au total, une dizaine de familles ont retiré leurs enfants de cette école en décembre. Seuls six petits y sont encore scolarisés sur 20 au total. Pourtant, la directrice, Fabienne, affirme avoir réagi dès qu'elle a eu connaissance des comportements en question, en alertant les autorités : "Moi, je ne me suis sentie dépassée à aucun moment". Elle rejette enfin toute absence de cadre : "Alors ce n’est pas le cadre traditionnel, certes, c’est-à-dire que par exemple, les enfants ont la liberté de mouvement, c’est vrai, les enfants ne sont pas assis à une table, c’est vrai, mais c’est extrêmement cadré, et des règles, il y en a beaucoup, beaucoup, beaucoup ! Et d’ailleurs on passe généralement le 1er trimestre à inculquer ces règles aux enfants." Selon elle, les inspecteurs de l'éducation nationale ont approuvé sa gestion des choses lors de leur passage à l’école.
"Je ne sais pas ce que je paye"
Ce n'est pas un cas isolé. Même s'ils ne souhaitent pas généraliser, dans d'autres écoles, des parents pointent aussi le décalage entre le coût de la scolarité et la prestation offerte. "La compétence qui m’a été vendue, ce n’est pas ça que je paye, alors je ne sais pas ce que je paye", dénonce Stéphanie, maman d'Adrian, âgé de 5 ans. À la rentrée, cette maman a décidé qu'elle scolarisera son fils dans le public. Aujourd'hui, elle dépense 600 euros de frais de scolarité par mois dans son école de banlieue parisienne. "Mon fils n’a même plus d’éducatrice diplômée de l’association Montessori International (AMI)", affirme-t-elle.
Pour moi, les enfants sont livrés à eux-mêmes. On se le dit avec beaucoup de parents : 'Bon ben voilà, on s’est fait avoir !'
Stéphanieà franceinfo
Lorsque Stéphanie a découvert que son fils est le souffre-douleur d'autres enfants, elle raconte qu'il y a eu "six mois quand même où ça n’a pas été géré". Elle décide d'en parler à l'éducatrice, "et elle me dit 'oui, votre fils, il faut qu’il apprenne à se défendre'. Ce qui m’a manqué clairement, c’est l’écoute, la compréhension de l’enfant, la bienveillance."
Pas de label obligatoire
Il n'existe pas de label obligatoire pour les établissements. L'association Montessori France a élaboré une charte, mais seule une quinzaine d'écoles sur environ 200 établissements l'ont signée. "On y travaille, mais c’est vrai qu’il y a très peu d’écoles qui ont la charte d’établissement Montessori", affirme la présidente de l'association Anouche Hovnanian. "La limite de ce système, c’est que c’est une visite à un instant T qui va faire qu’on aura ou qu’on n’aura pas la charte, c’est compliqué pour nous de garantir un niveau de qualité pédagogique dans son intégralité en continu."
"On ressent le besoin d’aller plus loin, mais encore une fois, c’est une démarche qui est totalement volontaire de l’école", affirme-t-elle.
Si l’école n’est pas favorable à ce qu’on intervienne, on n’a pas d’autorité pour pouvoir intervenir.
Anouche Hovnanianà franceinfo
En attendant l'élaboration d'une nouvelle charte plus encadrante, l'association recommande en tout cas aux parents de s'assurer au moins de la présence d'éducateurs diplômés "Montessori International" dans les écoles. L'État a renforcé les conditions d'ouverture des écoles hors contrat : la loi exige désormais que les directeurs disposent d'au moins cinq ans d'expérience dans l'enseignement, mais là encore, pas de garantie totale, car des dérogations sont possibles.
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