Bétharram : "Je voulais me faire recenser comme victime, une victime parmi d’autres et fille du Premier ministre", déclare Hélène Perlant

La fille de François Bayrou témoigne des violences physiques dont elle a été victime dans le livre "Le Silence de Bétharram" d'Alain Esquerre, publié jeudi.

Article rédigé par franceinfo
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Hélène Perlant, fille de François Bayrou, victime d'une agression physique à Bétharram, sur France Inter, le 24 avril 2025. (FRANCE INTER)
Hélène Perlant, fille de François Bayrou, victime d'une agression physique à Bétharram, sur France Inter, le 24 avril 2025. (FRANCE INTER)

"Je voulais me faire recenser comme victime, une victime parmi d’autres et fille du Premier ministre", déclare, jeudi 24 avril sur France Inter, Hélène Perlant, la fille de François Bayrou. Dans le livre du porte-parole de l'association des victimes de Notre-Dame-de-Bétharram, Alain Esquerre, Le Silence de Bétharram, publié jeudi, elle révèle avoir été victime, adolescente, de violences lors d'un camp d'été organisé par la congrégation à laquelle appartient l'établissement privé catholique au cœur du scandale.

"Ce récit je l'offre à Alain pour me faire recenser", dit-elle. "Je voulais me faire recenser comme victime, dire 'j'en suis de Bétharram', je vais pouvoir parler avec eux, victime quelconque, une victime parmi d'autres et fille du Premier ministre", déclare-t-elle. "J'ai passé toute ma vie à effacer ce nom, à en changer, poursuit-elle, mais on a réfléchi avec Alain, je vais poser ce nom-là et le dire, parce qu'il y a quelque chose qui me fait souffrir, beaucoup, c'est d'entendre" les souffrances des collégiens de Bétharram. Hélène Perlant était au lycée, "où on ne voyait rien de tout ça", dit-elle. "Découvrir qu'à dix mètres de nous, il y a ces enfants battus, agressés sexuellement tous les jours, torturés dans le froid, la nuit, ces horreurs au milieu de nous, découvrir qu'il y a ça à côté de nous et ne l'avoir pas vu", confie-t-elle.

"On est tous abîmés, indépendamment du fait qu'on ait été directement victime ou pas."

Hélène Perlant, fille de François Bayrou

sur France Inter

Hélène Perlant assure à nouveau que son père n'était pas au courant. "Il est le père d'une victime, ce qu'il ne savait pas", affirme-t-elle sur France Inter. "J'ai été obligé de lui dire parce que Le Canard enchaîné l'a contacté. On avait l'intention de ne pas le dire", poursuit-elle. Il est reproché à François Bayrou d'avoir été au courant des violences qui se déroulaient dans l'institution. "Plus il y a de témoins, moins ça parle. Et plus on est intriqué, moins on voit", assure sa fille. Au sujet des déclarations de son père sur cette affaire, Hélène Perlant dit avoir "regardé sa ligne, la ligne de tous les autres, les accusations, les enquêtes, avec une distance, très calme, parce que quand on a réfléchi depuis des années à ce qu'est un dispositif pervers, il est impossible de s'en tirer".

"Ce système, à la fin, ça se retourne contre les parents qui n'ont rien vu, qui sont accusés."

Hélène Perlant, fille de François Bayrou

sur France Inter

Pour elle, il faut que son père "comprenne que lui, comme les autres, ne pouvait pas comprendre, parce que ça fonctionne comme ça, on a tellement tout sous les yeux qu'on ne voit rien, on ne peut pas comprendre". François Bayrou a réagi, mercredi, aux révélations de sa fille, se disant "bouleversé""En tant que père de famille, ça me poignarde le cœur", a déclaré le Premier ministre.

"Regards vides" des témoins de l'agression

Hélène Perlant insiste sur ce "silence" pesant à Bétharram, "ces enfants qui ne se parlent pas". "Jusqu'à aujourd'hui, on est tous persuadés d'avoir été seuls agressés et que le système n'est pas en cause", insiste-t-elle. "Quarante personnes" ont été témoins de son agression, assure-t-elle, et aucune n'a réagi. Elle décrit les "regards vides de 40 personnes, adultes, enfants, certains sont élus locaux". "On cherche quelque chose qui nous dit ce qu'on est en train de vivre et on voit des yeux vides, pas le moindre signe. On ne peut pas parler", souligne l'ancienne élève de Notre-Dame de Bétharrram. La même sidération qui l'a empêchée de parler quand elle a été témoin de l'agression d'un de ses camarades.

Mais Hélène Perlant dit vouloir relever la tête. "Ce qui est horrible, c'est cette agression faite au corps, qui vous prend dans votre dignité, qui vous laisse dans une humiliation pas possible, mais on n'est pas obligé de coller à ces récits-là, on peut s'en sortir", souligne-t-elle. 

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