"C'est préoccupant", déclare le général d'aviation Patrick Dutartre à propos des incursions de drones étrangers dans le ciel européen
Le général d'aviation, pilote de chasse et ancien leader de la Patrouille de France, Patrick Dutartre, était l’invité du journal de 20 Heures, mardi 23 septembre. Il est notamment revenu sur les incursions de drones étrangers dans le ciel européen.
Ce texte correspond à une partie de la retranscription du reportage ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.
Léa Salamé : Des attaques de drones se multiplient ces 15 derniers jours dans le ciel européen, violant l'espace aérien de plusieurs pays de l'Union européenne et de l'OTAN : le Danemark, la Norvège, mais aussi la Pologne, la Roumanie et l'Estonie. L'OTAN a appelé mardi 23 septembre la Russie à cesser l'escalade. Et la France ? Est-ce que la France peut être visée ? Et si nous étions attaqués, est-ce qu'on est prêts à se défendre, à y répondre ? Tout cela, c'est inquiétant ?
Général Patrick Dutartre : Je ne sais pas si c'est inquiétant, en tout cas c'est préoccupant et certainement une source de stress pour tous les responsables et également pour l'OTAN. Mais chaque cas est vraiment un cas particulier. C'est-à-dire qu'on n'a pas la même chose qui s'est passée en Pologne, en Roumanie, en Estonie ou [lundi 22 septembre] au-dessus de l'aéroport de Copenhague ou d'Oslo. Ce sont à chaque fois des choses différentes et je crois qu'il faut les prendre avec du recul, du sang-froid. Par contre, il faut effectivement trouver les raisons de chaque incident.
Vous dites que parfois il y a des drones qui attaquent, parfois ce sont des avions de chasse, comme en Estonie. Ce n'est quand même pas rien. Est-ce que ça pourrait nous arriver en France ? Est-ce qu'on pourrait imaginer, par exemple, l'aéroport de Roissy, comme celui de Copenhague, fermé pendant plusieurs heures à cause d'une attaque de drones ?
Général Patrick Dutartre : Alors, ce n'était pas forcément une attaque, mais en tout cas, effectivement, il y a eu une grosse perturbation due à des drones, trois ou quatre, ce qui est un peu nouveau, dans le ciel de l'aéroport de Copenhague. Je rappelle qu'à Londres, à Gatwick, à Orly ou à Roissy, nous avons déjà eu des incidents suite à des drones. Mais en l'occurrence, c'étaient des petits drones qui étaient utilisés par on ne sait qui, pas très bien intentionnés, et qui se mettaient au milieu de la trajectoire des avions de ligne.
Donc, évidemment, c'est un danger pour l'aéronautique civile et il faut absolument éviter cela. Alors, ça peut arriver dans n'importe quel aérodrome du monde, y compris en Israël, qui est normalement très bien protégé contre ce type d'incident. Pourquoi ? Parce que ces drones, maintenant, on en voit partout et de toutes les formes, de toutes les catégories.
Est-on assez protégés contre une attaque de drone ? S'il y avait une vraie attaque de drone, est-ce qu'on est suffisamment protégés ?
Général Patrick Dutartre : Alors, ça dépend du type d'attaque. Par exemple, pendant les JO 2024, nous avions une couverture aérienne organisée notamment par l'armée de l'air et de l'espace qui était assez dense, à base de fusils anti-drones, de drones anti-drones, d'hélicoptères, d'avions, voire même de missiles sol-air si on avait une menace aérienne beaucoup plus importante. Mais à la limite, tous les points sensibles en France, en Europe, devraient être équipés, si vous voulez, d'une sorte de protection contre ces drones.
Là où on est beaucoup moins bien protégés, et c'est une des leçons de ce qui s'est passé en Pologne, c'est vis-à-vis d'une défense de zone. Par exemple, le cas de la Pologne : elle a une frontière commune avec l'Ukraine de 300 km et 300 km avec la Biélorussie. Lorsque des drones qui normalement attaquent l'Ukraine tous les jours — je rappelle entre 400 et 800 drones qui bombardent l'Ukraine tous les jours, des drones russes — là, il n'y a aucun doute, certains d'entre eux, l'autre jour, le 9 septembre, 19 sont entrés dans l'espace aérien polonais. Et là, contre cette défense de zone, on n'est pas très bien armés en termes de défense aérienne.
Il faudrait construire des murs, un mur anti-drones, comme on entend dire ?
Général Patrick Dutartre : Absolument, ça en fait partie. Une des meilleures réponses, c'est une sorte de drone anti-drone. Pourquoi ? Parce que ce serait les moins coûteux. Ce qu'on sait faire aujourd'hui, qu'on ne fait peut-être pas assez, ce sont des hélicoptères d'interception. On peut même utiliser nos hélicoptères de combat en version défense aérienne. Et puis, il y a les chasseurs, mais essentiellement pour des missiles de croisière. Pour les petits drones, ce n'est pas bien adapté parce que c'est beaucoup trop coûteux.
L'OTAN a appelé la Russie à cesser l'escalade. L'OTAN a clairement pointé la Russie. Cela pourrait-il être quelqu'un d'autre que la Russie, tous ces événements en 15 jours ?
Général Patrick Dutartre : Je suis réservé sur ce qui s'est passé à Copenhague et à Oslo parce qu'il faut vraiment une enquête complémentaire. Je vois mal un drone partant de Saint-Pétersbourg ou de la frontière russe faire 1 000 km en plein milieu de l'OTAN et faire deux ou trois tours autour de Copenhague et repartir. Ça, je n'y crois pas beaucoup. Il y a d'autres options, mais en revanche, ce qui se passe en Pologne, il n'y a aucun doute, ce sont des drones russes qui attaquent l'Ukraine et là, il faut trouver les moyens de les attraper facilement.
S'agissant de l'Estonie, c'est autre chose. Ce sont des couloirs aériens qu'il y a au milieu du golfe de Finlande. Les appareils, les MiG-31 et d'autres appareils, circulent très régulièrement entre Saint-Pétersbourg et Kaliningrad. Or, ce n'est pas large, il y a un tout petit couloir entre la Finlande et l'Estonie qui est source de problème. Pourquoi ? Parce que les avions russes coupent un peu dans le virage et passent à trois kilomètres d’une petite île et c'est ce que les Estoniens appellent interdiction de survol de l'espace aérien. La question qui se pose : doit-on les intercepter et les descendre ? Ils sont systématiquement interceptés mais jusqu'à présent escortés.
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