Reconstitution en 3D des scènes de crime : la science au service de la vérité

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Article rédigé par franceinfo - P. Mauger, A. Richier, Ph. Maire, V. Llado, S. Ripault - Édité par l'agence 6Medias
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Lundi 22 septembre au palais de justice de Valence, 14 jeunes hommes, dont des mineurs, mis en examen dans le meurtre de Thomas, 16 ans, lors d’un bal à Crépol (Drôme), sont convoqués pour une reconstitution d’un nouveau genre. Deux ans après les faits et face aux mensonges, les magistrats ont opté pour une reconstitution numérique du déroulé de la soirée.

Ce texte correspond à une partie de la retranscription du reportage ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour le regarder en intégralité.

Un casque de réalité virtuelle(Nouvelle fenêtre), des avatars et des armes : il ne s'agit pas d'un jeu vidéo, mais dans une reconstitution de scène de crime. La scène a été recréée en 3D pour permettre à un suspect de rejouer une agression. "Nous avons une quantité importante de personnes qui sont présentes sur cette scène. La victime se trouve ici devant moi. On va récupérer un couteau et puis on va aller poignarder notre victime. La trace de sang générée vient impacter le mur", décrit David Brutin, professeur à l'université Aix-Marseille et porteur du projet iCRIME pour l'Agence nationale de la recherche.

Une immersion dans la scène de crime

L'angle des projections, leurs distances et leurs vitesses sont immédiatement calculés. Objectif : comprendre ce qu'il s'est passé, même quand la victime ne peut plus parler. Dans les enquêtes judiciaires, les reconstitutions en 3D existent déjà pour fixer les scènes de crime et les reproduire à l'identique. Grâce à des drones, lorsque les faits se sont déroulés en extérieur, ou avec un laser qui, dans une pièce, va scanner et numériser les indices et les traces, même les plus petites. En cours d'expérimentation, cette innovation va plus loin, en immergeant virtuellement le mis en cause dans la scène originelle, avant qu'il ne commette son crime et le confronter à ses déclarations.

"On va proposer aux mis en cause de refaire les gestes qu'ils ont éventuellement décrits lors d'un interrogatoire. On va les croiser avec ce qu'on a regardé sur la scène de crime, des images. On va voir si la conséquence d'un geste donne bien les mêmes traces que ce qui a été vu sur la scène de crime pour tester ce qu'ils nous disent", poursuit David Brutin.

La science au service de la vérité

Dans les affaires criminelles, les reconstitutions judiciaires sont coûteuses et sollicitent de gros moyens. 200 gendarmes mobilisés toute une nuit, par exemple, lorsque Nordahl Lelandais a été amené sur les lieux du mariage où il a kidnappé la petite Maëlys. Pour les magistrats, la réalité virtuelle permettra de retourner sur la scène de crime autant de fois que nécessaire.

"L'intérêt, c'est d'avoir un jumeau numérique de la scène réelle, et de pouvoir y aller sans polluer la scène. En protégeant la scène réelle, on y retourne autant qu'on veut, même lorsque la scène elle-même a disparu. Parce que c'est une scène en extérieur, parce que c'est une scène qui était dégradée", détaille François Lalès, magistrat et porteur du projet iCRIME pour la ministre de la Justice.

Une alternative lorsque la scène est jugée à risque

Une alternative aussi lorsque la scène est jugée à risque, comme lors d'un règlement de comptes en 2017 à Nice (Alpes-Maritimes), où un homme a été abattu. Le tireur a été représenté lors d'une modélisation du quartier des Moulins, réputé pour sa dangerosité. "Et dans ce climat-là, organiser une reconstitution, c'était compliqué. Bien évidemment, lorsque le juge d'instruction a dû faire le choix entre une reconstitution physique avec toute la logistique et une reconstitution virtuelle, le choix a été vite fait", explique Me Hervé de Surville.

La réalité virtuelle est un atout majeur pour la justice. Même si les enquêteurs l'affirment : elle ne remplacera jamais totalement une reconstitution bien réelle.

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