"Choose Europe for Science" : "C’est difficile à entendre et à prendre au sérieux", selon une chercheuse qui dénonce le paradoxe des annonces d'Emmanuel Macron

Pour Emmanuelle Perez-Tisserant, l'événement de La Sorbonne sert surtout "l’image du président, de l’Europe, et l’attractivité, pas tant la solidarité et la centralité de la recherche pour notre pays".

Article rédigé par franceinfo
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Emmanuel Macron lors du sommet "Choose Europe for Science" à La Sorbonne, lundi 5 mai 2025. (GONZALO FUENTES / POOL)
Emmanuel Macron lors du sommet "Choose Europe for Science" à La Sorbonne, lundi 5 mai 2025. (GONZALO FUENTES / POOL)

Après les annonces d’Emmanuel Macron, lundi 5 mai, lors du sommet "Choose Europe for Science" à la Sorbonne à Paris, la chercheuse et historienne Emmanuelle Perez-Tisserant, de l’université Toulouse Jean Jaurès, a exprimé ses réserves sur franceinfo : "C’est difficile à entendre et difficile à prendre au sérieux." Elle fait partie des initiatrices du mouvement Stand Up for Science France, né début mars pour témoigner de la solidarité avec les universitaires américains, alors que la politique scientifique des États-Unis sous Donald Trump est marquée par des coupes budgétaires et des restrictions sur la liberté académique.

Emmanuel Macron a annoncé un investissement public supplémentaire de 100 millions d’euros, via le programme France 2030, pour attirer les chercheurs étrangers, notamment américains, en France, alors que les États-Unis réduisent leurs financements et leurs visas dans le domaine scientifique. "La journée Choose Europe for Science a lieu à la Sorbonne, dont certains départements se sont eux-mêmes déclarés en chômage technique depuis plus d’un mois", ironise Emmanuelle Perez-Tisserant. Elle décrit la réalité quotidienne dans cette prestigieuse université : "Un certain nombre de moyens de travail, ne serait-ce que les abonnements à des revues, à des services, ne peuvent plus être assurés. On peine à trouver des professeurs à mettre devant les étudiants. En fait, on n’a pas les moyens de travailler correctement."

Elle souligne le paradoxe entre les annonces et la situation sur le terrain : "Avoir la même semaine, l’annonce du programme "Choose Europe" et ces baisses budgétaires drastiques qui non seulement n’améliorent pas la situation, mais même l’empirent, c’est difficile à entendre et difficile à prendre au sérieux." Selon elle, ce qui se joue à la Sorbonne, c’est plutôt "l’image du président, de l’Europe, et l’attractivité, pas tant la solidarité et la centralité de la recherche pour notre pays".

Une université pas "à la hauteur"

Emmanuel Macron a affirmé que "la recherche est une priorité, l’innovation une culture, la science un horizon sans limite". Mais cette déclaration laisse l’historienne perplexe : "On n’a pas une université de recherche à la hauteur de cette offre, de ce fameux horizon sans limite." Le mouvement Stand Up for Science France réclame que la France se donne réellement les moyens d’accueillir ces chercheurs américains et de soutenir la recherche nationale.

Le chef de l’État a également assuré "avec force" qu’"un chercheur étranger ne remplacera pas un chercheur français", lors de son discours à La Sorbonne. "J’aimerais bien le croire, mais en fait, tout dans les faits montre qu’on ne fait pas l’effort pour recruter suffisamment de collègues sur des postes pérennes, qui donnent des bonnes conditions à la fois pour qu’ils fassent de la recherche pour la France justement, mais aussi pour former des étudiants dans de bonnes conditions", dénonce Emmanuelle Perez-Tisserant. Enfin, la chercheuse regrette qu’il n’y ait "pas vraiment de chercheurs français" lors de ce sommet.

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