"Ce statut permettrait d'aller beaucoup plus vite" : François Hollande a déposé une proposition de loi pour accepter les chercheurs menacés dans leur pays comme "réfugiés scientifiques" en France

"L'objectif est de montrer que la France est un pays ouvert lorsque les États-Unis se referment sur eux-mêmes", indique François Hollande à France Inter.

Article rédigé par franceinfo
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François Hollande, ancien président de la République et député de Corrèze. (SAMEER AL-DOUMY / AFP)
François Hollande, ancien président de la République et député de Corrèze. (SAMEER AL-DOUMY / AFP)

L'ancien président de la République, François Hollande, indique, lundi 14 avril, à France Inter avoir déposé sa proposition de loi à l'Assemblée nationale afin de créer un statut de "réfugié scientifique" et d'accueillir en France les chercheurs menacés pour leurs travaux dans leurs pays, à commencer par les États-Unis de Donald Trump. Selon le député PS, "ce statut permettrait d'aller beaucoup plus vite" que le droit d'asile. "L'objectif est de montrer que la France est un pays ouvert lorsque les États-Unis se referment sur eux-mêmes et que les régimes autoritaires ont des politiques agressives, de répression", ajoute l'ancien président.

Vous appelez à la création d'un statut de "réfugié scientifique". Pour quelles raisons ?

François Hollande : Aujourd'hui, les pays concernés sont hélas nombreux. Il y a des chercheurs, des scientifiques qui sont menacés, non pas pour leur intégrité personnelle, mais surtout pour la poursuite de leurs travaux. L'idée, qui est portée par des universités françaises et en particulier l'université d'Aix-Marseille, serait d'accueillir ces chercheurs, de leur permettre de pouvoir disposer d'un titre de séjour, d'un visa scientifique avec le statut de réfugié, et de pouvoir continuer leurs recherches ici en France. Ce qui serait à la fois pour ces chercheurs une protection, mais pour nous un grand centre d'intérêt puisque ces chercheurs, ces experts, pourraient mettre leurs connaissances au service de notre pays et du monde. Voilà pourquoi j'ai pris l'initiative de déposer une proposition de loi qui accorderait à ces scientifiques un visa pour qu'ils puissent rester en France pour poursuivre leurs travaux.

Y a-t-il une urgence à créer ce statut ? Lorsque vous évoquez de scientifiques menacés, à quoi faites-vous référence ?

Pour parler tout à fait clairement, ce qu'il se passe actuellement aux États-Unis, la politique de Donald Trump, aboutit à ce que des scientifiques soient non seulement licenciés, mais aussi chassés de leur université, que leurs travaux soient mis en cause pour les sujets qu'ils traitent, et donc que ces scientifiques cherchent à venir en Europe et plus particulièrement en France. Je veux faciliter leur insertion et leur intégration. Je pense qu'ils sont demandeurs. Déjà beaucoup l'ont fait et sont déjà en France avec des titres de séjour ou des titres touristiques. Ce qu'il faut, c'est pouvoir pérenniser leur présence à travers un visa qui serait un visa pour travaux scientifiques. Les universités sont désireuses de les accueillir et tout à fait prêtes à le faire. Cela ne suffira pas puisqu'il faudra qu'ils puissent, ces chercheurs, s'insérer dans des laboratoires, mais ça, ça ne relève pas de la loi, ça relève de politiques universitaires.

Que changerait ce statut par rapport au mécanisme classique du droit d'asile ?

Ce statut permettrait d'aller beaucoup plus vite, c'est-à-dire d'avoir un visa qui tient compte du travail scientifique que mènent ces chercheurs, et donc leur donnerait une présence sur le territoire beaucoup plus longue. Cela facilitera leur entrée et leur donnera une présence plus longue sur le territoire. Je pense que ces scientifiques sont très demandés sur le plan international, sont eux-mêmes motivés pour venir en France. Si on les laisse partir, ils iront ailleurs, dans d'autres pays européens, ou en Asie, où on pourra leur proposer des conditions de travail et des titres de séjour qui les stabiliseront. C'est une opportunité de circonstance mais c'est surtout une obligation. Il faut que les travaux que menaient ces scientifiques puissent être poursuivis dans l'intérêt même de la recherche mondiale. Je pense notamment à tous ces chercheurs sur le climat car ce sont eux qui sont les plus visés par la politique de Donald Trump.

Vous dites que le rendez-vous est historique ?

Oui, il est historique car il se trouve que Donald Trump va rester pendant quelques années. Et il n'y a pas que Donald Trump, il y a aussi des chercheurs qui sont menacés dans des pays avec des régimes autoritaires. Il est opportun qu'on montre que le monde continue de fonctionner même s'il y a des politiques qui sont contraires à cet échange, à cette culture, à cette volonté d'ouvrir les recherches à des travaux qui sont importants pour l'humanité. S'ils sont interrompus, entravés, empêchés, ce sera un recul pour l'histoire de l'humanité. Le symbole est de montrer que la France est un pays ouvert lorsque les États-Unis se referment sur eux-mêmes et que les régimes autoritaires ont des politiques agressives, de répression. C'est retrouver la France des Lumières, celle qui était capable d'accueillir à d'autres époques des chercheurs persécutés qui venaient du monde entier. Là, il s'agit de donner à la science toute sa place et à la France tout son rôle pour développer et encourager toutes les recherches sur ce qui est le plus essentiel, c'est-à-dire l'avenir du climat, la science en matière de santé, tout ce qui est entravé pour des raisons idéologiques.

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