"Polluants éternels" : l'Anses alerte sur la présence des PFAS dans l'environnement et livre ses pistes pour mieux les contrôler
L'Agence de sécurité sanitaire publie deux rapports inédit sur ces "polluants éternels", potentiellement toxiques, mais dont la grande majorité reste hors des radars.
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Ils sont très prisés pour leurs résistances et utilisés massivement par l'industrie dans de très nombreux secteurs : les PFAS. L'Agence de sécurité sanitaire (Anses), publie mercredi 22 octobre, un rapport inédit sur ces substances appelées aussi les "polluants éternels". Ils sont omniprésents dans notre quotidien et peuvent être toxiques. Certains sont par exemple cancérogènes, des perturbateurs endocriniens, ou encore ont des effets sur la fertilité ou le développement des fœtus.
L'Anses publie une photographie très précise de cette pollution. Pendant deux ans, les services de l'agence ont compilé "près de deux millions de données" relatives à quelque 250 PFAS. "On les a complétées par d'autres substances pour lesquelles on a trouvé des informations sur leur présence dans des sous-lots de contamination ou sur des données de toxicité qui n'existaient pas dans les bases de données ou dans la littérature qu'on avait collectées", précise Nawel Bemrah, coordinatrice du groupe de travail sur les PFAS.
Au bout du compte : un pavé de 700 pages. Pour définir une stratégie de surveillance, l'agence a établi un "score" pour chacune des molécules étudiées, basées sur les données disponibles d'occurrence et de toxicité. Car si la restriction de l'usage de ces molécules, comme le font certains pays dont la France, est "une priorité pour limiter leurs émissions", "face à une famille de substances aussi vaste et hétérogène, identifier les plus préoccupantes est un élément majeur pour optimiser les dispositifs de surveillance", souligne l'Anses.
Des PFAS omniprésents
Le premier constat dressé par ces rapports est une confirmation que les polluants éternels sont tout autour de nous. Ils sont tout d'abord présents dans l'eau et cela concerne les rivières, jusqu'aux nappes phréatiques et à notre robinet, avec parfois des dépassements des limites de qualités. Depuis 2010, une soixantaine de communes sont concernées en France, c'est le cas actuellement dans la Meuse ou dans les Vosges par exemple.
Les PFAS sont aussi présents dans notre alimentation. Le PFOS, classé possible cancérogène, a notamment été détecté dans le poisson et dans d'autres produits de la mer. Dans les œufs aussi les PFAS s'accumulent. En Île-de-France, d'ailleurs, l'Agence régionale de santé recommande de ne pas manger d'œufs des poulaillers de plus de 400 communes. Vêtements, produits de bricolage, ou même fart de ski, là aussi, on retrouve des polluants éternels.
Concernant la contamination des populations, "les teneurs moyennes en PFAS qui ont été mesurées dans le sang de la population française sont du même ordre de grandeur que celles mesurées chez nos voisins européens", que ce soit chez les enfants ou chez les adultes, a indiqué Céline Druet, directrice adjointe à l'évaluation des risques. Les niveaux relevés se situent en moyenne "en dessous des seuils sanitaires" existants, a précisé Nawel Bemrah.
Des "polluants éternels" hors des radars
Y a-t-il des PFAS dans l'air que nous respirons à l'intérieur des maisons ? Dans les poussières ? Dans les sols ? Dans l'eau de mer ? "Les données manquent", souligne l'Anses. Autre angle mort, l'exposition professionnelle : les pompiers, au contact de mousses anti-incendies bourrées de PFAS, les travailleuses et travailleurs de l'industrie chimique, ou de la papeterie ? Que risquent-ils ? Aucune étude française n'a été recensée.
D'autre part, la grande majorité de ces polluants éternels restent hors des radars. Il existe plusieurs milliers de molécules, le rapport ne s'arrête que sur 250. L'Anses recommande de chercher mieux et plus, pour mieux mesurer les contaminations, et mieux protéger notre santé. Et cela commence par ce que nous consommons. Aujourd'hui, on ne recherche que quatre PFAS dans certains aliments, l'Agence préconise d'en analyser désormais "une vingtaine", et de le faire dans la quasi-totalité de notre nourriture. Par exemple, aujourd'hui les polluants éternels ne sont pas réglementés dans les produits pour bébés. En ce qui concerne l'eau, 20 PFAS de références aujourd'hui, l'Agence préconise d'en rechercher encore plus.
Une vigilance sur le TFA recommandée
L'anses recommande notamment de s'interresser au TFA (acide trifluoroacétique). C'est une toute petite molécule qui inquiète, peu de données existent pour le moment sur sa toxicité. Les experts redoutent une "contamination généralisée" des milieux aquatiques et donc notre eau, avec des concentrations qui pourraient largement dépasser celles des autres polluants éternels. "Le TFA a été intégré parce qu'il répond à des enjeux de santé publique", détaille Nawel Bemrah.
"Le TFA a une forte occurrence essentiellement dans l'eau et en plus certaines études ont révélé qu'il se retrouvait également dans le sang humain"
Nawel Bemrah, coordinatrice du groupe de travail sur les PFAS
À ce stade non réglementée, cette molécule, matière première dans la production de produits phytosanitaires ou pharmaceutiques (antidiabétiques, antiviraux, anti-VIH, thérapies anticancéreuses...) et dont la toxicité est en cours d'évaluation par l'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa), est le PFAS "le plus retrouvé" dans l'eau du robinet, selon un rapport d'enquête de Générations Futures, publié en février.
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