Enquête "J'ai commencé à tout perdre dans ma vie" : les ravages de la cocaïne, une drogue qui s'est installée dans le quotidien des Français

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Article rédigé par France 2 - M. Boisseau, T. Donzel, L. Krikorian, M. Niewenglowski, G. Marque, G. Liaboeuf. Édité par l'agence 6Medias
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Cette drogue n'est plus réservée aux milieux festifs. Désormais livrée à domicile, plus pure et moins chère, elle séduit toutes les générations. Derrière l'illusion d'une drogue "fonctionnelle", des vies s’effondrent, entre addictions, drames familiaux et un marché en plein essor.

Ce texte correspond à une partie de la retranscription du reportage ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder dans son intégralité.


Stéphanie achète de la cocaïne toutes les semaines et ne peut plus s'en passer. Cette mère de famille accepte de témoigner pour montrer que cette drogue n'est plus réservée au show-business mais concerne aujourd'hui la population ordinaire. Aide-soignante, elle dépense toujours plus à cause de son addiction : "Je dépense à peu près 200 euros par mois, ça peut monter jusqu'à 600 euros", confie-t-elle. Le tout pour un revenu de 1 900 euros net par mois.

Découverte lors de fêtes avec son ex-compagnon, la cocaïne s'est immiscée dans son quotidien. Elle en consomme désormais seule chez elle, en pleine journée, parfois même au travail, à l'hôpital : "Ça stimule, ça réveille, ça coupe la faim aussi. Ça m'aide à tenir la nuit." Mais cette habitude s'est transformée en perte de contrôle : Stéphanie s'isole aux toilettes pour consommer une dose.

Un marché en plein essor et une distribution simplifiée

Le nombre de consommateurs de cocaïne explose en France : 1,1 million en 2023, deux fois plus qu'en 2017. La production mondiale en hausse et les nouvelles méthodes de distribution expliquent ce phénomène.

La drogue est désormais livrée à domicile. Benjamin, trentenaire parisien, n'a qu'à sortir son téléphone pour recevoir sa commande. En 22 minutes, un livreur casqué se présente sur son palier. Lui consomme jusqu'à 10 grammes par mois.

Le prix moyen n'a jamais été aussi bas. Résultat : "C'est plus facile de consommer, donc tu peux consommer plus", explique-t-il. Les trafiquants se multiplient sur les réseaux sociaux, usant de codes publicitaires pour séduire les clients.

Les trafiquants misent sur la pureté et l'addiction

Un ancien dealer de la Côte d'Azur témoigne : la cocaïne est plus rentable et plus discrète que le cannabis. "Ça pouvait me rapporter entre 6 000 et 15 000 euros nets par mois", affirme-t-il.

Pour maximiser leurs bénéfices, les trafiquants augmentent la pureté du produit. En dix ans, elle est passée de 49 % à 73 %. Une évolution inquiétante, selon les laboratoires de police scientifique, car plus la cocaïne est pure, plus elle est addictive et dangereuse pour la santé.

Entre tentatives de sevrage et drames humains

Caroline, consommatrice repentante, témoigne de son combat. "J'ai commencé à tout perdre dans ma vie, de A à Z", raconte-t-elle, après avoir décidé d'arrêter. Mais il n'existe ni substitut, ni traitement spécifique. Seule la patience et l'accompagnement médical permettent d'espérer une guérison : "On dit qu'il faut une année. La première année, le risque de rechute est de 70 %" explique Sophie Captier-Valette, addictologue.Pour se donner du courage et briser le tabou, Caroline partage son parcours sur les réseaux sociaux.

Mais pour certains, l'issue est tragique. Théo, 28 ans, sportif et pompier volontaire, est décédé d'une overdose en juin dernier. Sa famille, dévastée, a créé une association pour sensibiliser les jeunes aux dangers de cette drogue encore trop souvent perçue comme anodine.

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