"Il y a encore un tabou autour de la consommation d'alcool chez les femmes", estime un addictologue

Les femmes et les hommes sont exposés aux mêmes risques lorsqu'ils consomment de l'alcool. Pourtant, les conséquences sont plus graves chez les femmes, selon un rapport de la Haute autorité de santé. franceinfo a posé la question à un addictologue.

Article rédigé par Philippine Thibaudault
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
L'alcool entraîne chez les femmes des dommages plus graves, plus rapides ou plus spécifiques comme le cancer du sein. (NICOLAS KOVARIK / MAXPPP)
L'alcool entraîne chez les femmes des dommages plus graves, plus rapides ou plus spécifiques comme le cancer du sein. (NICOLAS KOVARIK / MAXPPP)

"Les femmes et les hommes ne sont pas égaux face à l'alcool." Le constat émane de la Haute autorité de santé (HAS), dans un communiqué publié mercredi 26 février et intitulé : "Alcool, un sujet de santé pour les femmes à toutes les étapes de la vie". L'alcool entraîne ainsi, chez les femmes, des dommages "plus graves, plus rapides ou plus spécifiques""Les complications associées à la consommation sont amplifiées [chez les femmes]", ajoute la Haute autorité de santé (HAS). Entretien avec William Lowenstein, addictologue et président de SOS Addictions.

franceinfo : Quels sont les dommages sur la santé des femmes ? 

William Lowenstein : Les alcools favorisent absolument tous les cancers, dont évidemment le cancer du sein [le premier cancer de la femme]. Et à côté des cancers et des problèmes hormonaux, il y a aussi les conséquences neurologiques, notamment les polynévrites périphériques. C'est-à-dire les atteintes des nerfs périphériques qui sont plus fréquentes chez la femme, tout comme les cirrhoses qui sont plus fréquentes, parce que plus tardivement diagnostiquée chez la femme. Sans parler des complications cardio-vasculaires. Avec le tabac, la pilule et l'alcool, l'infarctus du myocarde va devenir une maladie féminine.

Pourquoi ces maladies sont tardivement diagnostiquées ?

Il y a encore un tabou autour de la consommation de l'alcool chez les femmes. Jadis, les femmes qui buvaient étaient des femmes de mauvaise vie. Il y a ce côté honteux à aller consulter et cette menace sociale.

"Les usages précoces sont ceux qui vont entraîner le plus de dommages et le plus de dépendance."

William Lowenstein, président de SOS addictions

à franceinfo

Chez un homme, trop d'alcool, c'était une cicatrice un peu virile sur un visage, tandis que chez la femme, c'était une cicatrice qu'il fallait maquiller. Donc, il y a un principe de honte qui entraîne un retard de consultation et donc un retard de diagnostic. 

La Haute autorité de santé regrette une "sous-évaluation médicale des femmes et un moindre accès aux aides disponibles". Est-ce un constat que vous partagez ?

Il ne faut pas que les médecins parlent de l'alcool uniquement quand la femme est enceinte. C'est bien, mais c'est insuffisant. Le message qu'on devrait tous passer, c'est : "dès que vous pensez vouloir être enceinte, vous arrêtez l'alcool." Avant de vous rendre compte que vous êtes enceinte, il y aura eu quatre ou six semaines, qui à la fois vont menacer le développement global de la grossesse et le développement embryonnaire. On doit parler aux femmes de l'alcool à partir de l'instant où elles ont envie de faire des bébés. En termes de prévention, c'est fondamental.

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