Groenland : le scandale des stérilets forcés enfin reconnu par le Danemark

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Article rédigé par France 2 - A. Bouleis, H. Hug, M. Hauville, L. Barbazanges - Édité par l'agence 6Medias
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Des décennies après une campagne de stérilets imposés aux jeunes femmes inuites, le Danemark reconnaît enfin sa responsabilité. Des milliers de Groenlandaises, stérilisées contre leur gré, voient leur souffrance reconnue et un fonds d’indemnisation être créé pour réparer ce scandale longtemps placé sous silence.

Ce texte correspond à une partie de la retranscription du reportage ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder dans son intégralité.


Il aura fallu des décennies pour que la glace se fissure. Au Groenland, le Danemark reconnaît enfin sa responsabilité dans un scandale qui a anéanti les rêves de milliers de femmes pendant près de 30 ans. Tout commence à la fin des années 60, quand les autorités danoises lancent une campagne de contraception forcée pour réduire le taux de natalité chez les Inuits. Des poses de stérilet, y compris chez des mineures, souvent sans consentement.

Arnaq Johansen, victime de contraception forcée au Groenland, témoigne : "Je n'avais que 12 ans. Je n'avais pas encore mes règles et je n'y connaissais rien. Le médecin m'a montré le lit et m'a dit de m'allonger." À 21 ans, Arnaq Johansen a fait enlever son stérilet, mais il était trop tard. "Pas d'enfants. J'ai voulu des enfants pendant des années." confie-t-elle encore bouleversée.

Comme elle, beaucoup de femmes sont devenues stériles après cette contraception forcée. Selon le Dr Aviaja Siegstad, gynécologue, les dispositifs de l'époque pouvaient gravement endommager le corps des jeunes filles. "La taille d'un utérus d'une jeune fille qui n'a jamais été enceinte ne peut pas accueillir un stérilet en spirale à sa taille réelle. La spirale ne peut pas tenir dans la cavité, cela représente donc des risques de perforation."

Des voix longtemps étouffées

En 1970, plus de 4000 femmes, soit la moitié des Groenlandaises en âge de procréer, ont reçu un stérilet. Le taux de natalité s'écroule, passant de 7 enfants par femme en moyenne à 2 seulement. Un succès pour le gouvernement danois de l'époque, une violation de l'intimité pour Naja Lyberth, victime de contraception forcée, la première à dénoncer ce scandale en 2017. "Je dirais que c'était comme un abus sexuel, car ils ont franchi une limite. En touchant à mon ventre." raconte-t-elle.

Son témoignage a libéré la parole de plus de 300 femmes qui se croyaient seules. "Quand tu as commencé à parler des stérilets sur Facebook, j'ai demandé mon dossier médical et c'est ainsi que j'ai su. J'ai beaucoup pleuré, mais je suis contente, reconnaissante de connaître la raison pour laquelle je n'ai pas pu être enceinte." confie une des victimes à Naja Lyberth.

Le Danemark vient d'annoncer la création d'un fonds pour indemniser les victimes groenlandaises. Ces femmes inuites, empêchées de porter la vie, voient enfin leur souffrance reconnue.

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