Agroalimentaire : une étude dénonce l'"inaction coupable" du gouvernement sur la transition alimentaire des supermarchés

Dans cette étude publiée mardi, le Réseau Action Climat évalue les enseignes de supermarché françaises sur leur contribution à une alimentation saine et durable. Il pointe notamment la prépondérance des produits carnés ultratransformés dans les rayons "au détriment des aliments végétaux de qualité".

Article rédigé par franceinfo
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Des personnes font leurs courses dans un supermarché, le 12 octobre 2024 à Saint-Grégoire (Ille-et-Vilaine). (MATHIEU PATTIER / MAXPPP)
Des personnes font leurs courses dans un supermarché, le 12 octobre 2024 à Saint-Grégoire (Ille-et-Vilaine). (MATHIEU PATTIER / MAXPPP)

Selon une étude du Réseau Action Climat (RAC) publiée mardi 13 mai, les supermarchés français sont en retard sur la transition alimentaire, malgré quelques progrès. L'étude pointe notamment "l'inaction coupable des pouvoirs publics" français pour pousser les grandes surfaces à faire des efforts, alors que l'alimentation représente un quart de nos émissions de gaz à effet de serre et que 78% de ce que nous mangeons vient des supermarchés.

Dans cette deuxième édition, le RAC évalue les enseignes de supermarché françaises sur leur contribution à une alimentation saine et durable, et les compare au niveau européen. L'étude porte sur huit enseignes (Aldi, Auchan, Carrefour, Coopérative U, Intermarché, Leclerc, Lidl, Monoprix), qui représentent 90,6% des parts de marché en France, et les juge sur plusieurs critères.

Le constat est identique à celui de 2023, avec une précarité alimentaire aggravée par deux ans d'inflation, des maladies chroniques liées à l'alimentation qui ont progressé et une crise agricole qui persiste. "L'alimentation continue de représenter 24% de nos émissions de gaz à effet de serre, dont les deux tiers proviennent de notre consommation de viande et de produits laitiers", écrit le Réseau Action Climat, qui pointe notamment la prépondérance des produits carnés ultratransformés dans les rayons "au détriment des aliments végétaux de qualité".

Leclerc et Aldi en bas du classement

Si l'étude apprécie des "progrès en matière de transparence, d'engagements et de plans d'action", de grosses disparités existent entre les enseignes. Carrefour avec son 12,5/20 de moyenne, et Monoprix avec son 12/20, sont les mieux notées sur les trois critères principaux : la transparence, les engagements et plans d'action, et la promotion d'une alimentation durable. Suivent ensuite, les magasins U (10/20), Auchan (9,5/20), Lidl (9/20) et Intermarché (8/20). Dans le bas du classement, Leclerc dévisse avec une moyenne de 4,5/20 devant Aldi, lanterne rouge, avec son 2/20.

Le RAC pointe notamment du doigt le manque d'options végétariennes dans les rayons des supermarchés. "Seuls 8% des plats préparés en rayon ne contiennent ni viande ni poisson", aucun changement depuis 2023. "Tous les distributeurs proposent plus de cordons bleus ou de nuggets que des falafels ou des steaks de pois chiches", déplore le coordinateur de l'étude, Benoît Granier au micro de France Inter. "Ce sont des produits ultratransformés, avec des additifs et des viandes importées", regrette-t-il.

"On reste dans un logiciel ancien qui consiste à vendre des grandes quantités des produits à faible prix, tant pis si c'est au détriment de la santé des consommateurs, de l'environnement et de la rémunération des agriculteurs."

Benoît Granier, coordinateur de l'étude

à France Inter

La comparaison avec d'autres distributeurs européens (Allemagne, Royaume-Uni, Pays-Bas, Belgique, Danemark) révèle le retard des enseignes françaises. Le degré d'avancement des distributeurs étrangers s'explique en partie par "l'adoption de lois et stratégies ambitieuses" par leurs pouvoirs publics, ce qui fait "largement défaut en France".

Les 55 entretiens menés avec des professionnels du secteur, dont plusieurs PDG et DG de la grande distribution sont clairs : il faut que "l’Etat définisse un cap et un cadre clair en faveur de la transition, et mène des politiques ambitieuses pour promouvoir une alimentation plus végétale avec moins de viande, mais de meilleure qualité et produite en France ; déployer l’étiquetage environnemental ; renforcer les capacités financières des ménages pour accéder à une alimentation de qualité". Ils reconnaissent également le besoin de co-construction collective de cette politique, entre acteurs économiques, pouvoirs publics et société civile, avec des "règles du jeu et des objectifs communs pour transformer le secteur agroalimentaire".

Interdire la publicité pour certains produits

Parmi les recommandations adressées au gouvernement français, il y a l'intégration des conclusions du rapport dans sa Stratégie nationale pour l'alimentation, la nutrition et le climat (SNANC), qui doit être rendue avant l'été. Selon l'étude, il est "indispensable" que la SNANC interdise la publicité et le marketing pour les produits trop gras, sucrés et salés, en particulier lorsque ces activités ciblent les enfants. La Stratégie doit aussi "fixer des objectifs chiffrés de réduction de la consommation de viande, assortis de mesures pour réduire les importations, favoriser la consommation de viande de qualité produite en France et garantir aux éleveurs une juste rémunération, tout en développant la consommation et la production de légumineuses".

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