Agroalimentaire : "L'hexane constitue un secret de Polichinelle", alerte Guillaume Coudray, journaliste d'investigation, dans son enquête "De l'essence dans nos assiettes"
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Mercredi 17 septembre, Guillaume Coudray, journaliste d'investigation et spécialiste des pratiques de l'industrie agroalimentaire, est l'invité de la Matinale de franceinfo. Accompagné en plateau par David Lefort, journaliste sciences franceinfo TV, il tire la sonnette d'alarme sur un scandale sanitaire avec son enquête "De l'essence dans nos assiettes", éditée chez La Découverte.
Ce texte correspond à la retranscription d'une partie de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.
Jean-Baptiste Marteau : Pouvez-vous nous expliquer ce que c'est exactement que l'hexane, et comment elle se retrouve dans notre assiette ?
Guillaume Coudray : L'hexane, c'est un hydrocarbure assez proche du white spirit qu'on utilise pour nettoyer les pinceaux après le bricolage. Depuis les années 1930, des industriels américains ont eu l'idée d'utiliser ce solvant, puisque cet hydrocarbure a une grande capacité à dissoudre les graisses très forte, pour aller chercher dans les graines et dans les fruits la partie huileuse des végétaux. Cela permet d'extraire plus d'huile que lorsqu'on utilise les bons vieux moulins à huile du passé, les pressoirs.
Donc ça veut dire que ça fait plus d'un siècle qu'on se retrouve avec des traces d'essence dans nos huiles du quotidien ?
Cette technologie a été inventée d'abord à Chicago dans les années 30. Et en France, on a commencé à l'utiliser après la Seconde Guerre mondiale. Progressivement, c'est devenu la norme. Aujourd'hui, la plupart des usines qui fabriquent de façon industrielle, qui traitent les oléagineux, travaillent avec de l'hexane.
Comment le consommateur ne peut-il pas être informé de cette chose ? Vous le révélez dans votre enquête, on a l'impression que c'est quelque chose d'assez courant. Tout le monde est au courant dans l'industrie agroalimentaire, sauf le consommateur.
C'est ce que j'appelle un secret de Polichinelle. Cela touche tous les spécialistes du secteur, aussi bien les spécialistes de l'huile que ceux de l'alimentation animale, parce qu'il y a aussi beaucoup d'hexane dans l'alimentation qu'on donne aux animaux d'élevage.
Donc on se retrouve aujourd'hui avec, dans le lait par exemple, y compris le lait infantile, des traces de ces hydrocarbures ?
Exactement, des résidus. Pas dans tous les produits, pas de façon systématique, parce que les industriels peuvent plus ou moins bien désolvanté l'huile ou le tourteau. Mais dans une quantité de produits, on retrouve des traces infimes, toujours en dessous de la limite légale, c'est là où le bât blesse, c'est la limite légale. Mais rien ne prouve que les traces résiduelles de cet agent soient inoffensives. Au début, lorsqu'on a inventé cette technique, on croyait que l'hexane était neutre, que c'était inoffensif, que c'était stable. Il a fallu plusieurs décennies pour commencer à découvrir que ce n'était pas du tout le cas. L'hexane, au contraire, se transforme, le mot technique c'est métaboliser, en une molécule encore plus dangereuse qui s'appelle la 2,5-hexanédione.
Effectivement, ça paraît technique. Concrètement, on a des résidus d'essence dans nos assiettes au quotidien. C'est en dessous des normes, donc vous nous dites que tout ça est parfaitement légal. Mais il y a un risque pour la santé. Et il est prouvé, ce risque, et documenté scientifiquement ?
Tout à fait. Il est de deux ordres, essentiellement. Peut-être qu'on va découvrir encore plus de choses. Mais globalement, cela concerne les maladies neurologiques d'un côté, par exemple Parkinson. On appelle cela des neuropathies, c'est-à-dire tout ce qui concerne le système nerveux. Le cerveau, la moelle épinière, et puis ce qu'on appelle le système nerveux périphérique. D'un côté, les maladies neurologiques, l'hexane est un neurotoxique confirmé, c'est indiscutable. D'autre part, c'est un reprotoxique. Ça veut dire qu'il est toxique pour le système reproducteur.
Est-ce que l'hexane peut expliquer en partie la baisse de fertilité chez de nombreuses personnes en France et ailleurs ?
Exactement. Le mécanisme est bien compris, bien connu. Il est similaire chez les humains et chez d'autres mammifères. C'est-à-dire que l'hexane, et ses métabolites, ses substances issues de l'hexane que notre corps transforme après ingestion d'hexane, vont attaquer la spermatogenèse, c'est-à-dire les tubes séminifères qui fabriquent les spermatozoïdes. Et pareil chez la femme, on va aller attaquer les cellules qui protègent les ovules et qui leur permettent de maturer.
Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.
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