Les syndicats face à l'extrême droite : "Ce qui est compliqué, c'est que le Rassemblement national est devenu le grand parti du monde du travail" remarque Jean Viard
Des rassemblements partout en France pour manifester contre l'extrème-droite, à l'appel en particulier des syndicats. Peuvent-ils avoir le même écho que des initiatives similaires prises par le passé ?
Appel à la mobilisation, ce samedi, contre l'extrême droite, partout en France. On se souvient de la levée de boucliers spectaculaire après les résultats du premier tour en 2002. La situation est-elle la même aujourd'hui ? La réponse du sociologue Jean Viard.
franceinfo : En quoi cet appel et cette mobilisation des syndicats peuvent-ils être reçus différemment ?
Jean Viard : En 2002, la France était sidérée, personne ne s'y attendait, il y a eu un effet de choc et donc des manifestations énormes. Aujourd'hui, il reste une forme de sidération parce que l'extrême droite fait peur à beaucoup de gens, mais on ne peut pas dire qu'on ne savait pas : depuis 1972, on assiste à sa montée en puissance de manière continue, en France et en Europe. La position des syndicats est républicaine quand ils considèrent que l'extrême droite ne fait pas partie des forces de l'arc républicain. Ce qui est compliqué, c'est que le Rassemblement national est devenu le grand parti du monde du travail. Il faut noter aussi que les femmes populaires se sont mises à voter pour l'extrême droite, ce qui n'était pas le cas auparavant : l'inflation, les problèmes de niveau de vie, les problèmes de fin de mois dans les familles populaires poussent les femmes vers le Rassemblement national.
Quand on regarde parmi les adhérents des syndicats (qui appellent à manifester aujourd'hui), on constate qu'ils sont de plus en plus nombreux à voter RN. C'est assez paradoxal ?
Les syndicats essayent de faire pression, ce qui est le cas de beaucoup de gens en ce moment, contre l'arrivée au pouvoir du Rassemblement national. Or une partie de leurs militants soutient le RN et des conflits en interne ont lieu. Mais les syndicats jouent un rôle de défense des valeurs universelles du travail. Ils considèrent chaque travailleur d'abord comme un travailleur, éventuellement exploité et à protéger, quelle que soit son origine, sa couleur, son poids et sa taille. Ne garantissons pas l'idée que le monde ouvrier est forcément à gauche, parce qu'il l'a été après la Seconde guerre. Aujourd'hui, le monde ouvrier n'est pas majoritairement à gauche et cela transparaît dans les syndicats.
Dans la profession de foi du RN pour les législatives, le retour à une retraite à 60 ou 62 ans n'est plus là. Comment le comprendre ?
Quand on est dans l'opposition, on peut promettre la lune, quand on est au pouvoir, c'est difficile de l'accrocher. C'est vrai pour tout le monde. 20 % des patrons votent pour l'extrême droite, qui revient en effet à un certain réalisme économique. On a vu une telle évolution en Italie de manière très nette, avec le retour de nombreux travailleurs immigrés parce que l'économie en a besoin. Plus on se rapproche d'un discours raisonnable, rationnel, admis par les économistes, plus on perd des électeurs. Le RN en est là : tenter d'avoir un discours, disons, négociable avec Bruxelles et les entrepreneurs, et conserver un électorat qui a été galvanisé par la promesse de retour de la retraite à 60 ans. Cela serait une merveilleuse nouvelle, mais la vraie merveilleuse nouvelle, c'est qu'on a gagné 25 ans d'espérance de vie et qu'il faut trouver des solutions pour les financer.
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