"La Sécu, une ambition perdue ?" de Léo Rosell, aux éditions JCLattès

Cette semaine, un historien se demande ce qui demeure de la philosophie originelle de la Sécurité sociale, 80 ans après sa création.

Article rédigé par franceinfo
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L'historien rappelle dans quel contexte très particulier est née la Sécurité sociale. (LEO ROSELL / JCLATTES)
L'historien rappelle dans quel contexte très particulier est née la Sécurité sociale. (LEO ROSELL / JCLATTES)

Alors que le projet de loi de financement de la Sécurité sociale présenté cette semaine par le gouvernement prévoit d’importantes économies, voici livre qui nous replonge aux origines de notre la Sécu, c’est-à-dire il y a 80 ans, à quelques jours près – elle vient de fêter son anniversaire.

Établir un "nouvel ordre social"

La Sécurité sociale est née dans un moment très particulier, juste après la Seconde Guerre mondiale, un moment de rapprochement inédit entre l’État et le mouvement ouvrier. Et ce que constate l'historien Léo Rosell, c’est qu’il y a eu un renversement de logique, entre cette époque et aujourd’hui : en 1945, il n’était pas question de "réduction de dépenses" mais au contraire de "financement des besoins".

L'ambition des fondateurs de la Sécu était tout simplement d’établir un "nouvel ordre social", ce sont les mots employés à l’époque par le premier directeur de la Sécurité sociale, Pierre Laroque, un haut fonctionnaire qui travaillait main dans la main avec un ministre communiste, Ambroise Croizat.

L’idée était d’offrir une protection sociale universelle contre l’ensemble des risques sociaux, de la naissance à la mort.

Des économies à partir des années 70

"Chacun selon ses moyens, chacun selon ses besoins", c’était la philosophie de ce projet qui s’était construit pendant la guerre, qui était inscrit dans le programme du Conseil national de la Résistance, mais qui avait des opposants, notamment du côté du patronat, des professions libérales ou des indépendants.

Il a donc fallu – c’est intéressant de le souligner aujourd’hui – des négociations et des compromis pour mettre en place ce système, avec des régimes spéciaux qui n’étaient pas prévus à l’origine. Mais tout cela a permis l’apparition de prestations sociales, qui ont d’ailleurs participé à la croissance de l’après-guerre.

Mais depuis les années 70, c’est-à-dire depuis que les crises économiques se succèdent, ces prestations sont régulièrement menacées par des mesures d’économie.

Choix politique et choix de société

Ces crises ont imposé selon Léo Rosell une approche purement budgétaire de la Sécurité sociale, avec une bascule décisive en 1996 : depuis cette année-là, ce ne sont plus les partenaires sociaux qui gèrent le régime général, c’est le parlement qui fixe son budget chaque année.

Ce sont les fameuses lois de financement de la Sécurité sociale, comme celle qui est envisagée par le gouvernement Lecornu, avec de nouvelles économies.

Alors avant que cette loi ne soit débattue, l’historien rappelle que les choix politiques au sujet de la Sécu sont aussi des choix de société, tout comme l’État avait fait un choix de société en 1945 en instaurant un système de protection qui devait "libérer les Français de la peur du lendemain".

"La Sécu, une ambition perdue ?" de l’historien Léo Rosell, aux éditions JCLattès.

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