"L'accident de piano" : le nouveau jeu de massacre jouissif de Quentin Dupieux

Revoilà Quentin Dupieux, le prolifique réalisateur à l'humour noir qui passe à la moulinette, cette fois, l'univers des réseaux sociaux et des influenceurs.

"L'accident de piano" de Quentin Dupieux

Avec Adèle Exarchopoulos méconnaissable en Magalie, riche influenceuse au succès phénoménal, coiffure garçonne improbable, bagues dentaires, élocution saccadée. Elle cartonne avec de courtes vidéos où elle s'inflige des traitements violents, car insensible à la douleur. Mais sur un tournage, un accident regrettable l'oblige à se mettre au vert à la montagne avec son fidèle homme à tout faire (Jérôme Commandeur) esclave consentant et intéressé.

Ça se gâte quand une journaliste (Sandrine Kiberlain) qui sait des choses, exerce un chantage pour obtenir une interview exclusive. Dans ce jeu de massacre sur la vie numérique, les personnages transpirent la solitude et la vacuité, pas un pour rattraper l'autre. Quentin Dupieux s'en délecte, même s'il admet que tout n'est pas à jeter dans les réseaux sociaux.

D'une infinie noirceur, toujours aussi efficace et à l'os, ce nouveau Dupieux ravira les amateurs d'humour très noir, par son regard implacable sur les travers de l'époque. C'est sans appel, mais malheureusement très juste, et on retrouve sa précision cinématographique, sa direction d'acteur au cordeau, jusqu’au moindre second rôle, avec par exemple un Karim Leklou génial et flippant en fan harceleur de la dite influenceuse.

"L'Aventura" de Sophie Letourneur

C'est la suite de Voyages en Italie sorti il y a deux ans, et même concept ou presque : des vacances d'été en famille, la Sardaigne succédant à la Sicile pour le décor. Cette fois, le couple Sophie Letourneur-Philippe Katerine alias Sophie et Jean-Phi – qui était parti il y a deux ans, en crise, sans les enfants pour se "retrouver" et finalement vivre le même train-train mais ailleurs – embarque cette fois avec les enfants, Claudine et Raoul, respectivement 12 et 3 ans.

Banales, et même triviales, les scènes de repas, de plages ou de voiture qui s'enchaînent parlent à tout le monde, sans prétention. Sophie Letourneur parvient à faire entrer de l'universel, et même la vie, tout simplement, dans tout ça.

Moins drôle et donc plus sombre que le précédent, L'Aventura fonctionne très bien, sans doute un peu long (1h47). C'est en grande partie en raison de la manière qu'a la réalisatrice de tout mettre à nu. Les dialogues et les situations sont des adaptations de moments personnels enregistrés en famille, en été et en Italie, il y a près de 10 ans. La réalisatrice y intègre aussi un dispositif quasi-méta, avec chaque membre de la famille devant débriefer chaque jour ou presque, avec chacun sa version, les événements de la journée.